Chavez, nouveau symbole contre l'impérialisme et le capitalisme, pensait que sa révolution bolivarienne allait passer comme une lettre à la poste. Il a vu tout faux. Des manifestations de masse dégénèrent en violences et, cerise sur le gâteau, son ancien ministre de la Défense et ami, l'a lâché. Les manifestations se multiplient à Caracas et dans les grandes villes et les récents troubles viennent compliquer ce qui semblait s'annoncer comme un parcours sans embûches. Chavez, donné vainqueur haut la main, bien qu'il ait de quoi manœuvrer encore, l'opposition n'étant pas parvenue à unifier ses rangs, risque de ne pas avoir la grande victoire qu'il escomptait. Il commence à se faire du souci alors qu'il compte renforcer encore ses pouvoirs présidentiels via un référendum de révision constitutionnelle, prévu pour le 2 décembre. Les étudiants mènent la danse des manifestations actuelles qui rassemblent des dizaines de milliers de personnes, passant par-dessus la tête de partis politiques discrédités par l'échec de plusieurs tentatives pour renverser Chavez en huit ans. L'ancien parachutiste putschiste s'est fait, depuis sa première élection en 1998, une spécialité d'accroître ses pouvoirs et l'enjeu du 2 décembre, ce sont 69 amendements constitutionnels qui renforceraient encore la “révolution bolivarienne” en cours au Venezuela, en lui confiant le pouvoir à vie ! La nouvelle Constitution lui permettrait de se représenter indéfiniment à la présidence, donnerait naissance à des provinces dirigées par des gouverneurs désignés par lui et soumettrait la Banque centrale à son contrôle. Ses détracteurs, y compris les organisations de défense des droits de l'homme et l'Eglise catholique, condamnent ce projet ainsi que l'état d'urgence qui permet d'imposer des mesures d'exception, notamment à la presse écrite privée, les autres médias étant entre les mains de Chavez. La situation rappelle les années troubles de 2002-2003 : grève générale, bras de fer avec les patrons pétroliers, qui culminèrent avec un soulèvement militaire raté, les manifestions s'étant retournées au profit du président, laissant sur le carreau une opposition démoralisée et permettant à Chavez de consolider son emprise sur le secteur pétrolier et l'armée. Cette fois, cependant, la défection de Raul Baduel, général à la retraite et ancien ministre de la Défense, qui vient de tourner le dos à Chavez, partant en campagne contre une révision constitutionnelle qu'il qualifie de coup d'Etat, a de quoi inquiéter le président vénézuélien.Baduel a joué un rôle majeur dans le retour du pouvoir à Chavez pendant le putsch de 2002, sa défection réveille le spectre d'un mécontentement au sein de l'armée. Chavez, reconnaissant le potentiel explosif des déclarations de son ancien ami, a réuni son état-major militaire pour évaluer leur impact éventuel. D. B.