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“Ce que j'ai vu à Bagdad”
Publié dans Liberté le 09 - 04 - 2003

Mme Bourekba, présidente de l'association SOS Enfants d'Irak revient de la capitale irakienne où elle a acheminé des dons. Elle livre pour Liberté ses premières impressions.
“C'est en 1996 que s'est produit en moi le déclic, lors d'une visite à l'hôpital de Bagdad, il y avait une délégation conduite par le sénateur britannique, George Galaway... Il y avait sur un même lit d'hôpital deux jeunes enfants mourants, l'infirmière ne disposait que d'un seul flacon de sérum pour les deux. A tour de rôle, elle leur plaçait ce flacon. En s'adressant à moi parce que j'étais Algérienne, elle m'expliqua qu'elle était incapable de décider lequel des deux enfants devaient bénéficier de ce dernier flacon et donc, de vivre. Elle faisait tout ce qui lui était possible malgré le dénuement, en s'en remettant à Dieu...! A cet instant, je me suis dit, il faut à tout prix aider et tenter de sauver ces enfants. Il ne m'est pas permis de rester sans rien faire...”
C'est la présidente de l'association SOS Enfants d'Irak, Mme Bourekba, qui se remémore pour nous l'un de ses premiers voyages dans “l'Irak de l'embargo”. Ses déplacements fréquents sur place et ses visites régulières au niveau des urgences pédiatriques de Bagdad et Bassorah pour y acheminer des dons ont marqué à jamais cette femme qui a un trop-plein d'images d'horreur et qui, pourtant, se trouvait encore dans la capitale irakienne les premiers jours du déclenchement de l'agression américaine. Les fracas des bombes et des missiles, les lueurs et les bruits assourdissants déchirant les nuits, la peur, l'angoisse des Bagdadis, elle les a vécus avec eux dans les abris. Depuis son retour de son dernier voyage, son premier souci est de témoigner, une autre façon pour elle d'aider les Irakiens.
Dans son petit local à Oran où elle nous reçoit et d'où elle prépare un autre voyage en Irak pour y acheminer une fois de plus des dons, notre interlocutrice tient d'abord à nous parler de la chaleur des Irakiens et le sentiment particulier qu'ils ont à l'égard des Algériens : “Je n'ai pas vécu la guerre d'indépendance, mais l'histoire retient qu'aujourd'hui nous avons une dette envers les Irakiens qui nous ont aidés ... Savez-vous qu'un quartier de Bagdad est appelé Djamila-Bouhired, c'est dire...”
Puis, elle poursuit pour nous : “Lors des premiers bombardements, c'était terrible et terrifiant. Je me trouvais en compagnie d'une famille, leurs deux jeunes filles ne voulaient pas entrer dans l'abri. Elles criaient que cela ne servirait à rien et qu'elles allaient finir comme les familles d'El-Amiria...” El-Amria tout le monde se souvient, en 1991, de ce carnage et de la mort de plus de 400 personnes, essentiellement des femmes et des enfants. Leur abri avait été détruit par une bombe. Une erreur avait déjà dit, à l'époque, le commandement des forces alliées.
Durant les bombardements, Mme Bourekba raconte qu'il est impossible de pouvoir dormir, ajoutant ainsi au stress et à la fatigue. Les parents tentent tant bien que mal d'occuper les enfants, les plus jeunes ne comprenant pas trop ce qui se passe, on leur raconte des histoires de pétards sans trop de conviction, les décombres de leurs quartiers témoignant pourtant d'une situation anormale.
D'autres plus grands sont pris parfois de véritables crises de nerfs et de panique : “Vous ne pouvez imaginer le nombre d'enfants hypertendus et diabétiques qui souffrent parce que soumis constamment à des chocs...”, explique avec émotion notre interlocutrice.
Ce qu'a ressenti cette Algérienne auprès des Irakiens, c'est ce sentiment profond chez eux de subir une effroyable injustice et d'être les cibles d'une agression que rien ne justifie alors qu'ils subissent déjà depuis 10 ans les affres d'un embargo impitoyable et dévastateur chez les populations les plus fragiles, c'est-à-dire les femmes et les enfants. Interrogé sur les relations entre Irakiens, notre “témoin” nous dit : “Je n'ai jamais ressenti ce clivage entre chrétiens, musulmans, sunnites ou chiites, non... Ils sont avant tout des Irakiens... Ce qui se dit au travers de certains médias est vraiment de la propagande”.
D'ailleurs, nous explique-t-elle par la suite, c'est l'ensemble de la population qui a été préparé à la guerre et ce, dès le mois de novembre 2002 : “Je me trouvais là-bas à ce moment et il y avait des groupes de scouts et autres représentants qui sillonnaient tous les quartiers de Bagdad informant la population et leur recommandant certaines mesures. Ainsi, les citoyens étaient incités à se regrouper par 4 ou 5 familles pour creuser des puits, surtout ceux qui disposaient de cours ou de jardins, les autres qui vivent dans des bâtiments devaient également s'organiser pour installer des châteaux d'eau et ce, par crainte des coupures d'eau le moment venu. En début d'année, des denrées alimentaires ont été distribuées aux familles, des stocks, m'a-t-on dit, pouvant tenir plusieurs mois. Les bougies, les lampes à pétrole ont été aussi achetés massivement par les familles”. La présidente de l'association se rappelle encore de ces volontaires et des militants pacifistes qui se trouvent là-bas pour tenter de protéger des édifices publics et en être les boucliers humains. Elle tient, en parlant d'eux, à leur rendre hommage qu'ils soient Américains, Anglais, Australiens, Français ou Algériens... Pour les Irakiens, nous dit-elle, ces derniers et ainsi que les millions de gens qui, de par le monde, manifestent contre la guerre sont d'un apport moral très fort. Même aujourd'hui, cela compte plus que jamais.
Pour son dernier déplacement à Bagdad en mars, la présidente de l'association, qui était accompagnée de deux bénévoles, a acheminé 75 colis de médicaments et produits d'urgence destinés aux hôpitaux pédiatriques. C'est à partir de la Syrie qu'elle s'est dirigée vers les frontières irakiennes. Dans un long périple risqué et exténuant de 12 heures de route, ils arrivent au poste-frontière de Tanef. Mais celui-ci sera fermé, il faudra reprendre la route en direction d'un autre poste, celui de Quam. C'est 17 heures de pérégrination qu'il a fallu subir à nouveau. Mais tout cela ne semble pas déranger cette femme qui s'apprête à repartir dans les semaines à venir une fois qu'elle aura pu, à nouveau, récolter des dons. Il faut dire qu'elle est tout simplement hantée par les visions apocalyptiques, les horreurs de la guerre, la misère, la mort partout. A ce moment de son récit, Mme Bourekba s'arrête comme pour reprendre son souffle et nous montre des photos d'enfants irakiens handicapés, difformes. Elle nous montre aussi des enfants souriants lors d'une petite fête donnée dans un hôpital : “Il y a 10 ans, pendant la guerre de 1991, des bombes avec de l'uranium appauvri ont été utilisées contre les populations. Aujourd'hui, les effets sont horribles. Les cas de malformations dues au cancer se sont multipliés touchant surtout les enfants...” Et de poursuivre : “Il faut savoir, aujourd'hui, que des mamans mettent au monde des monstres, des bébés totalement difformes, à un point telle que les médecins ne montrent pas le nouveau-né à sa mère. Ils préfèrent lui dire que son enfant est mort, c'est quelque chose d'insupportable pour une mère qui a porté, pendant neuf mois, son enfant et de découvrir à la naissance que son enfant n'a parfois presque rien d'humain ! Sans compter toutes les maladies liées à cet uranium, les cancers de la peau, la leucémie... Je sais que pour la plupart de ses enfants, il n'y a aucun espoir mais nous ne devons pas les abandonner ; nous devons tout faire pour tenter de leur venir en aide, à eux et à leurs parents, en souhaitant la clémence de Dieu pour ces innocents...”
D'une certaine façon, cette femme prend sur elle un fardeau immense, celui de l'amour de la compassion pour des enfants innocents.
La détresse et la souffrance des familles et de ces enfants n'ont pu que s'aggraver depuis le déferlement des bombes qui s'abat sur l'Irak depuis plus de 16 jours. A l'occasion de la Journée mondiale de la santé, l'OMS vient de s'en faire l'écho. Un rappel qui ne pèse pas lourd face aux ambitions hégémoniques des EU.
F. B.


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