Les Etats-Unis font partie des pays les plus critiqués en matière de respect des droits de l'Homme, selon les rapports des différentes organisations non gouvernementales spécialisées dans le domaine. “Je ne prétends pas que le gouvernement américain soit le pire violateur des droits de l'Homme, mais c'est manifestement celui qui a le plus d'influence”, a estimé Kenneth Roth, le directeur de Human Right Watch. Cette appréciation venant d'un spécialiste en la matière décrédibilise la position de leader dans la défense des droits de l'Homme revendiquée par la Maison-Blanche. Ainsi, Washington, qui reproche à de nombreux pays, dont l'Algérie durant la dernière décennie, de violer les droits de l'Homme, se retrouve aujourd'hui dans le box des accusés. Le non-rejet par les responsables d'éventuels recours à de mauvais traitements dans le cadre des interrogatoires des prisonniers suspectés de terrorisme, alors que les ONG exigent l'interdiction pure et simple de la torture, noircit davantage la position US. Le rôle joué par les services de renseignement américains en Afghanistan, en Irak et dans les camps de détention de la base de Guantanamo porte sérieusement atteinte à l'image de promoteur de la démocratie et de défenseur des droits de l'Homme dont fait sienne l'Amérique de George Bush. Un expert onusien a qualifié de négatif l'impact de la lutte antiterroriste menée par les Etats-Unis. Cette situation se répercute sur les travaux de la commission des droits de l'Homme de l'Organisation des Nations unies, qui débutent aujourd'hui à Genève. “L'un des problèmes majeurs de la commission, c'est que beaucoup de ses membres n'agissent pas pour promouvoir ses objectifs mais pour les saper”, a fait remarquer le premier responsable de Human Right Watch, qui est allé jusqu'à parler de “test de crédibilité” pour cette session de la commission onusienne. À voir le contenu d'un rapport réalisé en décembre dernier par un comité des sages sur le fonctionnement de la CDH, une bonne partie de ses membres en font partie pour pouvoir se protéger contre les accusations dont ils font l'objet. Une réforme s'impose donc ! Cependant, la réforme en question n'est pas pour demain en raison de la forte opposition qu'elle suscite d'ores et déjà de la part des grandes puissances. L'on s'attend à une rude bataille sur la question de l'interdiction du recours à la torture entre l'Europe d'un côté, les Etats-Unis et la Russie de l'autre. En effet, la Maison-Blanche souhaite avoir les mains libres dans sa lutte contre le terrorisme, alors que le Kremlin ne veut aucunement qu'il soit question des pratiques inadmissibles de ses troupes en Tchétchénie. Moscou a mis en garde contre toute tentative d'évoquer le conflit tchétchène à l'occasion de cette session. Washington pourrait être acculée par un projet de résolution que souhaitent présenter des pays d'Amérique latine, reconnaissant le “droit à la vérité” qui autoriserait des enquêtes sur les violations passées des Américains et les obligerait à offrir réparation aux victimes. Ceci étant, le rapport du département d'Etat US sur les droits de l'Homme dans le monde considéré jusque-là comme référence pour critiquer des pays, connus pour le peu de respect qu'ils accordent aux droits de l'Homme, mais néanmoins membres de la CDH, perdra certainement de sa crédibilité. Une chose est sûre, cette session ne dérogera pas à la règle avec en perspective une bataille entre les Occidentaux et le reste du monde. K. A.