“Le statut de pays producteur-exportateur de pétrole ne facilite pas la conclusion rapide d'un accord pour l'accession de l'Algérie à l'OMC”, a estimé, à Alger, la chef de la section des négociations commerciales à la Cnuced, qui contredit, ainsi, le négociateur en chef algérien dans le processus d'adhésion. La question de l'adhésion de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est revenue, ces jours-ci, au devant de la scène avec la tenue à Alger d'un séminaire international sur la diplomatie commerciale et l'accès à l'OMC. Mais, plutôt que de contribuer à éclaircir cette problématique dans le but d'une accélération du processus de négociation et d'adhésion, la rencontre, marquée par des interventions d'experts nationaux et étrangers, a fait apparaître une polémique sur les délais et les conditions d'intégration des rangs de l'organisation. Pis, elle a montré à quel point est très profond le fossé qui sépare les visions et la perception du processus par, d'un côté, les négociateurs algériens et, de l'autre, les représentants d'institutions internationales. En effet, alors que le négociateur en chef algérien Cherif Zaâf affirmait que l'Algérie est “au stade final du processus d'accession à l'OMC, dont elle pourrait devenir membre en 2007”, la chef de la section des négociations commerciales à la Cnuced, Mina Mashayekhi, présente à Alger, émet un tout autre son de cloche en estimant que “le statut de pays producteur-exportateur de pétrole ne facilite pas la conclusion rapide d'un accord pour l'accession de l'Algérie à l'OMC”. Les obstacles à une rapide adhésion de l'Algérie à l'OMC ne sont donc pas minces. Et si les délégués algériens n'ont pas manqué de citer parmi ces problèmes à régler “des volets liés aux normes, aux mesures sanitaires, aux licences d'importation et aux restrictions à l'importation”, la déclaration de la responsable de la Cnuced vient montrer que l'intégration de l'OMC demeure hypothétique tant que certains choix stratégiques de l'Etat ne sont pas révisés, des choix liés, notamment à la politique énergétique du pays. Cela revient à dire que tant que cette politique énergétique, dans ses différents volets, n'est pas modifiée dans le sens d'une libéralisation totale du secteur, la problématique de l'adhésion restera incertaine, voire non possible. La déclaration de Mme Mashayekhi montre que les pays membres de l'organisation ne manqueront pas de brandir leur veto face à l'Algérie pour la forcer à changer sa politique énergétique. C'est un message clair envoyé à l'adresse d'Alger qui est, apparemment, pressé d'accélérer son processus d'adhésion. Mais, l'Algérie est-elle prête à revoir ses positions stratégiques pour accéder aux exigences de l'Organisation mondiale du commerce ? Les dossiers soulevés par la responsable de la Cnuced ne sont pas des moindres et constituent, à n'en pas douter, une véritable source d'embarras tant les changements à ce niveau ne seront pas faciles à mettre en œuvre. Mme Mashayekhi a, en effet, clairement signifié que l'Algérie sera appelée à ouvrir ses services énergétiques à la concurrence et à renoncer au double prix de l'énergie pour adhérer à l'organisation. En plus donc “d'une ouverture conséquente (à la concurrence internationale) de ses services à l'énergie”, l'Algérie doit, par ailleurs, résoudre la question du double prix de l'énergie pratiqué sur son marché domestique, en particulier celui du prix du gaz cédé aux industries locales. Et comme ces questions demeurent très sensibles, les nouvelles embûches dressées devant le processus d'adhésion à l'OMC vont-elle pousser l'Algérie à revoir sa décision d'intégrer les rangs de l'organisation ? Mais, par-delà cette problématique, le pays a-t-il vraiment le choix d'adhérer ou de ne pas le faire à cette organisation ? Et quels sont les avantages et inconvénients de telle ou telle option ? Le pays ne risque-t-il pas de se retrouver isolé économiquement sur la scène internationale dans le cas où il déciderait de rester en dehors de la dynamique OMC ? Dans le cas contraire, les autorités algériennes sont-elles vraiment prêtes à concéder des sacrifices aussi énormes pour accéder aux exigences de l'organisation, tout en sachant que cette opération risque de déclencher une contestation sociale qu'il sera difficile de maîtriser ? Cette situation démontre encore une fois que, contrairement aux affirmations du négociateur en chef algérien, la question de l'adhésion de l'Algérie demeure pour le moment aléatoire puisque suspendue aux évolutions des négociations, notamment dans ce volet si sensible de la problématique énergétique, qui mobilise, par ailleurs, d'autres pays producteurs comme la Russie et l'Arabie Saoudite. Hamid Saïdani