À trois jours des élections pour le renouvellement du conseil de l'Ordre du barreau d'Alger, plusieurs candidats — se disant représentant plus de 80% — ont demandé le report. Sur les raisons de leur demande de report, ils en ont dénombrées plusieurs qui ne peuvent, selon eux, qu'annuler de facto ce rendez-vous électoral. Ainsi, ils reprochent au bureau sortant d'être juge et partie dans ces élections alors, comme l'affirme Me Chaoui, “le règlement intérieur veille à l'égalité des chances des candidats, à l'objectivité, à la transparence et à l'équité”. Ils reprochent au bureau l'opacité dans laquelle ces élections ont été préparées en axant leurs “plaidoiries” sur le tableau représentant les avocats du barreau d'Alger. “Alors que ça représente le fichier électoral sur lequel les candidats doivent se baser pour leur campagne, on n'a rien sur ce tableau que le 15 janvier dernier. Il y a eu une note où on nous a indiqué qu'il pouvait être consulté sur le Net”, déplore Me Chaoui, suivi par Me Allouche qui dénonce la liste trouvée sur la toile. “Elle n'est pas conforme à la réglementation puisqu'il n'y avait que le nom et le prénom des avocats sans rien d'autres. En plus d'être amputée des détails sur ces avocats, il y a une différence de plus de 50 noms par rapport au tableau qu'on s'est procuré au niveau du greffier”. Cette “liste de discorde” a été dénoncée par tous les candidats présents en fustigeant le bâtonnier qui, selon eux, n'avait pas le droit de donner 520 dérogations sur les 1 300 stagiaires. “Le conseil est le seul qui a ce droit et le bâtonnier ne peut qu'appliquer”. Me Benbelkacem notera aussi que le tableau n'a été délibéré que le 25 novembre 2007 “soit la veille de l'AG de fin de mandat de l'ancien bureau”. Il rappellera aussi, selon la loi, que les élections doivent se dérouler dans le mois qui suit l'ouverture de l'année judiciaire “et donc on est déjà à deux mois”. Continuant sur leur accusation à l'encontre du bâtonnier sortant Me Sellini, ils lui reprochent aussi le fait de vouloir briguer un troisième mandat “et s'il est réélu, il ne pourra pas briguer un mandat national”, fera remarquer Me Chaoui qui insistera sur l'importance du barreau d'Alger. “Ce n'est pas pour minimiser les autres régions, mais c'est la capitale qui doit être représentée tout de même. On n'a pas à subordonner les intérêts personnels à ceux de la profession”. Concrètement, et pour que toutes les conditions de déroulement soient satisfaites “les contestataires interpellent trois personnes”. La première est celle du président de la commission des élections. “Qu'on ne connaît même pas à trois jours de la date prévue !” ironisera Me Chaoui. Après, c'est le ministre de la Justice à qui ils font un appel du pied “même si nous sommes des représentants d'une profession libérale”. Ils demandent au garde des Sceaux d'annuler lui-même les élections “s'il estime qu'il y a une crise, la loi l'autorise à renvoyer les élections par un arrêté. Il peut fixer lui-même la date”. La dernière “personne” interpellée est le juge administratif “qui nous attend après les élections”. Ils ne fermeront toutefois pas la porte devant leurs “adversaires” (selon Me Benbelkacem les contestataires représentent 117 candidats sur les 150 et ont déjà constitué une commission de 6 personnes). “Tout ceci peut être évité si dans un sursaut, ils estiment que nos revendications sont légitimes et qu'ils décident eux-mêmes du report.” Profitant de l'occasion, la loi portant profession des avocats a été évoquée et surtout contestée. Datant du début des années 1990, elle est, selon eux, totalement dépassée. “Elle a été faite au moment où il n'y avait que 2 000 avocats. Maintenant, il en existe plus de 20 000”, affirme Me Benbelkacem avant d'ajouter : “Par exemple, c'est anormal qu'un bâtonnier fasse 5 mandats alors que de par le monde, il n'a droit qu'à un seul pour qu'il puisse se concentrer seulement sur son travail et non sur les prochaines élections.” Les candidats contestataires concluront que la commission qu'ils ont créée va décider “aujourd'hui” des actions qu'il faut entreprendre en attendant l'écho qui sera donné à leur démarche. Rappelons qu'en 2005, à la même époque de l'année, les élections avaient été annulées après que les candidats eurent protesté pour “faux et usage de faux” et que finalement le même résultat (réélection de Me Sellini) quelques semaines après. “Cette fois, on a averti avant les élections”, prévient Me Benbelkacem. Salim KOUDIL