La visite de Jean-Louis Debré, le président de l'Assemblée nationale française en Algérie, à l'invitation de son homologue algérien, Amar Saïdani, n'a rien révélé sur le devenir du traité d'amitié algéro-français : “La signature d'un traité international n'est pas de la compétence du Parlement. C'est un document qui est de la compétence des Etats et des Exécutifs. Je ne suis donc pas habilité à vous dire quand est-ce que le traité d'amitié sera signé et il n'est pas de ma responsabilité de me prononcer sur cette question”, a expliqué hier Debré dans un bref point de presse à l'Assemblée populaire nationale, à l'issue des entretiens qu'il a eus avec le président de la République et du président de l'APN. Il précisera que sa visite en Algérie intervient suite à la rencontre entre les deux présidents français et algérien en 2003 qui ont “fixé la nécessité d'avoir un partenariat d'exception entre les deux pays”. À travers une coopération parlementaire, “nous souhaitons apporter une pierre à cet accord dans tous les domaines, et de façon à ce que ce partenariat soit de plus en plus exceptionnel”, dira-t-il tout en notant que “l'amitié entre nos deux pays devra se concrétiser par la conclusion des accords de coopération”. Relancé sur le devenir du traité d'amitié et sa possible signature durant le mandat de Chirac ainsi que sur la disposition du président de la République lors de son entretien avec lui à accélérer sa signature, Jean-Louis Debré a eu cette réponse : “Il n'est pas dans ma tradition ni ma conception de la politique de faire état des entretiens avec des personnalités, mais je peux dire que notre entretien est frappé du sceau de la conscience de la nécessité d'aller de l'avant entre les deux pays.” “Mon souhait, compte tenu de l'expérience du président Bouteflika, était de l'interroger sur la situation de ses rapports avec la France et du Moyen-Orient”, dit-il encore expliquant que “j'ai rencontré un homme d'Etat qui a une réflexion sur ces sujets”. Aussi et lors d'un discours prononcé devant les députés à l'issue de la conclusion d'un protocole-cadre de coopération parlementaire, Debré a indiqué que le président Bouteflika “a exprimé son attachement au développement des relations qui lient nos deux nations et nous avons constaté une grande convergence sur les questions internationales que nous avons évoquées”. Et de noter que “cet entretien représente pour moi un moment exceptionnel”. Quoi qu'il en soit, Debré s'est déclaré être “un partisan des relations exceptionnelles qui doit y avoir entre l'Algérie et la France” et s'est engagé à œuvrer “toujours à ce que ce partenariat soit toujours exemplaire”. “Nous devons ensemble assumer notre histoire” À la question de savoir si la France compte satisfaire l'exigence de présenter des excuses à l'Algérie sur les méfaits de la colonisation comme préalable à la signature du traité d'amitié, l'hôte de l'APN dira : “Nous devons ensemble assumer notre histoire et notre passé.” Et de formuler une proposition dans le cadre des lois françaises, consistant en l'institution d'une commission algéro-française de “chercheurs, d'historiens pour se pencher sur la période de la colonisation”. Dans ce cadre et lors du discours prononcé devant les parlementaires, Debré a indiqué que la loi du 23 février 2005 adoptée par le Parlement français “a suscité nombre de malentendus et de divisions qui pourtant n'étaient pas de l'intention du législateur”. Tout en notant qu'“il n'appartient pas à la loi d'écrire l'histoire”, l'hôte de l'APN indiquera que “nous devons engager et poursuivre une démarche exigeante et rigoureuse de vérité, qui, avec le temps, conduira au rapprochement des mémoires”. “Ce travail a déjà commencé, de nombreux débats ont été menés en France à ce sujet et je note que l'étude scientifique de l'histoire coloniale est devenue un champ d'activité majeur des historiens français”, dira-t-il avant d'ajouter qu'“un jour une lecture commune et apaisée de notre histoire sera possible”. Il expliquera dans ce cadre que “tout grand pays se doit d'assumer son histoire, les pages glorieuses comme les épisodes les plus sombres”. La France, dira-t-il, “comme d'autres nations ne faillira pas à cette exigence”. À ses yeux, “la France et l'Algérie ne peuvent ni ne doivent oublier leur passé commun”. “J'espère que viendra le jour où ce passé ne sera pas un obstacle à la préparation de l'avenir, de notre avenir partagé”, conclut-il. Debré appelle les Français à investir en Algérie La coopération entre les deux pays, Jean-Louis Debré la veut intéressant tous les domaines : la défense, le culturel, l'universitaire et l'économique. Expliquant à ce propos que “les entreprises françaises sont loin d'être absentes puisqu'elles sont déjà au premier rang des investisseurs étrangers hors hydrocarbures, mais nous devrions pouvoir, effectivement faire mieux, assez rapidement”, dit-il, s'appuyant sur la mise au point d'un aide-mémoire sur le partenariat économique et financier et la désignation de quatre filières prioritaires pour l'investissement français. Se félicitant dans le même ordre d'idées que l'Algérie soit un “partenaire économique majeur pour la France”, Debré appellera les investisseurs français à venir investir en Algérie. Au plan de la coopération militaire et de défense, le président de l'Assemblée nationale française dira qu'elle “progresse” comme en témoigne, dit-il, “le récent exercice Raïs Hamidou, conduit par nos deux marines en novembre dernier”. Debré annoncera dans la foulée que “nos deux pays devraient pouvoir signer dans un avenir proche une convention de coopération en matière de défense, symbole fort du nouveau cours de nos relations”. Un autre type de coopération est défini à travers “la coopération décentralisée”. Cette dernière, dira Debré, devrait impliquer les collectivités locales des deux pays pour opérer un rapprochement entre les deux peuples. La coopération parlementaire n'est, par ailleurs, pas en reste. La signature d'un protocole-cadre, hier, pose ainsi les bases de cette coopération que l'hôte de l'APN veut “renforcer”. Dans les faits, cette coopération vise à “accroître la coopération technique à l'intention des fonctionnaires parlementaires, promouvoir le dialogue entre les députés français et algériens sur les relations entre les deux pays ainsi que sur les grandes questions internationales”. À ce propos, Debré soulignera “la dimension humaine” dans cette coopération définie à travers “le nouveau régime de circulation des personnes entre nos deux pays”, dit-il. NADIA MELLAL