Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal se sont lancés, dès hier, dans la bataille du second tour de la présidentielle française, où le candidat de droite fait figure de grand favori, mais dont l'issue dépendra largement des électeurs centristes courtisés par les deux camps. Les deux vainqueurs du 22 avril n'ont pas attendu les consignes pour le second tour, ils se sont immédiatement lancés à l'assaut des électeurs. Quant aux voix de Bayrou, selon les enquêtes, elles se reporteraient à environ 45% pour Mme Royal, et de 39 à 54% si elles choisissent l'ex-ministre de l'Intérieur. Sarkozy, 52 ans, assure vouloir rassembler le peuple français autour d'un nouveau rêve français, esquissant un recentrage en affirmant vouloir protéger les Français les plus faibles contre les peurs qui les habitent. Mme Royal, 53 ans, promet de porter le combat du changement pour que la France se relève. Dès hier, sa stratégie consiste à fédérer un front contre Sarkozy. La gauche s'est immédiatement ralliée à “tout sauf Sarkozy”. Les petits candidats de cette mouvance représentent environ 11% des voix, à peu près ce que Sarkozy va obtenir avec le report des lepénistes. Le match Sarkozy - Royal sera d'autant plus difficile, pour reprendre le commentaire le plus partagé par les médias français : le vote du premier tour a marqué la réconciliation des Français avec la politique après le séisme d'avril 2002, ramenant le débat entre les deux grandes sensibilités, la droite et la gauche, qui colorent le paysage français depuis 1965. Le combat s'engage. “Un combat Royal”, note Libération, une “Bataille difficile pour Sarkozy”, ajoute Le Figaro et tous les pronostics “sont ouverts”, conclut le journal populaire le Parisien. La campagne entre les deux finalistes culminera avec un débat télévisé le 2 mai. Cela étant, François Bayrou qui a triplé son score de 2002, en obtenant 18,55%, soit 6,75 millions d'électeurs, détient en partie les clés du second tour de l'élection présidentielle française. L'UDF, arbitre du duel droite-gauche que le parti centriste n'a eu de cesse de dénoncer durant la campagne, laisse planer le suspense sur ses intentions jusqu'à la conférence de presse de François Bayrou demain. “François Bayrou s'exprimera cette semaine, mais une chose est sûre : nous ne sommes pas à vendre !” prévient la directrice de campagne du président de l'UDF, Marielle de Sarnez, dans un entretien au Parisien-Aujourd'hui en France. Esquissées dès dimanche soir, les manœuvres de rapprochement de l'UMP et du PS en direction de l'UDF se précisent prudemment. Tête chercheuse de l'UMP, le ministre de l'Emploi et de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, a jugé “indispensable” la présence “massive” de ministres centristes dans le futur gouvernement si Nicolas Sarkozy est élu le 6 mai. Le ministre délégué aux Collectivités territoriales, Brice Hortefeux, a déclaré sur France Inter que la porte était “naturellement ouverte” à l'UDF et que les valeurs portées par François Bayrou étaient “naturellement mieux défendues” par Nicolas Sarkozy que par Ségolène Royal. François Fillon, conseiller politique de Nicolas Sarkozy, a annoncé sur RTL la constitution d'un “pôle centriste” et d'un “pôle de gauche” pour flanquer le “pôle UMP”, qui a vocation à être le noyau dur d'une éventuelle majorité présidentielle. Au Parti socialiste, on insiste sur la nécessité et la possibilité de “rassembler large” face à une arithmétique électorale théoriquement défavorable à Ségolène Royal. “Il y a aussi dans l'électorat de François Bayrou des hommes et des femmes qui ont voulu le changement, qui croyaient même qu'en votant Bayrou, celui-ci allait battre Sarkozy”, a déclaré François Hollande sur France 2. D. Bouatta