Des millions de fidèles ont célébré l'Achoura chiite en Irak, où le sang a coulé “à torrents”. Au rite lui-même s'ajoutent les violences non plus intercommunautaires comme l'an dernier mais impliquant une secte messianique chiite. Elles ont fait au moins 70 tués depuis vendredi. Samedi, au dixième et dernier jour de l'Achoura, la ville sainte de Kerbela a été littéralement envahie par une marée humaine de fidèles venus rendre hommage au martyre de l'imam Hussein, petit-fils du prophète Mahomet, fils d'Ali, le fondateur du chiisme, et dont la dépouille repose à Kerbela, tué en 680 devant les portes de la cité par les troupes du califat sunnite des Omeyyades. Aux longues processions des fidèles s'auto-flagellant a succédé samedi matin le spectaculaire rite du tatbir : au rythme des tambours, des milliers de pénitents se sont frappés jusqu'au sang le haut du front avec la lame d'un grand couteau pour marquer la mort tragique de Hussein. Des célébrations identiques, qui mobilisent toute la communauté majoritaire en Irak, se sont déroulées avec une égale ferveur et sous haute surveillance même à Bagdad, dans les quartiers de Sadr City et Kazimiyah. La veille, des affrontements avaient opposé pendant plusieurs heures les membres d'une secte messianique chiite, les “fidèles de l'armée du Mahdi”, et les forces de sécurité irakiennes dans deux importantes villes du sud, Bassora et Nassiriyah. Il y a exactement un an des affrontements similaires impliquant les membres de cette même secte avaient fait près de 300 morts ! Cette secte qu pousse le sacrifice à l'extrême a distribué des tracts hostiles au gouvernement ainsi que des étoffes et foulards jaunes marqués de l'étoile de David, l'un de ses symboles. Les “fidèles de l'armée du Mahdi” attendent un retour prochain sur terre de l'imam Mahdi, 12e et dernier imam des chiites, disparu au VIIIe siècle et censé venir rétablir la paix et la justice. Le gouvernement irakien a qualifié ces violences de plan criminel mené par un groupe déviant pour déstabiliser les provinces du sud du pays. Selon Bagdad, la secte a attaqué des processions de pèlerins et a tenté de prendre le contrôle de bâtiments de l'Etat. Pour rappel, Hussein a été tué par le califat omeyyade sunnite alors qu'il allait réclamer ce qu'il considérait comme son dû : la direction politique et spirituelle de la communauté des musulmans. Depuis, Hussein est le symbole de la lutte de la justice contre la tyrannie, du bien contre le mal. D. B./Agences