Le président zimbabwéen Robert Mugabe a accueilli à bras ouverts la première délégation de haut niveau de l'Union européenne à se rendre à Harare depuis sept ans, et il a assuré aux Européens que la mise en œuvre du partage du pouvoir s'effectuait bien dans son pays. Changement de ton ? Mugabe a grandement besoin de 10 milliards de dollars pour arrêter la descente aux enfers qu'il a fait faire à son pays et sauver autant se peut sa tête, lui, qui n'a pas voulu lâcher les rênes du pouvoir. Mugabe a laissé entendre clairement qu'il est mieux disposé à coopérer avec les pays occidentaux dont l'aide est cruciale pour relancer les investissements au Zimbabwe, alors que la veille, il fustigeait l'Europe et les Etats-Unis accusés d'impérialisme. La délégation de Bruxelles, actuellement sous présidence suédoise, devait aussi s'entretenir avec le Premier ministre et ex-opposant Morgan Tsvangirai. Mugabe et Tsvangirai ont formé au forceps et sous la pression de l'Afrique du Sud notamment, en février dernier, un zest de gouvernement d'union pour sortir de la crise politique née des élections de l'an dernier. Et la situation est toujours au rouge : Mugabe refusant de céder une partie de son pouvoir. Les Européens rechignent, de leur côté, à verser de l'aide sans les réformes politiques et économiques promises aux termes de la formule de partage du pouvoir. La mise en œuvre concrète de cet Accord politique global (GPA) se heurte à l'opposition de Mugabe, mauvais joueur pour ainsi dire. Celui-ci au pied du mur, avec en plus la catastrophe sanitaire, a fait part de sa disponibilité ! En dépit de ses sanctions qui frappent 200 personnalités et une quarantaine d'entreprises liées à Mugabe, l'UE demeure le principal bailleur de fonds du Zimbabwe, avec 572 millions d'euros versés au titre de l'aide humanitaire depuis 2002. Pour les Européens, le dossier est loin d'être clos. Gunilla Carlsson, ministre suédoise du Développement international, a indiqué que les droits de l'homme et la liberté de la presse avaient été abordés avec Mugabe et qu'il ne s'agit pas d'une séance de négociation mais de discussions préliminaires. Mugabe, qui a longtemps imputé le déclin économique du Zimbabwe à ses critiques occidentaux, a de nouveau réclamé la levée des sanctions visant Harare. “Elles font souffrir le peuple jusqu'au tréfonds”, a-t-il fait valoir, rejetant sa gestion patrimoniale des affaires de ce qui était la Suisse de l'Afrique. En bon autocrate, il n'est pas prêt de changer. Des journalistes lui ont demandé s'il envisagerait de se retirer, il a répondu dans un rire : “Vous posez une question sur un changement de régime ? Je suis encore jeune.” Mugabe a 84 ans et c'est avec le Libyen Kadhafi le “doyen” des chefs d'Etat africains.