Voilà donc une crise financière qui passe, corrige les valeurs, fait baisser les taux et le loyer de l'argent pendant que nos réserves et leur gestion voient le train des opportunités s'éloigner tout doucement : ouverture du capital du CPA et des autres compagnies dans les meilleures conditions, entrée possible mais non exploitée au capital de grandes multinationales. La crise s'explique d'abord par l'incapacité de très nombreux emprunteurs de rembourser les prêts octroyés par de très nombreuses banques. Ces banques ont emprunté cet argent à leur banque centrale, la Fed américaine, qui elle-même a emprunté à d'autres banques et pays via l'émission et l'acquisition de bons du Trésor américain. La valeur de ces bons baisse et l'investissement perd de sa valeur. Les emprunteurs ne pouvant plus rembourser vont devoir rendre les terrains et les maisons hypothéqués. Le montant des prêts est égal, en théorie, au montant des pertes. Pour l'Algérie, la perte s'inscrit tout d'abord dans des revenus moindres issus des placements en bons du Trésor américain et en placements à court terme en dollars, de la continuelle baisse du dollar par rapport à l'euro et de l'impact dans le courant de cette année sur les acteurs de cette crise (prêteurs, emprunteurs et leurs clients) qui, de loin ou de près, ont des liens avec l'Algérie et qui devront revoir leurs investissements à la baisse ou augmenter leurs prix : l'ouverture du capital des entreprises publiques en a été la première victime. Si l'augmentation des prix des denrées et matières premières de première nécessité est l'une des causes de cette crise, expliquant la remontée des taux (du loyer de l'argent), donc la remontée du coût du crédit et donc de l'impossibilité pour nombreux d'honorer leurs paiements d'intérêts et pour d'autres de continuer à investir dans une activité industrielle, voire commerciale tout simplement, est-ce qu'un Etat pouvait se prémunir de telles conséquences ? Les origines de la croissance La croissance des pays industrialisés est commune à chacun de ces pays car les activités industrielles sont également réparties et reliées dans ces pays. Les sources de cette croissance résident dans l'activité industrielle, technologique et du bâtiment. Les projets des pays émergents représentent peut-être 10% à 15% de cette croissance et respectivement, la croissance des pays émergents, comme l'Algérie, est constituée de 10% à 15% des créations de valeur des pays industrialisés… mais le taux de croissance n'est pas le même, la propension à développer n'est pas la même : 6% pour les pays émergents contre 2% pour les pays industrialisés et donc, un très petit pourcentage de croissance industrielle contribue à un grand pourcentage de croissance chez nous… pour minimiser, voire contrôler cet impact, il nous faut y contribuer. La pertinence de fonds souverain au contraire de la mobilité des capitaux Avec une économie constituée à 95% d'importations, il était impossible de contenir la hausse des prix à l'international sur le marché national. Mais alors, que faire ? Subir ? Ouf, au moins un ministre qui s'est exprimé en faveur de la création d'un fonds souverain algérien qui serait actif sur le marché international par l'achat de titres, d'obligations pour permettre le positionnement des intérêts algériens mais aussi établir un premier rempart entre le marché international et le marché national. Mais d'abord, qu'est-ce qu'un fonds souverain ? Ce sont les réserves de l'Etat qui sont utilisées pour acheter des titres de compagnies, participer à de grands projets d'infrastructures, participer au financement de l'activité budgétaire d'autres pays. La décision d'investir dans tel ou tel projet et le montant de l'investissement vont dépendre des objectifs et des contraintes de l'Etat. Projet sans risque ou peu de risque - secteur stratégique : énergie, renouvelable, eau, transport, télécoms, denrées alimentaires ; secteur géographique et liquidité de l'investissement, c'est-à-dire la facilité et la flexibilité de se retirer à moindre frais et surtout en récupérant la mise. Mais voilà, l'Algérie n'a pas de fonds souverain, investit ses réserves dans des bons du Trésor américain qui rapporteront au plus 1,8% par an net (en dollars !). Le fonds souverain peut être considéré comme un outil de gestion des réserves et de financement des situations économiques difficiles : une sorte de chambre de compensation. Le rating Pour permettre à ce fonds d'exister, l'Algérie doit d'abord faire évaluer sa crédibilité d'acteur financier international en se dotant d'un rating, sorte de classification identique à celle effectuée par la Coface mais qui jugerait de la fiabilité de l'Etat en qualité de partenaire. L'excellente et très opportune diminution des dettes extérieures, des dettes publiques internes, l'historique de crédit (re-paiement des dettes en temps et en heure) et le niveau exceptionnel des réserves contribueront certainement à l'obtention d'un bon rating. Ce rating permettra à l'Algérie de prêter et d'emprunter sur le marché international à un taux ou coût de référence qu'il faudra comparer avec le coût équivalent en monnaie locale (le dinar algérien) de prêter et d'emprunter afin de toujours mesurer l'opportunité de financer localement au lieu d'aller sur les marchés internationaux. Cette comparaison devra aussi être de mise pour les grands groupes publics, Sonatrach, Sonelgaz, SNTF, Air Algérie pour leurs immenses besoins de financement. La question ne se pose pas aujourd'hui : il faut financer localement. Dans un marché international complexe et volatile, il est plus sage d'être acteur que spectateur, il vaut mieux agir que réagir : If you cannot beat the market, be part of It ! Le calendrier Il ne faut pas croire que la crise va s'estomper avec le troisième mandat. Le ministre des Finances et la ministre de la Réforme financière lient la reprise du processus de privatisation du CPA à la santé financière des banques retenues. Toutes ces banques ont été touchées par la crise, toutes vont imputer une perte “théorique” dans leurs comptes (il n'y a pas perte de 100% du prêt !), toutes vont provisionner, voire recapitaliser et toutes seront donc moins agressives qu'elles ne l'auraient été avant la crise. En lieu du milliard espéré pour les 51% du CPA, il ne faut pas s'attendre à plus de 700 - 800 millions d'euros. On a pu lire ici et là que le processus de privatisation aurait été reporté à cause des prêts octroyés aux notables/tuteurs de l'Algérie et que même le président de la République se serait occupé de cela !! Pathétique ! Arrêtons la désinformation ! Il faut savoir que 85% des prêts octroyés par le CPA ont été revus, analysés et évalués par les banques retenues dans le cadre de la privatisation. Mais il ne faut plus attendre pour relancer le processus car les banques déjà présentes en Algérie vont atteindre un nombre d'agences assez important (il leur suffira de recapitaliser pour augmenter leur propension à emprunter et donc à prêter), la Citibank (et non City Bank ! ) a maintenant un P-DG (chose qu'elle n'avait pas fin novembre) mais c'est la banque qui a le plus perdu dans cette crise, on ne peut vraiment compter que sur les quatre françaises : SG, BNP, CASA el les Banques populaires. Les bilans de ces banques seront prêts courant mars et les capacités de chacune à investir en Algérie seront alors établies. Safou Djamel