Les pays membres de l'Opep, qui ont tenu le troisième sommet des chefs d'Etat les 17 et 18 novembre à Riyad en Arabie Saoudite, avaient plutôt les yeux rivés sur le taux de change du dollar. Ils s'inquiètent de plus en plus de la chute du billet vert qui ampute leurs recettes d'exportation. Mais la question divise. Les divergences ont éclaté au grand jour vendredi soir, lors d'une réunion préparatoire entre les ministres des Affaires étrangères, de l'Economie et du Pétrole de l'Opep. “La question de la monnaie de référence des échanges pétroliers n'est pas nouvelle. L'Opep mène des études sur la question. Elle a pensé à la fois à changer de monnaie et à un panier de monnaies”, soulignait hier Saïd Nachet, l'un des dirigeants du Forum international de l'énergie, présent à Riyad. Pour lui, coter le pétrole dans une autre devise que le dollar n'est pas la solution. “Si demain vous valorisez la valeur du pétrole en euro, ça veut dire que les acheteurs de pétrole devront se procurer des euros en vendant des dollars pour se procurer le pétrole. Que ferait-on alors si dans deux ans l'euro revient à son niveau de lancement (1,16 dollar environ) ? Rappelez-vous, il y a trois ans, on disait que l'euro était trop faible”, avance-t-il. Les prix mondiaux du pétrole sont libellés en dollar, ce qui fait que la baisse continue de cette devise depuis deux ans diminue d'autant les revenus des pays producteurs. Le dollar a perdu près de 15% depuis un an face à l'euro et a atteint début novembre un plancher historique à 1,4752 dollar pour un euro. L'Iran n'a toutefois pas attendu le signal de l'Opep. Depuis le début de l'année, Téhéran vend son pétrole essentiellement en euro. Cependant, la question telle qu'elle est posée au sommet de Riyad est plus politique que technique. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole “devrait s'établir comme agent géopolitique actif”, a affirmé le président vénézuélien Hugo Chavez à l'ouverture du sommet samedi soir. Le pétrole ne doit “pas se transformer en outil de conflit”, a rétorqué le roi Abdallah d'Arabie Saoudite aussitôt après. L'Opep ne s'est pas prononcée sur un relèvement ou non de son plafond de production. Le sommet a renvoyé toute éventuelle décision à sa prochaine réunion ministérielle, le 5 décembre à Abou Dhabi. L'Opep n'a pas de raisons de répondre favorablement aux pays consommateurs qui lui demandent de produire plus, persuadés que les pays producteurs ne sont pas responsables du niveau record du baril atteint ces derniers jours. Le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, qui deviendra président de l'Opep dès janvier prochain, avait estimé que la hausse de production de 500 000 barils n'a eu aucun effet sur les cours. Pour autant, l'organisation rassure qu'elle continue à assurer l'approvisionnement du marché du pétrole d'une manière qui soit suffisante et fiable pour répondre aux besoins mondiaux. Par ailleurs, une fois ajustés de l'inflation, les prix du pétrole sont encore sous leurs niveaux du début des années 1980 où ils avaient dépassé, en dollars actuels, les 100 dollars, estime le roi Abdallah d'Arabie Saoudite, jugeant le niveau actuel des prix “juste”. Le ministre de l'Energie est des Mines Chakib Khelil avait, vendredi, affirmé que le communiqué final serait articulé autour de trois grands axes : “La stabilité à long terme du marché du pétrole”, la nécessité de créer “un fonds international pour le développement”, mais aussi un message à l'attention des pays industrialisés en faveur de la séquestration de dioxyde de carbone (CO2), technologie jugée prometteuse pour limiter l'accumulation de gaz à effet de serre. “La séquestration de carbone pourrait réduire l'impact des hydrocarbures sur le changement climatique et les pays développés ont la technologie pour cela”, a ajouté le ministre qui lisait à la presse le projet de communiqué. Deux semaines avant la conférence de Bali (Indonésie), qui lancera les travaux pour un nouveau protocole de Kyoto (après 2012), l'Opep veut aussi montrer qu'elle aussi se préoccupe du réchauffement climatique. La séquestration de carbone pourrait réduire l'impact des hydrocarbures sur le changement climatique et les pays développés ont la technologie pour cela. Synthèse M. R.