Le départ de Mark Penn, stratège de sa campagne électorale, contraint Hillary Clinton à chercher un nouveau souffle face à son rival Barack Obama. L'ex-first lady doit bouger pour ne pas rater le rendez-vous crucial de Pennsylvanie le 22 avril, qui doit ouvrir la voie à la convention des démocrates et qui se tiendra en août. Ce n'est pas la première défection chez la sénatrice de New York, ni la première bourde. Mark Penn n'est pas n'importe qui, c'est son “gourou”, son “sherpa” et l'affaire ressemble et a tout l'air d'un conflit d'intérêts. Mark Penn a été surpris en flagrant délit de rendez-vous d'affaires avec l'ambassadeur de Colombie à Washington pour le compte de Burson-Marsteller, une société de communication dont il est le PDG. Une casserole, Bogota a signé un contrat de 300 000 dollars avec la firme de relations publiques pour faciliter l'accord bilatéral de libre-échange américano-colombien, dont le président Bush a annoncé, hier, la transmission au Congrès. Cela, au moment où Hillary s'efforce de rassurer les ouvriers de Pennsylvanie en lutte contre les délocalisations vers la Colombie ! L'affaire a été révélée la semaine dernière par le Wall Street Journal, alors que Hillary Clinton doit impérativement gagner la prochaine primaire pour préserver ses minces chances dans la course à l'investiture démocrate. Hillary Clinton confirme ainsi son opposition déclarée au projet d'accord colombien et son intention de réexaminer en partie l'accord de libre-échange nord-américain (Alena) entre les Etats-Unis, le Mexique et le Canada, négocié sous la présidence de son mari. Mais le départ d'un “gourou” déjà contesté pour la direction qu'il avait donnée à la campagne d'Hillary ravive les doutes sur les capacités présidentielles de l'ancienne première dame qui s'est débarrassée de plusieurs collaborateurs au fur et à mesure de la montée en puissance d'Obama. En février, elle devait remplacer sa directrice de campagne, une proche de Mark Penn, Patti Solis Doyle. Le changement correspondait à un constat d'échec : le super mardi n'avait pas permis à Hillary de distancer Obama comme prévu. La stratégie était à revoir, mais Mark Penn, qui avait gagné la confiance des Clinton lors de la présidentielle de 1996, était toujours là, alimentant les rumeurs de tiraillements internes. La nouvelle directrice de campagne, Maggie Williams, a indiqué que le directeur de la communication Howard Wolfson et Geoff Garin, conseiller d'Hillary dans sa campagne sénatoriale en 2000, coordonneront désormais l'équipe chargée du message stratégique de la campagne. Garin hérite des responsabilités retirées à Penn et a pour tâche de mettre de l'ordre et de la cohérence dans une campagne qui, jusqu'ici, n'a fait que bafouiller, donnant un avantage à Obama en nombre de voix et de délégués. Mme Clinton n'a pas été servie par ses conseillers puisqu'elle n'a pas arrêté de donner d'elle une image de candidate froide, alors que son rival caracole sur des sentiments et sa volonté de changer l'Amérique. Elle a même été enfoncée par Penn qui, pour enrayer l'avance d'Obama, lui avait préconisé des attaques sur l'inexpérience du candidat de couleur, une tactique qui n'a pas fait l'unanimité chez les jeunes militants démocrates. Il reste que Mme Clinton bénéficie du soutien des cadres de l'appareil démocratiques. Le jeu est encore ouvert pour elle. D. B.