Les importations de pomme de terre, réalisées récemment par les opérateurs privés, n'ont pas eu l'effet escompté sur le marché national. Contre toute attente, les prix du tubercule devenu, par la force des choses, un produit presque de luxe, n'ont pas fléchi. La hausse des tarifs du kilogramme suit le même rythme. Plus de 25 000 tonnes de ce légume ont été importées depuis un mois des pays comme le Canada, la Turquie et les Pays-bas… sans qu'un quelconque impact ne soit perçu sur les marchés de gros. Sur certaines places, le kg de celle produite localement est affiché autour de 55 DA. Dans d'autres, la locale est proposée à 65 DA. Celle importée, étalée dans quelques rares marchés uniquement, est aux environs de 45 DA voire 55 DA. Décidément, le coût de la pomme de terre n'est pas prêt à descendre au-dessous des 50 DA tel que prévu par les responsables concernés. C'est dire que la solution de l'importation, à laquelle a recouru la tutelle pour endiguer un tant soit peu la crise qui secoue cette filière depuis plusieurs mois en Algérie, n'a pas apporté, du moins pour le moment, les résultats tant attendus. D'aucuns disaient que le recours aux fournisseurs étrangers était une “parade” salvatrice notamment pour le mois du Ramadhan où la consommation de cet aliment est plus importante chez les ménages. Or, sur le terrain, la réalité est tout autre. Il faut, par conséquent, choisir une autre option. Il s'agit pour la tutelle de la campagne d'arrière-saison qui a débuté ces derniers jours. L'on s'attend en effet à une production conséquente d'ici au mois de novembre prochain. Ces quantités qui s'ajouteront sur le marché devraient provoquer logiquement la baisse des prix. Une logique de tendance baissière devrait être confortée aussi par la demande en baisse de la pomme de terre par les fast-foods et autres restaurants qui ferment rideau durant le mois sacré… Les raisons d'une telle situation évoquées par le ministère de tutelle, pour rappel, sont multiples. Mais quelques soient les motifs et autres arguments avancés, rien ne justifie, cependant, la vente au marché d'un kilogramme de pomme de terre à 60 DA voire 70 DA, il y a quelques jours de cela. Tous les acteurs intervenant dans cette filière sont, il faut le dire, responsables de ce constat. L'une des causes soutenues par le ministère est celle liée à la diminution de la superficie plantée dans le cadre du programme saison. Cela est dû à la difficulté rencontrée pour l'achat de la semence sur le marché international. En effet, il est planté habituellement 50 000 hectares en moyenne or, cette année, seuls 35 000 ha l'ont été. Le déficit est estimé donc à 15 000 ha. Les besoins globaux de l'Algérie en semences sont de l'ordre de 220 000 à 240 000 tonnes. La tutelle assure la couverture de ces besoins à raison de 60% pour les programmes d'arrière-saison et primaire d'une valeur de 200 millions de dollars. Environ 80% des besoins pour le programme de la saison proviennent de l'importation. Le ministère s'attelle à réduire au maximum cette dépendance vis-à-vis du marché international. Les prix du pétrole augmentent, ceux de la pomme de terre aussi ! La seconde a trait à la maladie du mildiou. Les produits contre cette maladie parasitaire existent. Plusieurs traitements préventifs durant tout le cycle ont été effectués. Les conditions climatiques qui ont prévalu n'ont, néanmoins, pas facilité l'accès aux agriculteurs dans les parcelles de certaines zones pour appliquer le traitement. Ce qui a engendré une baisse allant de 30% de la production. Il y a eu aussi, la rétention du stock de constitution à des fins spéculatives. Toute la production est destinée au marché de consommation mais une partie est stockée dans des chambres froides pour encourager la spéculation. Il faut rappeler que la production nationale était dans un passé récent excédentaire et que des opérations d'exportation ont été même réalisées. La performance n'a duré que quelque temps puisque, ironie du sort, du stade d'exportatrice, l'Algérie est devenue importatrice de pomme de terre ! À ce propos, l'Etat a même décidé une exonération des droits de douane et de la TVA à l'importation de la pomme de terre destinée à la consommation pour une période allant du 20 août au 1er novembre prochain. La décision de fixer son expiration à cette date coïncide avec la récolte de la pommes de terre d'arrière-saison. Devant une telle situation qui intervient curieusement au moment où les prix du pétrole ont atteint 80 dollars le baril, tous les efforts des acteurs de cette filière doivent converger vers une seule orientation : la régulation du marché. Car, il ne suffit pas d'ajouter de nouvelles quantités sur le marché mais de pouvoir proposer un kg de pomme de terre à des prix raisonnables, accessibles aux bourses moyennes et à un nombre plus important de citoyens. Le plan national de développement agricole et rural (Pndar) a, rappelle-t-on, permis la réalisation de l'équivalent de 1 million de m3 en infrastructures de froid à même de stocker jusqu'à 350 000 tonnes de pomme de terre. Par ailleurs, le nombre de wilayas qui produisent de la pomme de terre est passé de 5 à 14 et dépassera, selon des responsables, les 20 dans les deux prochaines années. Badreddine KHRIS