La guerre intestine entre les différents chefs du groupe terroriste, le GSPC, a repris, et de plus belle, avec cette fois l'entrée en jeu de la zone 9 du Sud qui remet en cause l'autorité de l'“émir” national, Abdelmalek Droudkel alias Abou Mosaâb Abdelouadoud. En fait, la zone du Sud dirigée par le sinistre Mokhtar Belmokhtar conteste l'émir” national et son autorité, l'émirat qui, selon lui, serait usurpée. Depuis l'arrestation de Amari Saïfi, alias Abderezak El-Para, Belmokhtar jouit d'une certaine autonomie au sein du groupe terroriste fondé par Hassan Hattab. Quoiqu'agissant au nom du GSPC, Belmokhtar a pris des initiatives personnelles pour bien signifier sa prise de distance vis-à-vis de la “direction” nationale du groupe. Ainsi contrairement aux usages dans cette mouvance terroriste, il s'est permis de médiatiser, par le biais d'un entretien, l'opération contre la caserne Meghetty en Mauritanie en donnant les détails des préparatifs, le passage à l'acte et le bilan de l'attaque. Par ailleurs, la présence auparavant d'El-Para, alors prisonnier des rebelles du MJDT, après la prise d'otages des touristes allemands, a révélé des contacts entre ce dernier après la découverte sur lui d'un téléphone cellulaire, avec des terroristes localisés en Espagne. Contact qui sera maintenu même après son arrestation. Le relais serait, à l'évidence, pris par Belmokhtar à qui revient la primauté de l'allégeance à la nébuleuse d'Oussama Ben Laden, al-Qaïda. Pourtant, ce sera bien Abdelmalek Droudkel qui annoncera la mise sous tutelle d'al-Qaïda du GSPC, fait qui se concrétisera par le discours du n°2 de l'organisation, saluant Aymen Ezawahiri et la diffusion des vidéos des attentats d'Alger par la chaîne Al-Jazeera réputée servir de relais à al-Qaïda. Selon les révélations d'un repenti de la zone 9, l'allégeance du GSPC à al-Qaïda a été décidée unilatéralement par l'“émir” national, Abou Mosaâb Abdelouadoud alors que le premier à avoir pris attache avec l'organisation de Ben Laden était bien Belmokhtar. Révélations qui sous-tendent les dissensions nées au sein du groupe déjà que le groupe dit de Collo a maintes fois manifesté sa désapprobation des décisions de Droukdel. Ce qui renforcera davantage l'“émir” du désert “sourdement” opposé à Droudkel, mais dans les faits amené à agir en solo. Autre motif du froid entre les deux dirigeants terroristes, le passage sous la coupe du clan de Boumerdès, Bordj Menaïel plus précisément, dirigé par Abdelhamid Saâdaoui, de l'“émir” national. Des propositions de promotion auraient été faites pour Saâdaoui, mais ce dernier aurait refusé, préférant rester dans son fief pour se livrer aux rackets où il a amassé des fortunes. Ainsi Saâdaoui et Droukdel se soutiennent mutuellement, y compris dans les moments difficiles de contestation de leur statut dans le groupe. Saâdaoui pourrait bien être derrière le recul de Droudkel donné pourtant prêt à abandonner le maquis dans le cadre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, alors que des informations le donnaient quasiment acquis. Incapable de contrôler les démembrements du GSPC, Droudkel a opté pour une autre stratégie qui consiste à nommer parmi ses proches fidèles des chefs dans les régions. Ce qu'il vient de faire pour la région sud avec la désignation de Djiouadi Yahia alias Abou Ammar, et qui n'a pas été du goût de Belmokhtar, qui a décidé, selon le repenti, de se retirer vers le Mali. Cette décision serait perçue comme une volonté de Droudkel de contrôler tout le groupe pour donner un gage de cohésion à ses nouveaux parrains d'al-Qaïda. Il faut dire que les choses n'ont jamais été au beau fixe entre les deux chefs, surtout depuis l'intronisation de Droudkel, illustre inconnu dans la hiérarchie du GSPC, à la tête du groupe après l'élimination de Nabil Sahraoui qui a succédé, après un coup de force, à Hassan Hattab. Mais Belmokhtar, même s'il ne l'a pas fait ouvertement, est resté hostile à l'“émir” du groupe qui lui a usurpé le poste qui lui revenait de droit étant donné sa position dans la hiérarchie du groupe. Un coup d'Etat “soft” orchestré avec la participation active de Saâdaoui donné un premier temps comme éventuel successeur de Nabil Sahraoui, dont il était très proche. Les terroristes de la zone 9, démunis et usés, selon le repenti, n'hésitent pas à dénoncer les méthodes de leurs acolytes du Centre qui utilisent des méthodes “illicites” pour s'enrichir en s'attaquant à des civils, des enlèvements, vols, rackets, faux barrages… une sorte de déviance de l'objectif originel du groupe. Aussi, Belmokhtar justifie-t-il son retrait par la peur de la trahison et d'être liquidé par ses “amis” qui seraient acquis à Droudkel. Pour autant, il n'a pas décidé de déposer les armes. Bien au contraire, il se serait trouvé une autre couverture en s'alliant à al-Qaïda à son tour par l'entremise de sa “filiale” irakienne El-Ansar. Et ce retrait pourrait bien obéir, au-delà d'éviter le risque de liquidation, à la logique d'al-Qaïda qui veut s'implanter dans la région sahélo-sahélienne qui échappe au contrôle. Et Belmokhtar qui connaît parfaitement le désert est bien placé pour assumer cette mission. Ce qui inévitablement enlèverait un peu de crédit à Abdelmalek Droudkel, réduit ainsi de fait à agir dans les limites de son territoire qui se rétrécit davantage. Les deux camps pourraient alors arriver à l'affrontement pour s'adjuger l'exclusivité du label al-Qaïda. Le divorce est désormais consommé. D'autres régions pourraient suivre le même chemin que celui de Belmokhtar. À moins d'un autre coup d'Etat contre lui. Djilali B.