Déclarant d'un côté leur disposition à négocier de bonne foi pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental, les Marocains bloquent les négociations d'entrée en indiquant que leur plan d'autonomie doit constituer la base des discussions, alors que la résolution onusienne écarte toute condition préalable. Dans son allocution d'ouverture des négociations maroco-sahraouies, sous les auspices de l'ONU, Chakib Benmoussa, le ministre marocain de l'Intérieur, a clairement laissé entendre que Rabat ne compte pas modifier sa position sur la question en affirmant que “l'initiative marocaine d'autonomie constitue la base des négociations pour un règlement définitif de la question du Sahara, dont elle pose les fondements”. En effet, alors que la dernière résolution des Nations unies 1754 réaffirme le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination et appelle à des négociations directes sans conditions préalables afin de parvenir à une solution juste, durable et mutuellement acceptable, le Makhzen s'est présenté à Manhasset, lieu des négociations pour imposer son plan d'autonomie. Il suffit de se référer à la déclaration de Chakib Benmoussa : “Les Sahraouis, dont on a été séparés finiront par retrouver la mère patrie”, pour comprendre que le royaume alaouite ne veut rien d'autre que l'annexion pure et simple du Sahara occidental, avec peut-être en prime des excuses du Front Polisario. Cette entrée en matière n'a évidemment pas été du goût de la délégation sahraouie. Réagissant au discours prôné par les Marocains, Brahim Ghali, membre du secrétariat national du Front Polisario et membre de la délégation sahraouie aux négociations, déclarera : “Le Front Polisario a constaté le manque de volonté et de sérieux de la part de la délégation marocaine aux négociations ouvertes lundi à Manhasset.” Poursuivant son analyse, il indiquera que “l'absence de volonté politique de la partie marocaine pour aller à des négociations réelles pour une solution juste, durable et mutuellement acceptable qui prenne en compte le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination”. Argumentant sa vision des choses, l'ancien ministre de la Défense de la République arabe sahraouie démocratique soulignera que “le droit à l'autodétermination, tel que confirmé par l'ONU et ses nombreuses résolutions pertinentes, est un passage obligé et obligatoire pour arriver à une solution politique du conflit du Sahara occidental”. Brahim Ghali estime que l'intransigeance “dont fait preuve le royaume du Maroc en proposant comme seule option l'autonomie, une proposition qui viole non seulement la légalité internationale, en voulant priver le peuple sahraoui de son droit à décider de son devenir, mais part du postulat que le Sahara occidental est marocain”. Partant de là, il rappellera que le principe d'autodétermination est “l'unique voie pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental car il correspond aux dispositions contenues dans la Charte des Nations unies, l'ensemble des textes fondateurs de l'ONU et des nombreuses résolutions de son Assemblée générale et de son Conseil de sécurité”. Il ne laissera planer aucun doute quant à la détermination du Front Polisario à défendre son droit et ajoute : “la délégation sahraouie défendra le droit à l'autodétermination. Nous ne ferons aucune concession sur ce principe et cette exigence.” À voir ces prises de position, aux antipodes l'une de l'autre, et bien qu'aucune partie ne ferme la voie du dialogue, il faut s'attendre à d'âpres négociations entre les deux parties, voire même un statu quo. Il appartient alors à l'ONU de faire respecter la légalité internationale en faisant en sorte que le principe de l'autodétermination des peuples soit pris en considération dans ce dernier dossier de décolonisation du continent africain. Hier, en présence de l'envoyé personnel du secrétaire général pour le Sahara occidental, M. Peter Van Walsum, et du représentant spécial du secrétaire général, coordinateur de la Minurso, M. Julian Harston, les deux délégations sahraouie et marocaine ont poursuivi l'examen des propositions marocaine et sahraouie. K. ABDELKAMEL