La précision apportée mardi par le Chef du gouvernement au sujet de la réunion avec les patrons de la gendarmerie et de la police, la semaine dernière, signifie que la question de l'ordre public est prioritaire. Ahmed Ouyahia a évoqué, mardi, en marge de la Fête annuelle de la police à El-Hamiz, la réunion qu'il avait tenue la semaine dernière avec les deux premiers responsables de la gendarmerie et de la police, Ahmed Bousteïla et Ali Tounsi. Le propos du Chef du gouvernement sonne plutôt comme une précision, indispensable de son point de vue, par rapport aux informations de la presse sur le contenu de cette réunion. “Nous avons évoqué lors de la réunion la question des troubles à l'ordre public”, a-t-il expliqué, démentant de même qu'un autre point, en l'occurrence celui lié à la situation sécuritaire, n'ait été abordé lors de ce conclave à trois. M. Ouyahia le dit d'ailleurs de façon explicite, “lorsqu'il y aura une réunion sur la situation sécuritaire, vous en serez informés”, a-t-il insisté. Ce qui veut dire que sur le front sécuritaire et en dépit des tartarinades désespérées des irréductibles du GSPC, la situation est bien tenue en main par les forces de sécurité chargées de la lutte antiterroriste. Voilà qui a le mérite de recadrer la perspective par rapport à cette importante réunion qui a porté exclusivement sur la question de l'ordre public. Et ce n'est pas du tout un simple hasard d'agenda, mais sans vraisemblablement sa tenue correspond à une situation d'urgence. Comme vient de nous le rappeler opportunément la nouvelle surchauffe au niveau de la localité de Berriane, qui a connu encore mardi de nouveaux affrontements, heureusement vite circonscrits, entre les deux communautés qui y vivent. Mais le cas Berriane, parce qu'il polarise l'intérêt des médias, n'est que la partie visible d'un phénomène qui a tendance à s'inscrire à la fois dans le temps et dans l'espace. Rien que pour le mois de juillet, des atteintes à l'ordre public sont enregistrées dans différentes régions du pays. À Ben Aknoun, c'est la liste des bénéficiaires des logements qui est contestée par les non bénéficiaires ; à Bouira, ce sont les producteurs de pomme de terre qui ont bloqué l'autoroute Est-Ouest au niveau de la localité de Lakhdaria, en raison de leur colère, les propriétaires des chambres froides qui leur font du chantage. Avant-hier à Sidi-Al-Moussa, dans la wilaya de Tizi Ouzou, les habitants de cette localité se sont donné rendez-vous devant le siège de l'APC pour dire leur ras-le-bol devant l'incurie des élus dont les soucis ne sont pas visiblement ceux du petit citoyen de la commune, en proie quotidiennement aux coupures d'eau, d'électricité et du transport. N'oublions pas aussi, la semaine des émeutes vécues au mois de juin par la ville d'Oran livrée à un déchaînement de violences sans précédent de la part de jeunes qui ont trouvé dans la rétrogradation du club phare de la ville le catalyseur idoine pour mettre à sac la ville. C'est sans doute la multiplication de ces convulsions sociales hiératiques, se chiffrant souvent en milliards de dinars de dégâts, qui ont dû faire “tilt” chez M. Ouyahia pour l'amener à programmer une réunion frappée du sceau de l'urgence sur l'ordre public. Si rien n'a filtré sur les résolutions prises au terme de cette réunion entre Ahmed Ouyahia et les deux responsables des forces opérationnelles chargées de la sécurité publique, on devine aisément qu'il s'est agi d'apporter les réglages indispensables pour que l'ordre public, si impératif à tout processus de développement économique, ne fasse plus les frais des tensions sociales latentes. C'est certainement sur le terrain que ces réglages seront visibles dans les prochains jours. Cela étant, la situation est loin d'être catastrophique. “Des progrès concrets ont été réalisés dans le domaine de l'ordre public”, précisant que “le taux de criminalité en Algérie, actes terroristes compris, a diminué grâce à un travail organisé et au sacrifice des personnes qui étaient sur le terrain”, a répété mardi le patron de la police à El-Hamiz. Mais la sécurité n'est jamais de trop. Et c'est d'autant plus nécessaire, qu'après la période estivale, le pays va entrer dans une phase assez délicate, à savoir la concomitance de la rentrée sociale, la rentrée scolaire, avec le mois de Ramadhan. Et il faut compter aussi avec l'agenda politique et la probabilité d'une révision constitutionnelle. Autant de chantiers sur la feuille de route de Ahmed Ouyahia qui a besoin d'une paix sociale pour réussir le challenge pour lequel le président de la République a de nouveau fait appel à son expertise. N. Sebti