Il faut sans doute recourir au tiroir à souvenirs pour trouver une couverture d'une telle dimension dans les médias américains. Il est vrai que le sujet, situation en Irak oblige, intéresse le pays de l'Oncle Sam, mais il ne peut expliquer à lui seul ce qui semble être une onde de choc dans les rédactions américaines. Les attentats qui ont secoué, mercredi, la capitale algérienne ont fait la une de l'essentiel des journaux américains de jeudi. Sous le titre “La branche d'Al Qaïda revendique les explosions”, au-dessous d'une grande photo de deux personnes maculées de sang adossées à un muret, The Washington Post relève que les attentats interviennent une journée après ceux de Casablanca. Ce qui accrédite, à ses yeux, la thèse d'un retour de flamme chez les groupes terroristes du Maghreb passés sous la bannière de la nébuleuse d'Oussama Ben Laden. Selon les responsables du contre-terrorisme et les analystes cités par le journal, les plans sont les derniers indices d'une escalade des opérations des groupes passés sous la bannière d'Al Qaïda et qui entendent exporter, désormais, leur menaces aussi bien en Europe qu'en Irak. “On est en train d'assister à l'ouverture d'un nouveau front”, soutient Bruce Ridel, ancien analyste en chef du Moyen-Orient pour la CIA et le Conseil national de sécurité. Les attentats qui ont visé notamment les commissariats de Bab Ezzouar auraient voulu cibler les bureaux d'Interpol, selon l'interprétation du site Institute, chargé de la recherche sur le terrorisme et basé à Washington. Le quotidien tente même de savoir s'il existe une relation entre les attentats de Casablanca de la veille et ceux d'Alger. Si, pour le ministre marocain de l'Intérieur, Chafik Benmoussa, et d'autres responsables du royaume alaouite, les évènements sont l'œuvre d'une organisation qui n'a pas de connexions internationales, tel n'est pas l'avis de Mohamed Darif, un analyste du terrorisme à l'université Hassan II de Mohammadia, cité par le journal. Selon lui c'est un “mythe” de croire à cette assertion. Il évoque, notamment, le modus opérandi et les moyens utilisés. Un autre analyste, cité par le journal, est un ancien responsable du gouvernement allemand spécialisé dans le contre-terrorisme et qui travaille, aujourd'hui, pour le compte de German Institute for International and Security Affairs. “Avec les attaques de cette semaine, nous savons qu'une nouvelle organisation est capable de perpétrer des attaques d'un niveau dont elle n'était pas capable par le passé”, affirme-t-il au journal qui a consacré presque une page entière à l'événement illustrée de nombreuses photos. The Washington Post n'omet pas de rappeler, enfin, qu'en septembre dernier lorsque Aymen Azawahiri avait annoncé le ralliement du GSPC à son organisation, Ali Tounsi, le patron de la police algérienne, avait affirmé que “leur menace ne nous effraie pas”. “S'ils avaient les moyens de faire quelque chose, ils l'auraient fait”, avait-il déclaré. De son côté, The New York Times estime qu'en dépit de l'affaiblissement du nombre des terroristes, certains ayant accepté l'offre de réconciliation, il demeure que beaucoup refusent toujours cette offre et se fixent comme objectif d'instaurer une théocratie. Avec une grande photo en une — la première ouverture, comme on dit dans le jargon journalistique —, le quotidien new-yorkais croit savoir, citant des spécialistes, que le GSPC, appelé désormais Al Qaïda du Maghreb islamique, s'est “revivifié” grâce à de nouvelles recrues. “Leur objectif est de s'élargir”, affirme William H. Raven, commandant spécial des forces américaines en Europe, rapporte le quotidien qui, comme son confrère de Washington, a consacré un large espace à l'évènement agrémenté de nombreuses illustrations. Quant à USA Today, bien qu'il n'ait pas annoncé les attentats en une, il a rapporté l'information sans la commenter. Comme les journaux, de nombreuses télévisions n'ont pas cessé de diffuser en boucle l'information toute la journée de mercredi et jeudi. CNN en a fait l'ouverture de tous ses journaux télévisés. K. K.