À la veille du procès qui s'ouvre aujourd'hui au tribunal de Tizi Ouzou pour traiter l'affaire de l'assassinat de Matoub Lounès, la sœur de celui-ci, Malika Matoub, a animé hier une conférence de presse durant laquelle elle s'est longuement étalée sur les irrégularités qu'elle dit avoir constatées dans la procédure pénale. “Nous avons assisté depuis 1998 à une procédure pénale totalement bafouée, de l'enquête préliminaire jusqu'à la cassation”, a déclaré d'emblée la sœur du Rebelle tout en expliquant que “cette enquête préliminaire de la Police judiciaire se résume à l'enregistrement des séances de passage à tabac dans les locaux de la police militaire” et que “les témoignages des repentis présentés comme des témoins à charge ont constitué la pièce à conviction maîtresse du juge d'instruction”. Continuant de décortiquer l'affaire dans son fond, Malika Matoub dira que “l'instruction s'est limitée à reprendre les accusations du PV de la police anti-terroriste” ; ce qui permet aujourd'hui, a-t-elle ajouté, de dire que “nous avons entre les mains un dossier assez éloquent d'une parodie d'enquête”. Abordant la question de forme, Malika a exhibé un document établi par un huissier de justice confirmant que les membres de la famille Matoub n'ont reçu la convocation de la justice que le 7 juillet, alors que le procès s'ouvre aujourd'hui le 9 juillet, et pis encore, elle a révélé que la date du procès a été pourtant fixée, il y a six semaines, soit bien avant leur rencontre avec le procureur général le 24 juin dernier. Et cela n'est pas sans porter préjudice puisque, expliquera-t-elle, en se rapprochant du secrétariat du procureur pour déposer une liste de cinquante témoins dont la convocation est jugée utile, les représentants du parquet ont signifié aux membres de la famille Matoub que les délais sont dépassés. “Ceci veut dire que le procès aura lieu sans tenir compte de toutes nos doléances, et que le dossier qui patientait depuis mai 2001 est le même qui est réintroduit tel qu'il a été élaboré dès le départ pour le boucler définitivement à 43° à l'ombre”, dira-t-elle. Interrogée sur les enjeux de la tenue de ce procès rien que maintenant puisque aucun élément nouveau n'est ajouté au dossier, Malika se contentera de répondre que “de toute manière, je refuse et je refuserai toujours que le procès de Lounès se transforme en un tremplin politique”. En tout cas, à travers les déclarations de la conférencière, l'inquiétude et le pessimisme de la famille Matoub, et ce, en dépit des assurances données par le procureur général le 24 juin dernier, sont toujours profondes. Des informations non confirmées font déjà état d'un éventuel report du procès pour permettre d'introduire les doléances de la famille et surtout la convocation de tous les témoins, y compris de nombreuses personnalités politiques, que la famille aurait aimé qu'ils soient entendus. Samir LESLOUS