L'association des zaouïas, l'autre, pas celle qui avait le monopole du soutien à la candidature de Bouteflika, a fini par tenir son congrès. Il paraît que l'association, qui faillit être “autonome”, a failli aussi subir le sort des syndicats autonomes et voir son existence réfutée par les autorités. Puis tout rentra dans l'ordre et le congrès fut ! Congrès à l'issue duquel le président reconduit de l'Unza proclama que les résultats de ces assises ne seront remis à personne d'autre que le président de la République. Les autres, ministres et Premier ministre, se justifia-t-il, ont des connotations partisanes, insinuant que la présidence de la République serait une institution politiquement neutre. Peut-être parce qu'elle dispose de l'obédience de tous ces partis dont l'association bis des zaouïas veut éviter le parrainage. Les zaouïas ont probablement toujours constitué des acteurs de la vie publique, servant de fonds communautaires à des clans et des ambitions politiques d'extraction locale. C'est au cours de la campagne pour la présidentielle d'avril 2004 que, pour la première fois, elles furent sollicitées comme collectifs agissant dans un contexte électoral et sommées de se prononcer pour un candidat et un programme. Un programme présidentiel qui, dans le contexte constitutionnel marqué par la soumission du législatif à l'emprise effective de l'exécutif, constitue aussi le programme du gouvernement. On savait déjà le pouvoir de pression de quelques grandes confréries, d'envergure transnationale pour certaines. Mais, pour la première fois, les zaouïas, dont le mode de financement obéissant à des règles coutumières et informelles dépendait de leurs affiliés, se trouvent associées au système d'allocations politiques de la rente nationale. La démarche portait en elle le risque de voir les paroisses oubliées se manifester d'une manière ou d'une autre. L'engagement politique des zaouïas devait se démocratiser. D'une part, l'idée de pousser les centres d'influence spirituelle et rituelle dans l'arène de la compétition politique n'est peut-être pas la meilleure façon de former le citoyen républicain autonome ; d'autre part, une fois compromises dans les rivalités de pouvoir, les zaouïas peuvent perdre la capacité de jouer leur précieux rôle de stabilisateur social. Au dernier congrès de l'UGTA, il fut question de l'intervention présidentielle pour que les assises du syndicat officiel s'achèvent dans la norme. De plus en plus, l'issue des évènements qui font la vie publique tend à dépendre de l'arbitrage présidentiel. D'un côté, pour se prémunir de toute remise en cause, les acteurs sociaux et politiques se disputent le privilège du dialogue direct avec le Président. De l'autre, la présidence trouve peut-être des vertus, en termes de pouvoir ou en termes d'efficacité, à cette omniprésence. C'est cette évolution qui a fait dire au président de l'Unza qu'il ne remettrait son projet de “statut du taleb” ni au Premier ministre ni au ministre, mais au seul président de la République. Le danger de cette pratique est qu'elle présente le risque de vider les institutions concernées des prérogatives qui font leur substance et de réduire la république à une présidence submergée de sollicitations. M. H. [email protected]