Coups, blessures, enfermement, brimades, insultes, menaces, attouchements ou rapports sexuels forcés… Dans l'espace public ou privé, la femme algérienne est victime de violence. L'enquête nationale sur la violence à l'égard des femmes met en évidence la prévalence de ce phénomène qui touche la femme dans son intégrité morale et physique. La synthèse des résultats de l'enquête nationale sur la violence à l'égard des femmes a été présentée, hier, par le ministère délégué chargé de la Famille et de la Condition féminine, au même titre que ceux relatifs à l'intégration socioéconomique des femmes. L'étude sur la violence à l'égard des femmes réalisée par le Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC) durant le ou mois de juin 2006 permet de mesurer la gravité en Algérie de ce phénomène qui touche à des taux plus moins importants tous les pays du monde. Pour la directrice générale du CRASC, l'étude en elle-même constitue une avancée considérable et dénote une certaine transformation sociale. “Il y a une aspiration nouvelle, les femmes aujourd'hui veulent exister en tant que personne. Même au sein d'une relation aussi institutionnalisée qu'est le mariage, les femmes osent parler et parlent de violences…”, a précisé Mme Remaoun. Deux approches ont été utilisées par les chercheurs. La première approche consistait en une étude socio-anthropologique qui a donné la parole aux victimes et qui incluait également une étude des représentations sociales (focus groupes). Il s'agit en second de l'enquête type ménage qui a cerné près de 2 043 ménages répartis sur les quatre régions du pays couvrant 11 wilayas et 28 communes. Une femme par ménage a été concernée par un questionnaire regroupant plus de 300 questions. La population féminine représentée est âgée entre 19 et 64 ans révolus. 63% résident en milieu urbain et 37% en milieu rural. Près de 54% d'entre elles sont mariées, un tiers célibataires, et une femme sur dix est soit divorcée, soit veuve. Une femme sur cinq est occupée, 50% n'ont jamais travaillé, une femme sur dix a déjà travaillé et plus d'une femme sur dix est étudiante. La synthèse des résultats est effarante. L'espace privé, notamment le couple, constitue un terreau pour ce phénomène. Les femmes en couple, qu'elles soient mariées ou non (fiancé, petit ami…), déclarent à près de 16% avoir subi des violences physiques durant leur vie. Durant les 12 derniers mois, soit entre juin 2005 et juin 2006, près d'une femme sur 10 affirme en avoir subi. Et ce, de manière répétée et régulière. Pour les violences verbales, près de deux femmes sur dix ont été l'objet d'insultes humiliantes ou dégradantes. Elles sont trois sur dix à déclarer avoir subi des pressions psychologiques. Celles-ci se déclinent en sept catégories entre les menaces de violence physiques sur elle ou sur les enfants, les menaces de répudiation, d'enlèvement de la garde des enfants, de la privation de budgets… Quant aux violences sexuelles au sein du couple, une femme sur dix (10,9%) affirme avoir été contrainte à des rapports sexuels forcés sur les douze derniers mois. L'espace public ne protège pas non plus la femme. Elles sont 6% à avoir subi des violences verbales, 6,3% des violences physiques, 5% à avoir fait l'objet de harcèlement sexuel ou d'attouchements, 0,6% de violences sexuelles. Le milieu du travail a également ses chiffres. La violence verbale touche 12,10% des femmes. Elles sont 2,15% à déclarer avoir subi de la violence physique, 1,6% du harcèlement sexuel et 1% des violences sexuelles. Plus grave encore, les femmes ne sont pas exemptes de violence dans le sacro-saint espace éducatif ou de formation. Près de 10,8% déclarent avoir subi de la violence verbale, 4,7% de violence physique, 7% de harcèlement sexuel ou des attouchements et 1,9% des rapports sexuels forcés. Les femmes violentées consomment deux fois plus de tranquillisants et de psychotropes que les femmes qui ne sont pas victimes de violence. Leur malaise et la violence se répercutent également sur les enfants. Un enfant sur cinq, dont la mère est victime de violence, a des troubles du sommeil, de l'alimentation, de la scolarité. “Plus les femmes sont jeunes, plus elles sont maltraitées dans le couple. Elles ont entre 35 et 55 ans, mais c'est surtout parce que les plus jeunes ne sont pas encore mariées”, a précisé Mme Mimouni, chercheur au CRASC. Le niveau d'instruction a également son incidence. “Les femmes d'un niveau primaire et analphabète sont les plus maltraitées. Plus la femme est instruite et moins elle déclare de violence.” Nouara Djaâfer, ministre déléguée chargée de la Famille et de la Condition féminine a estimé que le sujet de la violence à l'égard des femmes n'est pas un sujet tabou et qui nécessite que les pratiques et idées dans la société évoluent afin de lutter contre ce phénomène. D'autant que les deux enquêtes nationales permettent de fait de relancer le débat sur le statut, le rôle et la place de la femme dans la société. Nouara Djaâfer fustige le rapport du Pnud La ministre déléguée chargée de la Famille et de la Condition féminine a officiellement réagi sur le rapport du Pnud relatif au monde arabe et qui a été très critique sur l'intégration socioéconomique de la femme dans la région. “Ce rapport met tous les pays arabes dans un seul panier. Chaque pays a ses spécificités et caractéristiques. Le rapport du Pnud n'a pas cerné la femme algérienne. Tout ce que nous demandons est qu'il soit objectif”, a précisé Nouara Djaâfer. Il semble que l'institution onusienne n'ait pas pris en considération dans son rapport les différentes réformes introduites en Algérie notamment celles du code de la famille et de la nationalité. S. S.