Les producteurs privés arrêteront aujourd'hui leur décision de fermer ou non leurs unités. Grief : la subvention promise par l'état ne leur est pas encore parvenue. La commercialisation du lait pasteurisé en sachet risque de connaître encore une fois des perturbations dans les jours à venir. À compter d'aujourd'hui, ce produit va encore se raréfier chez les commerçants. Les quantités, qui seront disponibles sur le marché, seront certainement réduites puisque seules les unités du groupe public Giplait continueront à le produire. Les producteurs privés, en revanche, ont décidé d'arrêter la production. Ils estiment que les promesses faites par le gouvernement quant au paiement de la différence entre le prix de revient d'un litre produit estimé à plus de 48 DA et celui administré à 25 DA n'ont pas été tenues. Les engagements des pouvoirs publics pour leur indemnisation n'ont, selon eux, pas été honorés. Outre leur approvisionnement en poudre de lait dès le mois de juin prochain, l'Exécutif leur a promis aussi de leur vendre le kilogramme de cette matière première qu'il importera à environ 180 DA au lieu de 350 DA. À ce jour, déplorera M. Ziani, président de la Fédération agroalimentaire affiliée à la confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa) rien n'y fit. Les producteurs adhérents de la Cipa ont été reçus jeudi au ministère du commerce. Le secrétaire général du département de M. Djaâboub a tenu à les rassurer quant à l'engagement des pouvoirs publics à honorer leurs promesses relatives à la compensation financière en attendant de les approvisionner en matière première à des prix conventionnés par le biais de l'entreprise Milk Trade à compter du mois prochain. “Hier, les producteurs privés de notre organisation ont été reçus au ministère du commerce. On nous a proposé de désigner une convention pour l'approvisionnement en poudre de lait dès le mois de juin. Or, le problème épineux, crucial et immédiat qui nous préoccupe, c'est cette indemnisation qui tarde à venir”, soulignera M. Ziani. Car, expliquera le président de la fédération agroalimentaire, “le lait, nous le produisons tous les jours et nous perdons de l'argent quotidiennement”. La problématique est devenue plus complexe d'autant plus que le prix de la tonne de poudre a atteint, selon lui, 5 035 dollars US sur le marché international. “Nous lançons un appel aux autorités concernées pour venir au secours des producteurs en leur attribuant cette subvention (indemnisation)”, rappellera M. Ziani. Pour mesurer l'ampleur des pertes subies à cause de la hausse des coûts de la poudre à l'échelle internationale, il avouera qu'une unité qui produit 200 000 litres/jour de lait pasteurisé perd actuellement la bagatelle de 3 millions de DA/jour ! C'est dire que la compensation reste inéluctablement une urgence salvatrice pour ces unités qui ont pris la décision d'arrêter la production jusqu'à la satisfaction de leur principale revendication. “L'ensemble des usines privées sont au bord de l'asphyxie. Arrêtez de nous promettre cette indemnisation (subvention) qui n'arrive pas à prendre forme”, regrettera M. Ziani. Pour sa part, le SG du ministère du Commerce a précisé que cette indemnisation nécessite la mise en place de mécanismes adéquats en coordination avec les parties concernées, puisqu'il s'agit de puiser dans les fonds publics dans un cadre exceptionnel. Il a, de ce fait, appelé les producteurs “à faire preuve de sens de responsabilité en vue de garantir la stabilité du marché en assurant l'approvisionnement régulier des citoyens en lait”. Ce vœu ne sera certainement pas exaucé car les producteurs de la Cipa qui tiendront une assemblée générale, aujourd'hui, et qui prendront certes acte de la convention suggérée par la tutelle mais ne reprendront pas la production. “Nous maintiendrons ce débrayage jusqu'à satisfaction de notre revendication”, soutiendra M. Ziani. La production de lait pasteurisé qui représente 90% de l'activité des laiteries est, faut-il le préciser, tributaire des importations de la poudre sachant que le lait de vache collecté n'a qu'un taux d'intégration de 30%. Une telle situation, explique-t-on, expose également les filiales du groupe Giplait à des déficits significatifs sans palliatifs possibles ou parades managériales. Ce qui, par conséquent, poussera le groupe Giplait à réduire lui aussi sa production et engendrera une régression des quantités du lait pasteurisé sur le marché. Les conséquences, qui découleront de cette situation, ont trait à un arrêt de la production, la faillite du groupe, la perte d'emplois et l'impact sur la consommation du citoyen. Reste à savoir si la rencontre à laquelle ont convenu les deux parties, en début de la semaine prochaine, en vue de finaliser l'opération d'indemnisation et régler les détails concernant l'approvisionnement des producteurs en matière première par l'entreprise Milk Trade, mettra un terme définitif à cette crise. Badreddine KHRIS