Le ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, a affirmé, lors de son passage samedi soir au Forum de l'ENTV, qu'il a bel et bien pris connaissance de l'affaire SA Mohamadia-USM Annaba, révélée par Liberté Foot, mais il écarte la thèse d'un acte de corruption. “J'ai effectivement lu ces révélations, mais je ne pense pas qu'il faille parler de corruption. Je pense plutôt que c'est juste un acte de solidarité d'un club qui veut apporter de l'aide à un autre”, a-t-il souligné presque ironiquement dans une tentative évidente de disculper les incriminés. Guidoum répondait, en fait, à une question du journaliste de Liberté, qui, justement, l'interpellait sur le silence des dirigeants du football, en particulier, et du sport, en général, sur des révélations, pour le moins qu'on puisse dire, sont susceptibles de servir de matière pour une enquête contre le fléau du marchandage des matches. Petit rappel des faits : dans son édition du 27 janvier dernier, Liberté Foot a révélé que la délégation du SAM (au nombre de 28 personnes), qui devait jouer, le 25 janvier dernier, un match comptant pour le championnat de seconde division, a bénéficié de billets d'avion PTA payés dans une agence à Annaba et inscrits dans le registre d'Air Algérie sous la dénomination “Groupe sportif USMA”. Or, après un rapide coup d'œil sur ce dossier dans le registre d'Air Algérie, on retrouve les noms de l'effectif du SAM qui s'est déplacé à El Khroub. Le plan de vol était le suivant : départ le 24 janvier à partir d'Oran à 17h50, et arrivée à 19h05 à Annaba. Le 24 au soir, la délégation du SAM se déplace en car à Constantine pour y passer la nuit avant de rejoindre El Khroub le jour du match, soit le 25 janvier. Le retour se fait le 26 janvier dans le vol Constantine-Alger de 7h, pour reprendre ensuite à 19h30 le vol Alger-Oran. Liberté dispose, du reste, des documents concernant ce plan de vol et de tous les détails nécessaires, entre autres, les noms des 28 personnes de la délégation du SAM. “Ce don des Annabis n'est pas loin aussi d'avoir un rapport direct avec le dernier match qui a opposé le SAM à l'USMAn, une semaine auparavant, et qui a vu les visiteurs l'emporter sur le score de 2 à 0”, pouvait-on lire également dans Liberté Foot. Pour quelle raison les dirigeants de l'USMAn ont choisi précisément le club du SAM pour faire preuve de “solidarité”, pour reprendre l'expression de Guidoum, et pourquoi à cet instant-là précis, soit au moment des deux matches SAM-USMAn et SAM-ASK ? Ne pas tenter de répondre à ces questions à travers une enquête que les responsables de la FAF et du MJS ont toute latitude de diligenter serait faire la politique de l'autruche devant des agissements suspects qui s'opèrent malheureusement à ciel ouvert dans les championnats de football en Algérie. Pourtant, Guidoum s'était offusqué en automne dernier devant les députés de l'APN, du fait que le marchandage des matches de football soit courant dans les championnats de football en Algérie. Il avait même révélé qu'un président de club lui avait avoué avoir acheté des rencontres pour sauver son club de la relégation. Le ministre de la Jeunesse et des Sports, qui a reconnu, par ailleurs, “avoir délibérément changé de prise de position dans certaines affaires”, semble carrément faire marche arrière en ce qui concerne la lutte contre le marchandage des matches. Ce silence coupable des autorités du sport ouvre davantage la voie aux velléités de corruption sous couvert de la “solidarité” interclubs. Désormais, on le sait, pour gagner un match, il suffit de payer la note du voyage. S. B.