Un coût économique que des études des programmes des Nations unies ont relevé. Dans les pays sud de la Méditerranée, il varie entre 2,6% du PIB à plus de 4% du produit intérieur brut. En Algérie, ce coût serait de 3,6% du PIB de l'année 2004. Ce qui correspond à 97 milliards de dinars, soit environ 1,5 milliard de dollars. “La Méditerranée court un grand danger”, l'avertissement émane des animateurs de la 11e Conférence euroméditerranéenne sur la transition économique organisée les 18 et 19 juin à Bruxelles sur le thème “Les économies méditerranéennes face au défi environnemental immédiat”. La dégradation de l'environnement s'est accélérée en engendrant des coûts très élevés. Du coup, le développement de la région risque d'être compromis. Le directeur du centre régional du Plan-Bleu, Henri-Luc Thibault, dans une présentation du rapport prospectiviste “Méditerranée, les perspectives du Plan-Bleu sur l'environnement et le développement à l'horizon 2025”, évoque des perspectives assez sombres. La population des 21 pays de la mare Nostrum devrait atteindre en 2025 les 500 millions d'habitants, soit 100 millions d'habitants de plus qu'en 2000, en majorité dans les pays du sud et de l'est de la Méditerranée, en dépit du rapprochement de l'indice de fécondité entre le Nord et le Sud. Les écarts de revenus par habitant resteront importants, de 1 à 5 entre les deux rives. Le taux de chômage des jeunes demeure élevé, avec un besoin de création de 34 millions d'emplois dans les régions est et sud de cette mer. En même temps, la Méditerranée connaîtra un véritable bouleversement climatique, la température devant augmenter de 1 à 6 degrés et le niveau de la mer va s'élever, dans certains endroits et enfin le phénomène de la sécheresse risque de s'accentuer. L'hypothèse évoquée par M. Henri-Luc Thibault fait peur et devrait inciter les responsables des pays du Sud et du Nord à l'action. Pourtant, “la région n'est pas sur la voie du développement durable”, regrette Henri-Luc Thibault. La prise de conscience est réelle. Des législations et des services se mettent en place. Mais les moyens ne suivent pas. Le temps écologique est rarement le temps politique. Et parfois, certains, à tort ou à raison, estiment qu'il est difficile de concilier croissance économique et protection de l'environnement. Et c'est là où réside le paradoxe. Les préoccupations des pays du Sud, aujourd'hui, convergent toutes vers les objectifs de réalisation d'une croissance forte et durable, pour justement résorber le chômage et élever le niveau de vie de leur population. Cependant, à juste titre, les défenseurs de l'environnement expliquent que la dégradation de l'environnement a un coût, parfois très élevé. Un coût économique que des études des programmes des Nations unies ont relevé. Dans les pays sud de la Méditerranée, il varie entre 2,6% du PIB à plus de 4% du produit intérieur brut. En Algérie, ce coût serait de 3,6% du PIB de l'année 2004. Ce qui correspond à 97 milliards de dinars, soit environ 1,5 milliard de dollars. Depuis, notre environnement, s'est certainement davantage dégradé, en dépit des efforts de sensibilisation entrepris par le ministère de l'Environnement. “Concilier l'économie et l'environnement est possible et c'est urgent”, souligne Henri-Luc Thibault. L'enjeu réside dans trois secteurs : l'eau, l'énergie et le transport. Pour beaucoup, les tendances énergétiques actuelles ne sont pas viables. II faut chercher d'autres sources énergétiques, renouvelables, moins polluantes et plus propres. L'Afrique est identifiée par de nombreuses recherches comme le continent le plus vulnérable aux impacts des changements climatiques projetés, car la pauvreté généralisée à l'intérieur de ses frontières limite ses capacités d'adaptation. L'Afrique du Nord n'en est pas moins vulnérable malgré les capacités d'intervention économique plus développées par rapport à la plupart des autres régions de l'Afrique. Pour autant, elle a besoin de l'accompagnement européen. Et en termes d'instrument de soutien, l'Union européenne pourrait faire mieux. Les douze années de partenariat témoignent plutôt d'un agrandissement des écarts de développement. Les investissements directs étrangers attendus à la faveur de la mise en œuvre des accords d'association ne sont pas au rendez-vous, “ce qui reflète un manque de dynamisme du processus d'intégration économique entre les deux zones”, conclut le Turque, le Dr Oguz Oyan. Les pays du Sud devraient, par ailleurs, s'attendre à plus de facilité sur l'entrée des marchés européens pour les produits agricoles. La réponse européenne semble se dessiner. L'environnement est au cœur de l'agenda économique de l'union. Un plan d'action a été adopté. Des fonds ont été dégagés pour financer des projets environnementaux. Pour autant, c'est une véritable politique commune et concertée de l'environnement en Méditerranée qu'il faudrait initier en mettant en place un plan d'accompagnement et de mise à niveau pour les pays du Sud. C'est que les normes environnementales instaurées par l'UE sont vécues comme des obstacles à l'intégration euroméditerranéenne. Mais au-delà, l'inaction “risque de compromettre le développement de la région”, estime M. Henri-Luc Thibault, avertissant sur “le grand danger” qui guette la Méditerranée. M. R.