En cette matinée déjà caniculaire de juillet, il y a beaucoup de monde sous la toiture brûlante de chaleur à l'aéroport international Rabah-Bitat de Annaba. L'espace alloué aux passagers s'avère trop exigu pour accueillir tout le monde qui attend le vol en provenance de Marseille. Un vol qui accuse, faut-il s'en étonner, un retard de près de deux heures ce qui n'est pas pour arranger les choses pour ces pères de famille qui dévorent des yeux les écrans télé faisant office d'indicateurs. Aucun dispositif d'information (humain, faute de technologie) n'est prévu pour informer les passagers sur la situation. Karima, 28 ans, en partance pour Paris mais qui a choisi de transiter par la capitale phocéenne par le vol de 9h25, est une jeune voyageuse bônoise au bord de la crise de nerfs. “Il est vraiment temps que Annaba ait un vrai aéroport. Nous manquons de vols directs et il n'y a pas assez de place à l'aérogare Rabah-Bitat”, constate la jeune femme. Et d'ajouter : “C'est bien simple, la dernière fois que je me suis envolée pour Marseille, c'était en août 2007, j'ai eu un malaise et il a fallu qu'on m'emmène à l'infirmerie tellement l'espace était bondé. Et s'il faut emprunter le bateau pour voyager, ça ne vaut vraiment pas le coup, il paraît que c'est pire par temps chaud…” L'absence de climatisation et l'aspect repoussant de la salle d'attente qu'on a certainement voulu relooker sans succès ajoutent au malaise ambiant, et la tension gagne cette foule compacte. Un homme d'un certain âge ne rate pas l'occasion d'exprimer son ras-le-bol. “Vous savez, peut-être que la compagnie aérienne nous fait payer 400 DA une taxe d'aéroport pour enfin de compte nous offrir un service pareil. Pas de clim, ni d'eau aux toilettes et en prime des mouches et des moustiques”, s'offusque-t-il avant de dénoncer : “Remarquez tout l'espace qui a été réservé aux bureaux administratifs des douanes, de la police et des opérations des compagnies Air Algérie et Aigle Azur. Il ne reste pratiquement plus de place pour les usagers.” Il est presque 10h30 lorsque le bruit assourdissant des réacteurs se fait enfin entendre et que l'avion tant attendu se pose sur le tarmac. Un ouf de soulagement est poussé presque à l'unisson par de nombreuses personnes assises à côté de moi dans la salle d'attente des départs. Pour ces braves gens cela signifie qu'ils ne vont pas tarder à monter à bord, juste le temps que l'on nettoie la cabine de l'avion et qu'on fasse le plein de kérosène. De l'autre côté des guichets verticaux, le visage ruisselant de sueur et chargés de “bagages à main”, les voyageurs venant de Marseille débarquent du bus et passent le contrôle de la police des frontières à un rythme un tantinet trop lent. Les hommes en bleu sensibilisés sur les conditions d'accueil à offrir aux émigrés en vacances se veulent aimables, mais ils se laissent gagner de temps à autre par la colère, surtout lorsque quelqu'un tente de griller la file d'attente ou ne présente pas assez vite le document qui lui est demandé. Les formalités s'effectuent dans un immense brouhaha. Cette procédure accomplie, les voyageurs se ruent vers le tapis roulant pour récupérer les bagages lourds avant de se plier à un autre contrôle tout aussi contraignant : celui des douanes, car à ce stade, l'attente est interminable. “Ce n'est pas croyable, il leur faut tout ce temps pour acheminer nos valises alors qu'il n'y a qu'un seul avion !”, lance l'un d'entre eux. Le tapis roulant date d'une autre époque et n'est pas du tout conforme à une aérogare qui accueille quelque 2 200 passagers par semaine entre arrivées et départs. Après cette ultime étape, c'est l'heure des retrouvailles, des youyous et des embrassades. Nos émigrés renouent enfin avec les petites joies en allant à la rencontre de ceux et celles qu'ils ont languis pendant de longues années, pour la plupart. A. Allia