Un groupe d'experts préconisent une évaluation étape en vue d'une plus grande efficacité dans les opérations de transfert de propriété. “Faut-il faire une halte en matière de privatisation ?” Pour certains des animateurs de la table ronde, organisée hier par le centre de presse d'El Moudjahid consacrée au processus de privatisations, à la stratégie industrielle et rôle de l'IGF, cette halte s'impose, “pour voir plus clair et revoir le dispositif”. M. Malek Serraï, consultant international, parle “de manque de transparence”, dans de tout le processus de privatisation, “de bureaucratie au niveau des SGP et de pression, de corruption”. M. Réda Amrani, consultant et expert en industrie, lui, évoque des problèmes “de gouvernance de la privatisation”. Il relève l'absence de politique claire dans ce domaine. “Nous sommes dans l'opacité”, souligne cet ancien cadre du secteur public, qui regrette la vente de certaines entreprises “juteuses”, les câbleries et les cimenteries aux étrangers. La privatisation, estime M. Amrani, “est érigée en dogme”. L'expert en industrie déplore l'inexistence “de marché de managers” et évoque l'omniprésence “d'un système partisan dans les nominations de managers”. M. Amrani affirme que le plan de soutien à la relance économique profite davantage aux entreprises étrangères. Pour preuve, alors que le BTP connaît une croissance, le chômage augmente et l'industrie enregistre une baisse de la croissance. M. Mohamed Ghernaout, commissaire aux comptes, est plutôt favorable au désengagement de l'Etat de la sphère de production. “Il faut privatiser”, plaide-t-il. Selon lui, le secteur public a englouti 60 milliards de dollars. Il coûte annuellement 5 milliards de dollars à l'Etat. “C'est l'équivalent de 500 000 logements”, indique-t-il. “Il faut privatiser au risque de voir le secteur industriel public disparaître”, insiste M. Ghernaout. Faisant le bilan des privatisations réalisées, le commissaire aux comptes parle de centaines opérations par an. Il relève 29 opérations de partenariat sur 417 opérations de privatisation. “Les investisseurs étrangers ne se bousculent pas bien que les conditions doivent les inciter à venir. Les Algériens vendent, peut-être, mal le processus de privatisation”, estime M. Ghernaout. Le commissaire aux comptes s'interroge “si le report de la privatisation du CPA et d'Algérie Télécom ainsi que le transfert des SGP à leur tutelle respective, n'est pas une pause dans les opérations de privatisation ?” Evoquant la stratégie industrielle, M. Mohamed Ghernaout relève l'exclusion du secteur privé. “Nous n'avons pas retenu les leçons des années 1970”, a-t-il dit. “Beaucoup d'argent a été injecté dans l'économie, pourtant la croissance est faible et le chômage est élevé”, constate M. Ghernaout. “Il faut construire des champions nationaux”, plaide M. Zaïm Bensaci, président du Conseil national consultatif de la petite et moyenne entreprises. M. Zaïm Bensaci a accueilli favorable la mesure relative à l'intervention de l'Inspection générale des finances (IGF) pour engager des missions de contrôle au sein des entreprises publiques économiques. “C'est une bonne chose”, souligne-t-il. Pour rappel, le Conseil des ministres a adopté le 27 février dernier un projet de loi complétant l'ordonnance n°01-04 du 20 août 2001 relative à l'organisation, la gestion et la privatisation des entreprises publiques économiques. Ce projet de loi a pour objet de donner un ancrage juridique au contrôle externe exercé par l'Inspection générale des finances (IGF) qui intervient à la demande des autorités habilitées pour engager des missions de contrôle au sein des entreprises publiques économiques. M. Mohamed Ghernaout ne partage pas l'opinion du président du Conseil national consultatif de la petite et moyenne entreprises. “L'IGF n'est pas qualifié pour faire le travail du commissaire aux comptes. Il ne peut pas certifier les comptes”, explique-t-il. “C'est un double emploi”, ajoute-t-il. Par ailleurs, M. Ghernaout estime que l'implication de l'IGF dans les opérations de privatisation “n'a pas lieu d'être”, précisant que cette intervention pose le problème de crédibilité de l'Etat. Le commissaire aux comptes craint que cette mesure induise “des blocages et des lenteurs”. M. R.