La plupart des Etats membres de l'Union africaine (UA) ne veulent pas former un gouvernement continental dès maintenant, mais préfèrent renforcer l'unité africaine par étapes. Exit donc la passion et le rêve du leader libyen. D'ailleurs, le sommet d'Accra devait s'ouvrir avec retard, ses organisateurs espérant voir arriver plus de dirigeants africains. Beaucoup ont fait défection, comme le président du Soudan qui, lui, a motivé son absence par le deuil décrété à Khartoum après le décès d'un de ses conseillers ! En réalité, Omar El Bachir n'est pas satisfait de l'acceptation par l'UA du plan onusien pour le Darfour. D'une manière générale, les dirigeants africains ont jugé la question d'une Afrique fédérale bien éloignée des urgences économiques, financières, environnementales et humanitaires, telles que les conflits au Darfour ou en Somalie. Comment, en effet, créer les Etats unis d'Afrique dotés d'un gouvernement fédéral, alors que les tensions tribales et nationalistes sont loin d'être dissolues et que la problématique de la gouvernance demeure entière dans l'écrasante majorité de ses 53 membres ? La lecture des statistiques sur le contient révèlent une Afrique en naufrage. Pourtant, le continent est si riche en ressources naturelles qu'il fait l'objet de luttes intenses, souvent violentes, de la part de puissances étrangères : la Grande-Bretagne, la France, la Chine, la Russie, l'Allemagne… Les droits de l'homme et la démocratie demeurent encore une caricature, même si des efforts ont été enregistrés ici et là. À ce propos, une première dans l'Union africaine, l'examen de la bonne gouvernance de ses membres grâce au mécanisme du Nepad. Le premier pays à le subir est l'Algérie. Le continent est, par ailleurs, sous le microscope des ONG internationales, qui font du forcing pour contraindre l'UA à faire davantage dans la protection des civils au Darfour, leur priorité, en Somalie, au Zimbabwe, dont le président Robert Mugabe est accusé par les Occidentaux de réprimer l'opposition et de ruiner l'économie. Il reste que pour les pays profondément attachés au panafricanisme, le sommet d'Accra ne doit pas seulement constituer un hommage au premier président du Ghana indépendant, Kwame Nkrumah, ardent défenseur de l'unité africaine, mais être aussi un vrai point de départ pour un vrai renouveau. Un continent unissant ses ressources et s'exprimant d'une seule voix sur la scène internationale jouirait, c'est certain, d'un plus grand respect de la part de la communauté internationale et permettrait à l'Afrique de se débarrasser de l'image de chaos, de pauvreté et de harragas qui lui est souvent associée. Kadhafi, dont les tenues sont ornées de dessins représentant les Etats unis d'Afrique, a rejoint par route Accra, essaimant sur tout au long de ses haltes sa vision unitaire, avec notamment la création d'une armée africaine forte de deux millions de militaires ! La caravane aura passée. D. Bouatta