Alors que le chaos est bien installé, la guerre gagne les chiites qui s'entretuent à Kerbala, haut lieu du chiisme. Les pèlerins ont fui par milliers, mercredi, la ville de Kerbala où s'est rendu le Premier ministre irakien, Nouri al Maliki, au lendemain d'affrontements meurtriers opposant les milices des deux principales organisations chiites d'Irak. Les tirs, parfois nourris, ont continué à résonner après l'aube autour des mausolées de l'imam Hussein et de l'imam Abbas dans cette localité située au sud de Bagdad et considérée comme l'un des principaux lieux saints de l'islam chiite, alors que des sources policières ont affirmé que la police et l'armée irakiennes se sont rendues maîtres du centre de Kerbala au détriment des gardiens des deux mausolées. Les combats ont éclaté lors du pèlerinage marquant l'anniversaire de la naissance au IXe siècle de Mohamed al Mahdi, derniers des 12 imams vénérés par les chiites. Ils ont fait 52 morts et 206 blessés, selon les premières estimations de la sécurité à Bagdad. Le directeur de l'hôpital Hussein de Kerbala a pour sa part rapporté que son établissement avait accueilli mardi soir 34 cadavres et 239 blessés. Comme d'autres événements religieux annuels, ce pèlerinage à Kerbala offre à la majorité chiite d'Irak l'occasion d'effectuer une démonstration de force après sa répression par le régime de Saddam Hussein et un imposant dispositif de sécurité avait été déployé pour parer à d'éventuelles attaques de la part d'extrémistes sunnites. Le coup est parti de chiites. Les affrontements ont opposé deux factions chiites rivales, avec, d'un côté, les miliciens de l'armée du Mehdi fidèles à l'imam radical Moktada Sadr et, de l'autre, l'organisation Badr, bras armé du Conseil suprême islamique d'Irak (CSII), qui contrôle les forces de police dans la plus grande partie du Sud chiite. Les violences se sont propagées à Bagdad avec des affrontements entre les mêmes milices. Mercredi, la capitale irakienne était sous couvre-feu. Le gouvernement a dépêché des renforts à Kerbala. Maliki a imputé ces violences à des bandes criminelles illégales issues des vestiges du régime enseveli de Saddam ! Le bouillonnant Sadr a lancé un appel au calme. L'armée américaine, qui compte 160 000 militaires en Irak, est quasiment absente du sud du pays mais ses avions de chasse ont tout de même survolé Kerbala. Jusqu'ici, il s'agissait pour les Etats-Unis de mettre fin aux activités des extrémistes sunnites. Mais, la perspective d'une guerre entre milices chiites pour le contrôle du sud du pays, fief du chiisme et réservoir pétrolier, constitue une menace supplémentaire pour les efforts de stabilisation de l'Irak. Les milices chiites luttent également pour le contrôle de Bassorah, la grande ville du Sud pétrolifère de l'Irak, que les forces britanniques doivent bientôt quitter. Dans ce climat de guerre totale Bush exige de son Congrès 50 milliards de dollars de plus pour l'Irak ! Ces fonds s'ajouteraient aux 460 milliards de dollars déjà alloués aux guerres d'Afghanistan et d'Irak dans le budget de la défense 2008 ainsi qu'aux 147 milliards prévus dans un projet de loi en attente. D. B.