“Les pouvoirs publics ne semblent pas prendre conscience de ce qui nous attend ! Structurellement, le coût des céréales va encore augmenter et les implications socioéconomiques en Algérie, pour l'ensemble de la filière avicole qui fait vivre deux millions de personnes, seront catastrophiques ! Dans moins de deux ans, si rien n'est fait, c'est l'ensemble de la filière qui va disparaître avec comme conséquences la paupérisation de toute la population !” Dans ces propos, tenus par un éleveur, il n'y a rien d'alarmiste, bien au contraire, une réalité crûment dite et qui s'appuie sur le contenu d'un rapport sur “l'alimentation des volailles en Algérie”. Ce rapport, présenté par le Dr Nasser Eddine Assal, expert en nutrition animale, est une étude technico-économique commandée par la nouvelle Association interprofessionnelle des productions animales (AIPA) évaluant la situation de l'activité de la production animale dans notre pays et ses perspectives au vu de la flambée des cours mondiaux des céréales. Une lecture du rapport a été faite ce jeudi à Oran lors d'une rencontre nationale regroupant des producteurs d'aliments, des éleveurs, des vétérinaires… qui ont par la suite participé à l'assemblée générale élective de l' AIPA. Pour M. Assal, la production animale et l'élevage en Algérie vont se trouver confrontés dans les mois à venir à une crise très grave et sans précédent. Et pour cause, les cours mondiaux des céréales entrant dans la composition des aliments pour volailles (poulets de chair et poules pondeuses) ne cessent de monter comme le maïs, le son de blé, le tourteau de soja… : “Les cours du soja à la Bourse de Chicago ont augmenté de 150% en une année ! Le quintal se vend à 4 250 DA, à la fin de l'année il y aura une augmentation de 42% et le prix passera à 5 900 DA. Les cours du maïs ont varié en une année de 42,65 % en décembre 2008 le quintal s'achètera à 4 200 DA, et, selon les experts, ces prévisions seront dépassées”. Et d'en expliquer les raisons. “Il ne faut plus s'attendre à ce que les prix baissent, les stocks mondiaux des céréales ne sont que de 45 jours, c'est le plus bas niveau parce que les pays comme l'Inde, la Chine et la Russie ont augmenté leur consommation, sans oublier la production de biocarburants qui accroît la pression”. Pour l'Algérie, qui s'approvisionne pour l'essentiel à partir de l'importation, l'impact économique est des plus terribles et se mesure déjà puisque les statistiques officielles évoquent la disparition de 25% des petits élevages. Mais dans les mois à venir cela va empirer. Les experts estiment que 70% de la filière volailles de chair est composée de petits éleveurs non fabricants d'aliments et, à terme, ils sont condamnés à disparaître. En fait, c'est l'ensemble de la filière de l'activité de la production animale dans le pays qui est ainsi remise en cause. Devant cette situation et ce constat, les professionnels et les experts ont déjà ébauché de nouvelles stratégies qui visent à terme de réduire les coûts des aliments de volailles et donc les coûts de productions. En effet, l'étude économique montre, par exemple, que le coût de production actuelle du poulet de chair est d'environ 120 DA par kilo, en comptant le coût de l'aliment par poulet qui est de 209 DA, le coût de l'élevage 50 DA, etc., le coût de production d'œufs de consommation étant calculé aux alentours de 6 DA. Pour diminuer ces coûts, le recours aux aliments de volailles de substitutions ou alternatifs, comme nous l'a expliqué M. Assal, sont préconisés. F. Boumediène