Les partisans du chef de l'?tat renversé, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, tentent de s'organiser, encouragés par des capitales occidentales qui se sont déclarées opposées à l'élection unilatérale promise par la junte militaire. Trop tard ! Les ambassadeurs de France, d'Allemagne, d'Espagne et des ?tats-Unis, ainsi que le délégué de la Commission européenne et le représentant du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) à Nouakchott ont, après avoir rencontré ensemble le général Mohamed Ould Abdel Aziz qui dirige la junte, exprimé leur rejet “de l'organisation d'une élection unilatérale qui, de ce fait, serait considérée illégitime”. Cependant, ce n'est pas la rupture totale, les représentants des six pays ayant incité le nouvel homme fort de la Mauritanie à nouer un dialogue nationale et avec la communauté internationale “pour éviter à la Mauritanie de se voir isolée”. De leur côté, les envoyés spéciaux de la Ligue arabe, de l'ONU et de l'Union africaine n'ont pas fait de déclaration commune, contrairement aux Occidentaux. Ils ont, en outre, parlé chacun en tête à tête avec le chef de la junte. L'annonce de l'UA, qui avait annoncé qu'elle allait suspendre la Mauritanie de son organisation jusqu'à ce que le pays retrouve un gouvernement constitutionnel, est restée sans suite. La Tanzanie, qui assure la présidence de l'UA, a-t-elle parlé dans la précipitation et sans consulter les autres membres de l'organisation ? On a vu la position de l'UA dans les élections du Zimbabwe. Les pairs de Mugabe n'avaient pas condamné son coup de force électoral, ils l'avaient accueilli au sommet de Charm el-Cheikh pour juste l'encourager à dialoguer avec son opposition. Dans le cas de la Mauritanie, les chefs d'?tats africains doivent compter avec la position de la Ligue arabe qui fonctionne encore comme un syndicat de chefs d'?tat. Le général Ould Abdel Aziz, à la tête d'un Haut conseil d'?tat exclusivement composé de militaires, doit, en principe, adopter dans le courant de la semaine une “ordonnance constitutionnelle” organisant de “façon collégiale” les fonctions du président renversé et nommer un gouvernement que dirigera le général en personne. Les militaires mauritaniens qui, en réalité, ont toujours été aux avant-postes du pouvoir, pour ne pas dire le pouvoir, dans ce pays promis à devenir riche avec ses gisements pétroliers, tentent de leur côté de rassurer les voisins de la Mauritanie. Le général a reçu les ambassadeurs du Maroc, de l'Algérie, du Sénégal et de Gambie, ainsi que les représentants de partenaires économiques importants, tels le Qatar, les ?mirats arabes unis et la Chine, selon une source proche de la junte. De leur côté, les partisans du président renversé tentent de s'organiser après avoir programmé un meeting à Nouakchott contre le coup d'?tat mais dont la dispersion par les forces de l'ordre a été facilitée par la poignet de manifestants, dont des ministres et quelques députés. Si le président de l'Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheïr, dirigeant de l'Alliance populaire et progressiste qui compte cinq députés et trois ministres, a solennellement déclaré ne reconnaître comme seul dépositaire légitime du pouvoir exécutif que le président de la République élu, actuellement gardé dans une villa en résidence surveillée, il a été vite décrié par ses pairs. En effet, tout de suite après la déclaration d'Ould Boulkheïr, la grande majorité des députés mauritaniens, 67 sur 95, a rejeté, dans un texte commun, les déclarations de leur président, jugeant qu'elles n'expriment que “son opinion personnelle et non pas celle du président de l'Assemblée nationale”. La première manche a donc été remportée par les militaires qui sont maîtres du jeu. Quant aux Occidentaux, ils feront avec dès lors que la Mauritanie n'est plus un îlot de sable. La junte a toutefois lâché du lest. Le Premier ministre mauritanien, Yahya Ould Ahmed Waghf, a été libéré ainsi que trois autres personnalités arrêtées durant le coup d'?tat. L'ex-président restait lui en résidence surveillé. D. B.