Les cabinets d'avocats français installés en Algérie sont sommés de quitter le pays. C'est la “sentence” prise (dans une discrétion totale), il y a déjà quelques jours, par le bâtonnât d'Alger. Des sources proches du conseil de l'Ordre d'Alger nous ont affirmé qu'une réunion s'était déroulée mercredi dernier au tribunal Abane-Ramdane dans la précipitation et avec comme ordre du jour une seule question : la situation des cabinets des avocats français. Le bâtonnier d'Alger, en l'occurrence Me Sellini, aurait pris attache avec les cabinets “incriminés” pour leur demander de se conformer à la réglementation : une autorisation du bâtonnat pour pouvoir activer. Nos sources ajoutent qu'ils se sont contentés, jusqu'à maintenant, d'obtenir des registres du commerce pour activer. Au nombre d'une douzaine environ, la plupart de ces cabinets sont spécialisés dans le droit des affaires. Joint hier par téléphone, le bâtonnier d'Alger, Me Sellini, nous a confirmé l'information, tout en évitant de trop s'étaler sur le sujet. “Effectivement, nous avons demandé à ces cabinets de cesser leur activité jusqu'à la régularisation de leur situation. Ici ce n'est pas la jungle.” Et il a essayé de nous expliquer que c'est “juste” une application du principe de la réciprocité en ajoutant : “Lorsque ça va changer de leur part, à ce moment-là on pourra appliquer la même chose.” Il ne nous donnera pas plus de détails. En voulant en savoir plus, le bâtonnier s'est montré irrité et nous a répondu sèchement : “Vous n'êtes pas un juge d'instruction pour que je vous réponde.” En insistant, il a repris la même “formule” avant de nous… raccrocher au nez. Une réaction qui en dit long sur la délicatesse de cette affaire. C'est que ce “réveil tardif” sur la situation irrégulière de ces cabinets qui activent au vu et au su de tout le monde depuis (pour certains) presque deux années ne peut être une simple coïncidence avec l'affaire qui a ébranlé dernièrement les robes noires. Il s'agit, évidement, du scandale à propos du trafic de visas ayant éclaboussé dernièrement les bâtonnats de Blida et d'Alger. Pour rappel, les services du consulat de France à Alger avaient découvert dans les dossiers de demandes de visa des avocats et de leurs épouses de faux actes de mariage. Une vingtaine de cas (au moins) avaient été ainsi dévoilés et une plainte a été déposée contre l'ancien secrétaire du barreau de Blida. Ce dernier a été présenté devant le parquet, en compagnie du secrétaire du barreau d'Alger, et a été entendu par le procureur de la République au début de ce mois de mai au tribunal de Blida. Son passeport lui avait été retiré et l'affaire a été ensuite renvoyée aux services de police pour “enquête”. Devant l'étendue de ce trafic (et dont les rebondissements risquent d'éclabousser plus d'un), le consulat de France avait décidé de bloquer la valise des avocats dans laquelle sont déposés les dossiers de demandes de visa. Une décision très mal perçue par les robes noires. Ainsi, la relation de cause à effet entre la décision du consulat et la réaction du bâtonnat est trop évidente. Reste à savoir quelles en seront les conséquences et d'autres rebondissements sont d'ores et déjà attendus. Wait and see. Salim Koudil