Tout en ayant des mots assez durs contre le système colonial, ce qui constitue une légère évolution de son discours, le président français propose de laisser le passé aux historiens et de fonder les relations algéro-françaises sur un partenariat basé sur le principe du win-win. Après un premier entretien avec le président Bouteflika, Nicolas Sarkozy a prononcé un discours en clôture d'une rencontre réunissant les hommes d'affaires algériens et leurs homologues français. Dans ce discours, le successeur de Jacques Chirac a dénoncé le système colonial. “Le système colonial a été profondément injuste” et “des crimes terribles” ont été commis durant la guerre d'indépendance de l'Algérie (1954-1962). “Oui, le système colonial a été profondément injuste, contraire aux trois mots fondateurs de notre République : liberté, égalité, fraternité”, a-t-il déclaré. Poursuivant la remise en cause du système colonial, il ajoute : “Oui, des crimes terribles ont été commis tout au long d'une guerre d'indépendance, qui a fait d'innombrables victimes (...)”. Mais pour lui, tout n'est pas si mauvais en ce sens qu'à l'intérieur de ce système, “il y avait beaucoup d'hommes et de femmes qui ont aimé l'Algérie, avant de devoir la quitter. Oui, des crimes terribles ont été commis tout au long de la guerre d'indépendance, qui a fait d'innombrables victimes des deux côtés”, a-t-il poursuivi. En rappelant :“Aujourd'hui, moi qui avais sept ans en 1962, ce sont toutes les victimes que je veux honorer.” Tout en faisant le procès du colonialisme en prenant le soin de ménager les uns et les autres, le président français confirme sa vision de fonder les relations entre Alger et Paris sur une vision d'avenir. “Parler d'avenir, ce n'est pas ignorer le passé”, a-t-il insisté en affirmant qu'il est “venu en Algérie pour bâtir entre nos deux peuples un avenir de solidarité partagée”. “Je suis convaincu depuis toujours que pour bâtir un avenir meilleur, on doit au contraire regarder le passé en face et c'est ce que nous avons fait en Europe”, indique Nicolas Sarkozy en ajoutant que “c'est le travail de mémoire qu'(il est) venu proposer au peuple algérien”. Pour sortir “du mélodrame du passé”, selon l'expression du journaliste Roland Kayrol, le chef de l'Etat français propose de laisser faire les historiens des deux rives. “Le moment est venu de confier à des historiens algériens et français la tâche d'écrire ensemble cette page d'histoire tourmentée pour que les générations à venir puissent, de chaque côté de la Méditerranée, jeter le même regard sur notre passé et bâtir sur cette base un avenir d'entente et de coopération”, a ajouté le président français. Nicolas Sarkozy évoque également le problème d'islamophobie. “En France comme en Algérie, nous devons combattre avec une détermination sans faille toute forme de racisme, toute forme d'islamophobie et toute forme d'antisémitisme”, a-t-il déclaré, soulignant en outre que “le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme ne s'expliquent pas, ils se combattent. Ce qui vaut pour la France vaut partout ailleurs. Il n'y a rien de plus semblable à un antisémite qu'un islamophobe. Tous deux ont le même visage, celui de la bêtise et de la haine”, a-t-il ajouté. Le président français enchaîne ensuite sur le registre du pragmatisme en s'engageant en faveur d'un “partenariat d'exception” qui “multiplie les projets et les solidarités concrètes” entre l'Algérie et la France. “C'est en m'exprimant devant vous que j'ai souhaité commencer cette visite d'Etat, parce que je suis venu en Algérie pour parler d'avenir, pour bâtir entre deux peuples un partenariat d'exception”. “Il est vrai que l'Algérie et la France sont depuis longtemps des partenaires stratégiques”, a-t-il ajouté, rappelant que l'Algérie est le “premier client de la France en Afrique”. Pour le chef de l'Etat français, “cette relation économique est exceptionnelle”, mais la “position (de la France) n'est pas un droit acquis”, a-t-il dit, car “l'Algérie est un pays libre, indépendant, qui décide librement” et la France “respecte ses choix et ses décisions”, a-t-il affirmé. N. Sebti/Agences