Ali Benflis se donne les moyens de sa politique. Après son plébiscite, les assises lui offrent un comité central sur mesure. Le 8e congrès du FLN a pris fin jeudi. Il s'est déroulé comme l'avaient souhaité Ali Benflis et son équipe. Le parti, lui, est désormais totalement acquis. Mieux, avec les pleins pouvoirs qu'il s'est adjugés, “le professeur” peut l'orienter dans la direction qu'il veut. Après avoir été plébiscité par les 1 300 congressistes, le secrétaire général du FLN a eu droit à un comité central taillé sur mesure et expurgé de tous les éléments susceptibles de barrer la route à ses ambitions. Il s'agit surtout de Amar Tou, Abelkader Hadjar et Saïd Barkat qui, soupçonnés de s'inscrire dans d'autres options que celles que la formation majoritaire au Parlement s'est assignées, ont été tout simplement écartés de l'instance consultative. Cependant, plusieurs figures connues du parti, celles qu'on qualifie de “vieille garde”, ont eu la caution de la base. Boualem Benhamouda, El-Hadi Khediri, Mohamed Salah Yahyaoui font tous partie de la nouvelle configuration du CC. Mais ceux-là ont déjà tous basculé dans le camp de Benflis en lui exprimant, dès le premier jour du congrès, leur soutien indéfectible. Pour le premier, le patron du FLN est “un militant sincère, un homme intègre et honnête”. Pour le second, “il a réussi le pari de la modernisation et du rajeunissement”. Autant d'éloges pour un homme qui résiste mal à la tentation, tout fort qu'il en est sorti de ces huitièmes assises, de la prochaine présidentielle. Des éloges soutenus, par ailleurs, par l'appui franc du leader de la Centrale syndicale, Abdelmadjid Sidi Saïd, qui, quand ils sortent de la bouche de personnages aussi influents sur la politique du FLN qu'un El-Hadi Khediri, Mohamed Salah Yahyaoui ou encore Bouâlem Benhamouda, valent leur pesant d'or. A une année de l'élection présidentielle, Benflis, qui s'abstient à aborder le sujet, ne peut mieux faire pour s'y préparer. La kermesse politique que lui a organisée sa formation ne ressemble en aucun cas à ces congrès ordinaires où les partis font juste le point sur leur situation organique, mais à un rendez-vous fastueux qui s'apparente beaucoup plus à un acte de candidature pour des fonctions plus hautes que celles qu'on peut exercer au niveau d'un parti. Ali Benflis, il faut le dire, s'est donné, lors de ce congrès, les moyens de sa politique. Il a réuni d'abord le consensus autour de lui. Il s'est ensuite doté d'un programme dont la résolution de politique générale adoptée jeudi dernier par les congressistes annonce des orientations contraires à celles qui ont marqué la gestion du pays depuis quatre ans. Le texte final a, en effet, évacué toute référence à la politique présidentielle en matière sécuritaire. Le congrès dénonce “le terrorisme barbare qui vise à déstabiliser le pays”, et salue “le rôle important de l'Armée nationale populaire dans l'éradication de ce fléau transnational”. A propos de la crise de Kabylie, il a appelé le mouvement citoyen, les partis et la société civile “à faire prévaloir la sagesse et le dialogue pour préserver l'unité nationale et mettre la région à l'abri de toute tentative de récupération”. Le FLN relance, par ailleurs, la réforme des structures de l'Etat pour améliorer les prestations publiques et rétablir la confiance des citoyens en l'administration. Sur le plan économique, Ali Benflis a affiché clairement, dans son discours, son opposition à la politique menée par l'équipe présidentielle, une position qui a amené, d'ailleurs, le secrétaire général de l'UGTA à dire que les déclarations du responsable du FLN sont “une victoire morale pour son organisation et les travailleurs algériens”. Tout porte à croire, en effet, que l'actuel Chef du gouvernement veut réussir là ou le président de la République a échoué. On peut même dire qu'à la lecture du programme du FLN, que sur plusieurs points, les deux hommes sont en parfait décalage. C'est ce que nous éclairera certainement I'avenir. En attendant, le parti de Benflis s'attelle à finir son édification structurelle avec l'élection du bureau politique dans les tout prochains jours, avant de passer à la préparation du congrès extraordinaire portant sur l'élection présidentielle de 2004. S. R.