D'après l'estimation d'un expert de la Cnuced, M. Ralf Peters, l'Algérie est trop dépendante des importations alimentaires. De ce fait, elle risque de payer encore plus cher sa facture alimentaire dans l'hypothèse d'une plus grande libéralisation du commerce international des produits agricoles, constamment demandée par les pays membres de l'OMC. Selon lui, le secteur agricole algérien "n'est pas très compétitif et ne peut pas bénéficier des avantages comparatifs du fait que 50 % des produits alimentaires sont importés", a-t-il expliqué. Dans le cas d'une plus grande libéralisation que déciderait l'OMC, "les prix augmenteront, mais cela peut être à l'avantage, non pas des importateurs, mais des producteurs-exportateurs", a-t-il ajouté. Pour cet expert, il y a deux effets attendus pour les agriculteurs algériens, au fur et à mesure que le soutien des Etats aux produits agricoles s'amenuise, d'une part, une hausse vertigineuse se fera voir sur des produits frais et, d'autre part, cela va inciter les producteurs à saisir des opportunités réelles d'exportations. Un débat contradictoire entre l'expert de la Cnuced et des experts algériens, notamment du ministère de l'Agriculture, sur la question de l'accès des produits agricoles aux marchés, à permis d'entrer dans le "vif du sujet" de la rencontre internationale de trois jours sur la diplomatie commerciale et l'accès à l'Organisation mondiale du commerce, qui s'est ouverte dans la matinée de mardi, à Alger. Des intervenants ont réfuté la thèse développée par M. Peters, affirmant que "l'Algérie enregistre un déficit dans deux produits de base seulement, les céréales et le lait, qui représentent 75% de la facture alimentaire". Ces experts ont mis en exergue les exportations agricoles algériennes (extra-primeurs et dattes) qui ont atteint, selon eux, 70 millions de dollars avec une progression constante et sensible des volumes exportés. Par ailleurs en Algérie, le soutien interne aux produits agricoles est de 8% seulement, loin des 20% admis à l'OMC, sachant que dans certains pays ce soutien public peut atteindre les 100 sinon les 200 %. "L'Algérie respecte les dispositions de l'OMC en matière d'exportation de produits agricoles", c'est ce qu'ont souligné les experts algériens reconnaissant, en même temps, "les immenses possibilités offertes par l'accès de l'Algérie à l'OMC pour les producteurs-exportateurs de fruits et légumes". Il ne faut pas appréhender la future adhésion de l'Algérie à l'OMC en termes de "hausse vertigineuse des prix des produits agricoles, mais plutôt en terme d'ouverture extraordinaire, et sans restrictions, sur le marché mondial". Les travaux de ce séminaire, qui ont repris dans la journée d'hier, avec à l'ordre du jour deux points importants dans le processus d'admission à l'OMC, en l'occurrence "le rôle du commerce des services dans le développement" et "les droits de la propriété intellectuelle et les négociations pour l'accession à l'OMC". Le statut de pays pétrolier "ne facilite pas" à l'Algérie son accession rapide à l'OMC (Cnuced), et cela pour la simple raison qu'on va encore lui exiger le préalable d'ouvrir davantage ses services énergétiques à la concurrence, c'est ce qu'a estimé mardi le chef de branche diplomatie et négociations commerciales à la Cnuced, Mina Mashayekhi. A l'instar d'autres pays pétroliers qui ont déjà accédé à l'OMC, l'Algérie "recevra certainement des requêtes dans le sens d'une ouverture conséquente dans le domaine des services relatifs au secteur de l'énergie" avant d'être admise au sein de l'organisation, a-t-elle expliqué lors du séminaire international sur la diplomatie commerciale et l'accès à l'OMC, qui se tient à Alger. En outre, la question du double prix de l'énergie pratiqué en Algérie, notamment celui du gaz cédé aux industries locales, "demeure, comme ce fut le cas pour la Russie et l'Arabie Saoudite, un problème qu'il y a eu lieu d'aborder pour ne pas compromettre les intérêts des opérateurs économiques locaux", a-t-elle ajouté. L'Algérie qui s'emploie depuis quelques années à réhabiliter son tissu industriel, a expliqué cette responsable, ne va pas compromettre les intérêts de ses entreprises, notamment les PME, en imposant un prix unique de l'énergie juste pour hâter son entrée à l'OMC. Cependant, l'Algérie qui cumule "la plus longue négociation dans l'histoire des accessions doit reprendre ces négociations afin d'aplanir les difficultés restantes et surmonter les facteurs de blocage dans le domaine des services, de l'agriculture et de la protection intellectuelle", a-t-elle précisé. L'Algérie, dont la première demande d'adhésion au GATT (ancêtre de l'OMC) remonte à 1987, en est à son 9e round des négociations pour son accession à l'OMC. Le dixième round est prévu dans les prochaines semaines, selon le négociateur algérien, Chérif Zaaf, qui s'est dit "optimiste" quant à une accession de l'Algérie à ce temple des négociations commerciales multilatérales durant l'année en cours.