À Djelfa comme dans beaucoup d'autres régions du pays, l'abattage clandestin du cheptel a de tout temps été pratiqué impunément, au vu et au su de tous. Sa persistance dans les milieux ruraux ne dénote pas seulement de l'absence totale de contrôle de ce phénomène social aux incidences souvent négatives sur les plans économique, sanitaire et environnemental, mais aussi de l'existence d'archaïsmes dont ne peut s'accommoder une société qui aspire au progrès et à la modernité. Ainsi, sans l'insistance et la ténacité d'un propriétaire d'abattoir à Aïn Oussera, qui a frappé aux portes de Liberté, nous n'aurions peut-être jamais pensé à soulever le problème. En effet, ce dernier estime être victime et se plaint de l'embargo que lui imposent les bouchers de la ville qui ne le sollicitent que rarement, ce qui, pense-t-il, cause un préjudice à l'équilibre financier de la Sarl qu'il dirige. Par contre, les bouchers interrogés sur la question invoquent l'argument de l'impôt et du prix de l'abattage, 200 à 250 dinars l'unité, qu'ils jugent très élevé. Consultés sur la question, les services vétérinaires qui exercent dans des conditions difficiles disent que “leur rôle se limite au contrôle de la qualité de la viande dans les commerces agréés par l'Etat, et qu'au-delà, le problème relève de l'ordre public. Néanmoins, ils expliquent qu'en grande partie, la proscription par la loi de l'abattage de la femelle dont la chair est très consommée dans la région pousse des bouchers malhonnêtes à contourner le règlement. Ainsi, beaucoup d'entre eux recourent à un fin subterfuge consistant, d'un côté, à exposer une carcasse estampillée par le médecin vétérinaire et, de l'autre, à commercialiser de la viande qui n'a pas reçu le visa des contrôleurs de la qualité”. Les services d'hygiène de la commune d'Aïn Oussera, prise comme échantillon, abondent dans le même sens. Eux qui opèrent sur plusieurs fronts et qui subissent parfois les pires insultes et les menaces de commerçants peu scrupuleux. Ils reconnaissent l'existence du phénomène et procèdent généralement en suivant un programme préalablement établi tout en faisant des descentes inopinées dans le cadre du travail des brigades mixtes. À titre indicatif, les chiffres officiels aimablement fournis par l'inspection agricole de la daïra d'Aïn Oussera, pour le compte de son rapport annuel, font état de l'abattage de 11 898 têtes ovines, de 692 caprins et de de 321 bovins, constituant un total de 4 020,2 quintaux de viande rouge. Des chiffres qu'on pourrait décupler à loisir pour qu'ils puissent refléter l'amère réalité du terrain. En définitive, la balle est dans le camp des autorités est celui des services concernés qui doivent redoubler d'efforts en renforçant d'abord les structures de contrôle existantes en leur donnant les moyens de leur politique pour endiguer un tant soit peu ce phénomène. Pour commencer, pourquoi ne pas intensifier les campagnes de sensibilisation ? S. OUAHMED