Robert Mugabe, président du Zimbabwe depuis vingt et un ans, devait passer sans surprise aux élections générales d'hier. La veille de ce scrutin, il devait encore assurer que de son vivant “jamais l'opposition n'arrivera au pouvoir” ! La question est : que peut-il ajouter de plus à son pays frappé depuis huit années d'une crise économico-sociale majeure ? Le pays a régressé dans tous les domaines. Auparavant, jardin vivrier de toute l'Afrique australe, y compris l'Afrique du Sud, le Zimbabwe vit la disette. Ses hôpitaux, ses écoles, son service public ne sont plus que des établissements fantomatiques. Plus de soins, plus de formation, des salaires de misère et des prix de produits alimentaires de base qui s'envolent toujours plus haut. Le quotidien des Zimbabwéens est un cauchemar. Le taux d'inflation annuel dépasse les 100 000 % et n'en finit pas de grimper. Pour avoir une idée du désastre, le Sunday Times, journal sud-africain est vendu, à Harare, la capitale, 10 millions de dollars zimbabwéens ! Harare qui était beaucoup plus avenante que Pretoria est une ville lugubre. Ses infrastructures touristiques sont tombées en désuétude, alors qu'avant la venue de Mugabe, Harare était la Suisse de la région. La crise ne date pas d'aujourd'hui. Voila dix années qu'elle s'est installée dans le pays et Mugabe n'a cessé de l'approfondir avec des initiatives des plus populistes comme l'affectation des fermes de blancs nationalisées et remises à sa clientèle politique qui mis à terre toute l'agriculture d'un pays pourtant généreusement doté par la nature. Le courant ne passant plus avec une population épuisée par des années de crise, Mugabe a alors employé la force contre tous ceux qui se dressaient sur son chemin. Tant et si bien que l'opposition a fini par disparaître. C'est ce qui explique que contrairement aux deux derniers scrutins, présidentiel en 2002, et législatif en 2005, il n'y a pas eu de violences dans le pays. La puissante Zanu, au pouvoir depuis plus de trente ans, s'est défaite de tous ses historiques et ses nouveaux éléments à la solde de Mugabe, contrôlent l'administration et l'économie, du moins ce qu'il en reste. Mugabe a évidemment concouru selon le mode démocratique en acceptant des candidats rivaux. Mais, quand bien même il a été crédité, selon un sondage indépendant, de 20 % des intentions de vote, face à son principal rival, l'ancien syndicaliste Morgan Tsvangirai, du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), qui, lui, arrivait en tête avec 28,3 %, sa victoire ne fait pas de doute. D'ailleurs, un autre sondage, celui-la officiel, publié vendredi par The Herald, quotidien gouvernemental, donnait le résultat qui sera annoncé : Mugabe l'emporterait dès le premier tour de scrutin avec 53 % des suffrages. Il est clair que la tricherie a joué à fond. Pour les organisations internationales de défense des droits de l'homme, tout était en place pour des fraudes électorales à grande échelle. Mugabe isolé sur la scène internationale et violemment condamné par les Occidentaux a concédé à la présence d'observateurs internationaux pour suivre le scrutin mais ils n'ont pas été autorisés à assister au dépouillement du scrutin. Les journalistes ont été également triés sur le volet. Quatre élections sont organisées le même jour : présidentielle, législatives, sénatoriales et locales ! Et, sous prétexte d'aider les électeurs, les policiers étaient dans les bureaux de vote ! D. B.