Par peur ou par solidarité ? Peu importe, ils ont préféré adopter une position de mutisme dans une rencontre où il a été surtout question de la gestion des hauts responsables de l'Etat. Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, M. Tayeb Belaïz, a annoncé, hier à Alger, que “le wali d'El-Tarf a été arrêté ce matin, suite au mandat de dépôt prononcé à son encontre par la chambre d'accusation de la Cour suprême”. “La chambre d'accusation a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction”, a déclaré à la presse, M. Belaïz, en marge des travaux de la réunion gouvernement-walis, précisant que cette chambre est composée de trois magistrats. Le ministre a indiqué que les trois magistrats ont “confirmé (la décision) à nouveau en prononçant un mandat de dépôt”, expliquant que devant la chambre d'accusation de la Cour suprême, la présence de l'inculpé et de ses avocats “n'est pas nécessaire”. Par ailleurs, M. Belaïz a fait savoir que “le procureur de la Cour suprême et le procureur d'Alger sont obligés d'exécuter cet arrêt de la chambre d'accusation”. Si l'affaire de l'ex-wali d'El-Tarf a défrayé la chronique ces derniers jours sur sa prétendue arrestation, voire son évasion de la prison de Serkadji, il n'en demeure pas moins que les déclarations du ministre de la Justice permettent de clarifier les choses en l'absence d'une communication des institutions de l'Etat sur le dossier. Cependant, hier au Palais des nations, les walis ont évité de se prononcer sur cette affaire. Par peur ou par solidarité ? Peu importe, ils ont préféré adopter une position de mutisme dans une rencontre où il a été surtout question de la gestion des hauts responsables de l'Etat, walis ou ministres soient-ils, et de la lutte contre la corruption. Car il faut bien le souligner, la réunion d'hier à laquelle a assisté le président de la République jusqu'à la fin des travaux ne s'est pas limitée à la simple présentation des bilans des projets lancés depuis la rencontre de juin dernier. Alors que trois décrets présidentiels, entrant dans le cadre de la loi relative à la prévention et la lutte contre la corruption, ont paru hier dans le Journal officiel, le chef de l'Etat n'a pas manqué de faire de la lutte contre la corruption le combat de toute la “société”, soulignant que l'image de l'Algérie ne saurait faire l'objet d'un quelconque marchandage. Si le président Bouteflika s'en est pris violemment à Abou Djerra Soltani après les déclarations de ce dernier sur l'implication de hauts responsables de l'Etat dans les affaires de corruption, le sommant de fournir les preuves à la justice au risque de le poursuivre, c'est dans l'objectif de lever les équivoques. Il est vrai que la lutte contre la corruption est devenue un axe important dans la politique du gouvernement, mais il serait inconcevable en même temps de traiter ce fléau avec légèreté même si des cas de corruption ont été identifiés, puis déférés à la justice. Le chef de l'Etat a, dans ce cadre, fixé les règles du jeu. Pas de déclarations ou de révélations sans que celles-ci soient accompagnées de preuves tangibles surtout lorsqu'il s'agit de hauts cadres de la République. Abondant dans le même sens, le Chef du gouvernement a souligné qu'il n'est pas normal qu'à ce niveau de responsabilité on puisse se permettre d'accuser sans preuves. Tout en demandant “à tous ceux qui ont des informations et des dossiers sur la corruption de joindre directement sans aucune autorisation, les procureurs de la République et les procureurs généraux”, Abdelaziz Belkhadem a indiqué que les décrets d'application sur la lutte contre la corruption ont tous été adoptés, relevant par la même occasion l'existence d'une instance chargée d'instaurer le cadre juridique permettant la lutte contre ce fléau. Pour sa part, le ministre de la Justice et garde des Sceaux, qui a annoncé que le parquet de la République s'est autosaisi suite aux déclarations du président du MSP, a averti que “si des personnes ont des dossiers comme elles le prétendent, elles doivent les remettre à la justice, dans le cas contraire, elles se rendront coupables du délit de non-dénonciation ou d'outrage à corps constitué”. Pour Tayeb Belaïz, le ministère public est “donc libre de déclencher l'action publique sauf dans des cas bien précis lorsque le législateur impose une plainte au préalable comme c'est le cas dans les affaires de diffamation”. Salim Tamani