Alger accueillera les 5 et 6 juin prochains la 15e Conférence des ministres des Affaires étrangères de 11 pays du bassin méditerranéen que sont l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, l'Egypte, la France, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, le Portugal, Malte et la Turquie. La Libye et la Slovénie, respectivement présidentes de l'UMA et de l'UE, seront les invitées d'honneur du Forum méditerranéen qui se tiendra à l'hôtel Sheraton, au Club-des-Pins. La rencontre sera consacrée au thème récurrent relatif à la situation de l'espace méditerranéen, en particulier au Moyen-Orient et fait nouveau, au projet d'Union pour la Méditerranée (UPM). Cadre informel de concertation et de réflexion existant depuis 1994, le Forum méditerranéen veut apparemment saisir l'occasion de la rencontre d'Alger pour poursuivre la discussion, sinon approfondir la réflexion sur l'UPM. Une proposition émanant, pour rappel, du président français, Nicolas Sarkozy, qui a été réaménagée, puis adoptée depuis peu par l'UE, laquelle a décidé de la placer au rang de prolongement du processus euroméditerranéen de Barcelone (initié en1995). Les discussions autour de ce thème semblent se justifier, si l'on se réfère à la tenue, le 13 juillet 2008, du sommet de Paris, qui a fait le pari de réunir les chefs d'Etat et de gouvernement des pays de la future Union pour la Méditerranée, y compris les représentants d'Israël, en vue de l'avaliser. Les réserves de l'Algérie Le 28 mai dernier, le ministre des Affaires étrangères, M. Medelci, a exprimé les réserves de l'Algérie par rapport au projet d'Union pour la Méditerranée. Selon lui, “beaucoup de choses (restent) à éclaircir encore” et il faudrait “des mois pour pouvoir rendre le projet plus clair”. Actuellement, même si certaines sources relèvent avec force que “l'Algérie demeure attachée au processus de Barcelone” et laissent entendre que “l'UPM est vue comme un plus”, il est difficile d'imaginer, ne serait-ce que dans l'immédiat, une association entre l'Algérie et Israël avec qui elle n'entretient aucune relation diplomatique. De plus, l'Etat hébreu continue de commettre des massacres en Palestine et d'élargir ses colonies, en déniant le droit au peuple palestinien de fonder un Etat indépendant, conforme à la légalité internationale. À ce propos, rappelons qu'en février, Alain Leroy, ambassadeur de l'Elysée, chargé du projet d'UM, a lui-même reconnu, devant la Commission des affaires étrangères de l'Assemblée française, que la participation d'Israël au nouveau projet méditerranéen “pourrait conduire l'Algérie à ne pas participer”. La question du Sahara occidental Sur un autre plan, le sommet de Paris pourrait conforter le voisin marocain qui, en dépit des résolutions de l'ONU et de l'Union africaine, poursuit son occupation dans les “territoires non autonomes” du Sahara occidental et ses violations aux droits de l'Homme. Surtout que la France affiche son alignement inconditionnel aux thèses du royaume, au détriment du droit à l'autodétermination des Sahraouis et de ses relations avec Alger. Selon des sources, le président Bouteflika aurait signifié à son homologue français ses réserves vis-à-vis du sommet de juillet. La divergence étant de principe, le refus de l'Algérie d'être représentée au niveau du chef de l'Etat aurait été réitéré, lors de la dernière visite à Alger du chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner. Tant que le président de la République n'a toujours pas annoncé sa décision de participer ou pas au prochain sommet, on est tenté de dire que la prochaine visite du Premier ministre français, François Fillon, prévue les 21 et 22 juin prochains dans notre pays, n'apporterait pas de grandes modifications, quant à la décision de la représentation de l'Algérie. Il faut espérer que la réunion prochaine du Forum méditerranéen apporte de nouveaux éléments et éclairages sur le projet lancé par le président Sarkozy. Par sa flexibilité, ce Forum représente un cadre privilégié qui offre une marge de manœuvres en comparaison avec le processus de Barcelone. Un cadre qui se distingue ou qui complète les autres initiatives destinées à l'espace méditerranéen, à l'exemple du processus de Barcelone, du dialogue 5+5 et de la politique de voisinage de l'UE. Pour ce qui est de l'Union pour la Méditerranée, outre le fait qu'elle risque d'être confrontée aux mêmes problèmes, économiques et politiques, elle est loin de constituer un projet commun qui place les pays du Nord et du Sud sur un même plan d'égalité. C'est avant tout un projet résultant d'un accord négocié entre pays européens, qui serait contrôlé de près par les instances européennes. À partir de là, la maturation des échanges et de la réflexion s'avère cruciale, quand on sait que le succès de l'UPM passe nécessairement par la création d'un climat de confiance et la levée des malentendus. Des gestes concrets sont également attendus en guise bonne volonté. H. Ameyar