Ignorant tous les appels de la communauté internationale pour la suspension des exécutions des anciens du régime de Saddam Hussein, les autorités irakiennes ne semblent pas vouloir l'apaisement. Prônant dans ses discours la réconciliation nationale, le Premier ministre irakien ne fait en réalité qu'approfondir la division entre les différentes communautés du pays, notamment avec les sunnites, qui avaient très mal pris la pendaison de Saddam Hussein. Opérant toujours dans le plus grand secret, sans qu'aucune annonce préalable n'avait été faite, le gouvernement de Nouri al Maliki a procédé hier à la pendaison de deux proches de Saddam Hussein : Barzan al Tikriti et Awad al Bandar, deux semaines après l'exécution de l'ancien président irakien. L'exécution a eu lieu à 03h (heure locale) (00H00 GMT) dans un lieu qui n'a pas été révélé. “Barzan al Tikriti et Awad al Bandar ont été pendus ce matin”, a annoncé le porte-parole du Premier ministre, Ali al Dabbagh. Il prendra même le soin d'indiquer lors de sa conférence de presse que “la tête de Barzan s'est détachée de son corps lors de sa pendaison. Cela est déjà arrivé auparavant”. Selon lui : “Comme prévu par la loi, les deux condamnés ont été informés du verdict de condamnation à mort prononcé par le Haut Tribunal pénal irakien. L'exécution s'est déroulée dans la dignité en présence du procureur Mounqith al Faroun, d'un juge et d'un médecin.” Ali al Dabbagh ajoutera : “Nous avons informé tous les témoins assistant à l'exécution qu'ils devaient se comporter avec dignité et respect. Ces témoins se sont engagés par écrit à respecter la dignité des condamnés pendant l'exécution.” “Avant de mourir, Awad al Bandar a demandé à être enterré près du président Saddam Hussein”, a déclaré un membre de sa famille qui a affirmé que “les corps ont été remis à la police. On nous a demandé de venir les chercher pour les enterrer”. Pour rappel, les deux hommes devaient être pendus en même temps que Saddam Hussein, le 30 décembre, dans une caserne des renseignements militaires à Bagdad, mais leur exécution avait été ajournée au dernier moment pour une raison indéterminée et avait été depuis reportée, après l'indignation suscitée par la diffusion sur Internet d'une vidéo pirate de la pendaison de l'ex-dictateur. Barzan al Tikriti, 55 ans, et Awad al Bandar, 60 ans, ainsi que Saddam Hussein avaient été condamnés à mort le 5 novembre 2006 pour le massacre de 148 villageois chiites de Doujaïl, au nord de Bagdad, tués en représailles après un attentat manqué contre le convoi présidentiel en 1982. Ainsi, en dépit des condamnations en chaîne suscitées par l'ignoble pendaison du président irakien déchu le premier jour de l'Aïd al Adha et les nombreux appels à la suspension des exécutions, notamment celle du nouveau secrétaire général de l'ONU, le gouvernement Al Maliki ne recule devant rien et poursuit son œuvre vindicative. Il avait prévenu que le gouvernement mènerait à bien les exécutions, estimant qu'il s'agissait d'une “affaire interne ne concernant que les Irakiens”. Réagissant à ces nouvelles exécutions, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso et le président du Conseil italien Romano Prodi, ont condamné hier à Rome l'opération, tout en rappelant leur opposition à la peine de mort. K. ABDELKAMEL