Les premiers arrivent généralement au mois de juin, la plus grande majorité au mois de juillet. Ce sont des milliers d'émigrés ou encore des binationaux qui rentrent au pays pour les vacances. Leurs billets d'avion leur coûtent plus de 2 000 euros. Stabilité du pays, relance économique, diminution de la violence islamiste, amélioration des conditions d'accueil… Jamais les Algériens de l'étranger n'ont eu autant de raisons de rentrer au pays pour les vacances. Et ils ne s'en privent pas. Très majoritairement établis en France, les Algériens d'outre-mer se heurtent pourtant à d'énormes difficultés pour trouver une place dans les dizaines d'appareils qui assurent les liaisons avec les huit aéroports internationaux que compte l'Algérie. Le ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté nationale à l'étranger, M. Djamel Ould-Abbès, estime recevoir près de 900 000 vacanciers pour cette saison. Rien que pour la journée de lundi, près de 35 000 émigrés ont été recensés par les compagnies aériennes desservant la capitale à partir de Paris, Lyon, Marseille. Air Algérie, la compagnie nationale, se taille la part du lion sur ce marché, mais deux autres compagnies, Air France et Aigle Azur, font également le plein de voyageurs. Il est 11h, en ce 7 juillet. L'aéroport international Houari-Boumediene ne désemplit pas. Des groupes se forment devant les écrans indiquant l'arrivée des vols. À quelques minutes d'intervalle, deux grands avions archicombles vont se poser sur la piste. Ils ramènent les estivants parisiens qui vont passer leurs vacances “au bled”. Après plus d'une demi-heure de formalité au niveau de la Police des frontières et la récupération des bagages, ils sortent enfin. Les chariots bourrés de bagages, les bras surchargés de cadeaux, la frénésie des émigrés algériens est légendaire. Un sourire éclaire le visage de Samia. Elle est arrivée enfin. “Je l'ai eu ce foutu billet d'avion !” Combien de fois a-t-elle franchi la porte de l'agence de voyages ? Combien de fois en est-elle ressortie bredouille ? Cela fait des mois qu'elle rêve de ses vacances en Algérie, alors que son époux et ses deux enfants sont déjà à Alger depuis dix jours. Elle est restée bloquée à cause des dates qui ne l'arrangeaient pas. Elle jubile à l'idée de retrouver sa mère et ses frères qui vivent en Kabylie et revoir son village natal. Pourtant, la partie n'est pas encore gagnée. Son billet en poche, elle devra de nouveau pointer au siège d'Air Algérie pour confirmer son retour où elle embarquera pour Paris. La corvée en reviendra à son époux. “Nous avons travaillé toute l'année pour pouvoir nous payer ces vacances. Cela nous a coûté 2 700 euros rien que pour les billets. Sans parler de la réservation faite au mois d'avril et les longues files d'attente à l'agence de la compagnie nationale à Paris et la non-satisfaction des dates de retour. Nous rentrons le 2 septembre à la maison et les enfants vont rater deux jours de cours”, explique Nadjema. Originaire de Draâ El-Mizan, elle va passer la totalité de ses vacances dans son village natal avec quelques virées en mer à Béjaïa ou encore Azeffoun. Tous les témoignages recueillis sur le tas se rejoignent : le blocus sur les réservations exercé par la compagnie, la cherté des billets d'avion, les retards enregistrés lors des départs… “Alors que les autres compagnies permettent d'acheter les billets n'importe quand, Air Algérie exerce un blocus jusqu'au mois de juin pour les vacances d'été”, se plaint Assia. Elle ne nie pas que de grands efforts ont été faits pour améliorer la qualité de la prestation de services mais, selon elle, il faut en faire encore, notamment sur la gestion de la billetterie et les tarifs. La compagnie nationale a enregistré, ce lundi-là, des retards sur certains vols en provenance de Paris, Damas et Dubaï qui se sont répercutés sur les voyageurs qui devaient effectuer des correspondances sur des vols domestiques. En effet, il s'agit de quelques familles qui ont raté leurs vols sur Oran et Constantine. La compagnie Air Algérie les a pris en charge jusqu'à leur embarquement sur d'autres avions. Les charges de ce retard sont, évidemment, aux frais de la compagnie aérienne. Au-delà de tout cela, les chefs d'escale de plusieurs compagnies aériennes, rencontrés à l'aéroport, expliquent que les retards ne dépendent pas des compagnies mais également de la tour de contrôle, d'autorisation de vol et du trafic aérien. Ils se plaignent également des voyageurs non ponctuels lors des embarquements, d'ailleurs ils appréhendent le retour des congés au mois d'août qui coïncide avec les départs vers omra. En dépit de tout cela, la saison estivale de cette année a accusé un certain retard et une baisse d'arrivées de nos compatriotes installés à l'étranger, comparé aux deux dernières années. Ils relient cette baisse à la cherté de leur séjour dans leur pays. Les dépenses du congé leur coûtent pas moins de 3 500 euros y compris les billets d'avion. Pour ceux qui viennent par bateau, ils ne dépensent pas autant, mais cela reste quand même, selon eux, toujours aussi coûteux de rentrer au pays. Nabila Afroun