La spéculation effrénée des prix de l'aliment de bétail provoque immanquablement la fermeture en série des exploitations avicoles dans la wilaya d'Oran. C'est surtout l'aliment destiné à l'aviculture qui semble être le plus touché. “Lorsque les prix de l'aliment atteignent des courbes ascendantes et n'obéissent à aucun canevas normatif, nous pouvons dire sans risque de nous tromper que nous allons droit contre le mur.” Cette sentence péremptoire émane d'un aviculteur qui vient tout récemment de mettre la clé sous le paillasson. La coopérative qu'il dirigeait en association avec trois autres aviculteurs a croulé sous le poids des créances dues aux augmentations successives des prix de l'aliment des gallinacés. Les prix sont passés de 2689 DA le quintal en 2007 à 3 500 (parfois à 3 800) DA actuellement. Cette augmentation de l'ordre de 35% n'est pas faite pour encourager les aviculteurs. Des dizaines d'entre eux ont fermé leurs exploitations pour des raisons de surcoût. “En l'espace de deux ans, les prix ont atteint des pics qui ne nous permettent plus de réaliser des bénéfices sur le poulet d'élevage”, affirme pour sa part cet aviculteur implanté dans la région de Gdyel. Pour lui, comme pour l'ensemble des autres exploitants, les hausses des prix de l'aliment iront crescendo. Dans les localités de Misserghine, Boutlélis, Ayayda, Chehaïria, Gdyel et Mers El Hadjadj, plusieurs aviculteurs ont délaissé leur activité. Selon l'un d'eux, le kilo de poulet au détail pourrait atteindre allègrement les 380 DA, soit une perte sèche estimée à 40 DA sur un kilo de viande blanche au sortir de la coopérative. Les aviculteurs se plaignent aussi du paiement de la TVA (17%) qui vient se grever sur les dépenses de l'aliment. Selon nos interlocuteurs, les pertes occasionnées à la filière avicole qui s'élèvent à des milliards de centimes risquent de mettre au chômage 7 000 travailleurs. La wilaya d'Oran, qui enregistre un faible taux de production de viande blanche, court le risque de voir disparaître ses unités d'exploitation. “La majorité des aviculteurs de la wilaya font tourner leurs unités à 30 ou 40%”, affirment encore nos interlocuteurs. Pour un meilleur rendement et une disponibilité de viande blanche, les aviculteurs exigent la suppression de la TVA. Ils insistent également sur la nécessité de venir en aide aux aviculteurs qui paient à présent les conséquences de la crise de la filière avicole. “Nous souhaiterions une contribution active de la part de l'Etat. Les subventions seront les bienvenues pour sauver le secteur et préserver des milliers d'emplois”, ajoutent nos interlocuteurs. Les aviculteurs que nous avons rencontrés redoutent particulièrement les nouvelles taxes qui viendraient encore alourdir leur budget d'exploitation. Plusieurs d'entre eux se sont regroupés en coopératives pour mieux “affronter” les énormes frais d'exploitation. “Notre volonté de nous regrouper dans des coopératives n'a pas reçu d'écho favorable alors que nous étions disposés à faire des sacrifices pour éviter de mettre la clé sous le paillasson”, déplorent-ils. Ainsi, la lente agonie des aviculteurs aiguisera sans nulle doute l'appétit des spéculateurs et nourrira d'espoir les consommateurs, éternels dindons de la farce. K. REGUIEG-YSSAD