Les Etats-Unis et l'Europe tolèrent que “des autocrates se posent en démocrates” dans des pays comme le Pakistan, le Nigeria ou la Russie, où les droits humains sont violés, dénonce l'organisation de défense des droits de l'homme, Human Rights Watch dans son rapport annuel. “De nos jours, il est très facile pour les autocrates de n'en faire qu'à leur tête en montant un simulacre de démocratie”, souligne Kenneth Roth, directeur de l'organisation basée aux Etats-Unis, dans ce rapport publié jeudi. Selon M. Roth, “Washington et les gouvernements européens acceptent toujours les élections les plus douteuses lorsque le gagnant est un allié stratégique ou commercial”. D'autre part, les Etats-Unis et l'Europe ont plus de mal à exiger le respect des droits de l'homme dans le monde parce qu'ils les violent eux-mêmes dans leur lutte contre le terrorisme, et les gouvernements autocratiques en profitent, affirme l'organisation. Le rapport signale les abus des Etats-Unis dans la “guerre contre le terrorisme”, avec 275 détenus non inculpés à Guantanamo (Cuba), le recours à des prisons clandestines à l'extérieur du territoire américain et la justification de la torture par le gouvernement. Au Pakistan, dénonce HRW, le président Pervez Musharraf, allié stratégique de Washington, a modifié le jeu électoral en réécrivant la Constitution et en détruisant le système judiciaire indépendant. Pourtant, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont renoncé à faire dépendre leur aide d'une amélioration des garanties électorales avant les élections prévues en février prochain dans ce pays. Et si les Etats-Unis ont haussé le ton face à l'explosion de violence politique au Kenya, ils avaient accepté l'an dernier les résultats des élections au Nigeria, pays riche en pétrole, en dépit d'accusations crédibles de fraudes. En Russie, à mesure qu'approche l'élection présidentielle de mars prochain, le régime de Vladimir Poutine “réprime la société civile et la liberté de réunion” et continue à violer les droits de l'homme en Tchétchénie (Caucase, sud). “Les critiques internationales de l'attitude de la Russie en matière de droits de l'homme se sont tues, et l'Union européenne a manqué de façon consistante et soutenue à ses exigences en la matière”, dénonce le HRW. Le rapport critique en outre le blocus d'Israël à l'encontre des Palestiniens de Gaza, un “châtiment collectif” qui viole le droit international. En Chine, les jeux Olympiques qui se tiennent cette année “constituent une chance historique pour le gouvernement chinois de montrer qu'il peut faire des droits de l'homme une réalité pour 1,4 milliard de citoyens”, souligne Kenneth Roth. En Birmanie, le rapport dénonce le recours à la violence de la part de la junte militaire pour réprimer les manifestations de moines bouddhistes et de militants pour la démocratie, ainsi que la détention arbitraire de centaines de personnes. HRW mentionne également des violations des droits de l'homme dans la gestion des crises humanitaires en Somalie et dans l'est de l'Ethiopie, “une tragédie oubliée” subie par des millions de personnes. L'organisation accuse le gouvernement du Soudan d'être le “principal responsable” de cinq ans de crise au Darfour (sud-est), avec 2,4 millions de personnes déplacées et 4 millions d'individus qui survivent grâce à l'aide humanitaire. Elle signale des “élections manipulées” à différents degrés au Tchad, en Jordanie, au Kazakhstan, en Ouzbékistan, en Azerbaïdjan, à Bahreïn, en Malaisie, en Thaïlande, au Zimbabwe, au Bélarus, à Cuba, en Egypte, en Iran, en Israël, en Libye, au Turkménistan, en Ouganda, au Cambodge, en RDCongo, en Ethiopie, au Liban, en Russie, en Tunisie, en Chine et au Pakistan. R. I./Agences