Trois ministres ont fait le déplacement, hier, au siège de l'Agence algérienne des exportations (Algex) pour parler d'une même voix : il y a abondance des produits de large consommation, donc pas de raisons pour une hausse des prix. Le gouvernement s'est mobilisé pour prendre en charge l'arrivée du mois de Ramadhan, avec tout ce que cela suppose comme hausse des prix des produits de large consommation, mais aussi l'aide destinée aux démunis. Trois ministres ont fait le déplacement, hier, au siège de l'Agence algérienne des exportations (Algex) pour parler d'une même voix : il y a abondance des produits de large consommation, donc pas de raisons pour une hausse des prix. Aux ministres du Commerce, de la Solidarité nationale et des Affaires religieuses, s'étaient joints les présidents des Chambres de l'agriculture et du commerce, ainsi que les secrétaires généraux de l'Union des commerçants et des paysans. La rencontre, qui a regroupé les directeurs régionaux et de wilaya du département du Commerce, s'est fixé comme objectif de débattre des mesures pratiques en vue d'encadrer le marché et de protéger le pouvoir d'achat. À l'ouverture de la rencontre, dont les travaux se sont déroulés à huis clos, le président de l'Union des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, a martelé que “les agriculteurs ne sont pas responsables de la commercialisation” et de pointer du doigt particulièrement les commerçants saisonniers qui influeraient sur la courbe des prix, tout en indiquant que la production est largement suffisante. Le ton est donné. Chaque partie essaye de rejeter la balle sur une autre. Ce à quoi le ministre du Commerce, El-Hachemi Djaâboub, a immédiatement rétorqué : “Pour nous, les commerçants saisonniers n'existent pas du moment qu'ils ne sont pas enregistrés au registre du commerce.” De son côté, Hadj Souilah, président de l'Union des commerçants et artisans (UGCAA), a estimé qu'au regard de l'abondance des produits de première nécessité, il n'y a aucune raison pour une flambée des prix, tout en indiquant que le prix du pain ordinaire ne sera pas augmenté, laissant la porte ouverte aux boulangers de se débrouiller avec les pains améliorés. Pour lui, le véritable souci demeure “le marché parallèle qui empêche que les prix actuels soient encore plus bas”. Il réitérera sa demande de faire bénéficier l'UGCAA des galeries et autres aswaks fermés, en vue de les réaménager et de les réserver aux revendeurs ambulants. El-Hachemi Djaâboub, qui répondait du tac au tac, précisera que le prix du pain, tout comme les autres produits soutenus par l'Etat (lait en sachet, carburant, farine), sera maintenu tel quel. Tout en promettant de débattre de la question des grandes surfaces fermées avec l'UGCAA, il a indiqué que le marché parallèle est du ressort de la force publique. “Je ne peux pas contrôler quelqu'un qui ne dispose pas de registre du commerce et qui utilise la voie publique pour vendre sa marchandise”, dira-t-il. Le président de la Chambre d'agriculture, Ould El-Hocine, évoquera, quant à lui, le surplus dans la viande ovine (plus de trois millions de têtes ovines). M. Djaâboub promet de trouver une solution urgente à cette question. En concertation avec le département des Affaires religieuses, la possibilité d'exporter ce surplus vers l'Arabie Saoudite pour la saison du hadj a été évoquée. Sinon, il sera procédé à l'abattage et au stockage de ce surplus afin de ne pas pénaliser les éleveurs. Pour sa part, Brahim Bendjaber, le président de la Chambre du commerce et de l'industrie (Caci), a salué la disposition contenue dans le projet de la loi de finances complémentaire relative à la baisse de la taxe sur les bénéfices pour les entreprises de production, estimant que cela influerait sur la productivité. Pour lui, la spéculation est dépendante de la disponibilité des produits de large consommation. À ce sujet, il posera le problème des entreprises de transformation de la tomate, qui n'arrivent plus à prendre en charge le surplus de la tomate industrielle. Il revendique un prix de soutien fixé par le gouvernement, à l'instar de la pomme de terre. Ce à quoi le ministre du Commerce a promis d'y réfléchir. Pour ce qui est du mois de Ramadhan, le ministère des Affaires religieuses a prévu de sensibiliser les citoyens, à travers des prêches qui seront lus ce vendredi à travers toutes les mosquées du pays, en vue d'inciter les citoyens consommateurs à modérer leurs ardeurs et à ne pas gaspiller. “Souvent, la nourriture est jetée dans les poubelles, alors qu'elle aurait fait le bonheur des familles dans le besoin”, fera remarquer Bouabdallah Ghoulamallah. Quant au ministre de la Solidarité nationale, la prise en charge des démunis sera poursuivie cette année, avec moins de restaurants et plus de couffins distribués aux familles, par souci, dit-il, de sauvegarder la dignité des familles. Le département de Djamel Ould-Abbès prévoit la distribution de 1,5 million de couffins durant le mois sacré, représentant quelque six millions de repas. Le ministre insistera sur le volume des transferts sociaux, qui ont atteint 890 milliards de dinars, soit 12,82% du PIB.Abondant dans le même sens, le ministre du Commerce a indiqué que le marché national est dominé à 90% par le secteur privé, le secteur public détenant le reste, notamment pour ce qui concerne la poudre de lait et le blé. Pour lui, le marché est alimenté en abondance et des surplus sont enregistrés dans plusieurs produits (viandes rouges, pomme de terre, oignon, pommes). Tout en affirmant s'attendre à un rush des consommateurs et à une hausse des prix durant la première semaine, il se montre confiant quant à la stabilité des prix et donne des chiffres comparatifs par rapport à la même période de l'année écoulée, qui démontrent que tous les prix ont baissé, sauf pour la salade qui a subi une hausse vertigineuse ces derniers temps (135 dinars le kilo), en raison des intempéries qui ont altéré la production sous-serre. Même s'il se défend de vouloir appeler au boycott ce produit, M. Djaâboub se demande “quelles sont les vertus de ce produit ? Qu'est-ce qui pousse les Algériens à l'acheter au prix fort ?” Le ministre rappellera les efforts fournis par le gouvernement en vue d'encourager la production de la viande ovine et de la viande blanche, notamment à travers la suppression de la TVA pour le maïs et le soja et l'interdiction temporaire (entre avril et août) de l'importation des viandes rouges. Mais le ministre reconnaît que l'action de son département sera limitée au contrôle des lieux de stockage, afin de lutter contre les stockages spéculatifs, le non-affichage des prix et l'entente illicite sur les prix. L'action du contrôle se limite aux commerçants légalement inscrits au registre du commerce. Une seule exception devrait être faite aux marchands de zalabia. Ces derniers devraient s'inscrire au registre du commerce, pour exercer cette activité saisonnière. Une tâche qui risque d'être vouée à l'échec en raison du fait qu'elle intervient juste à la veille du mois sacré et que les commerçants saisonniers, ou ceux qui changent souvent d'activité pendant le Ramadhan, ont déjà pris leurs dispositions et qu'ils n'ont pas été informés de cette mesure. Le ministre n'a pas manqué de pointer du doigt l'OAIC et l'Onil, en estimant que ces deux offices “ne doivent pas rester de simples centrales d'achat” et d'insister sur le fait que l'Algérie se doit d'assurer son autonomie alimentaire. Il estimera que pour le lait, les huiles alimentaires, cette autonomie est possible, et d'annoncer que dès l'installation du conseil national de la concurrence, aucun opérateur ne devrait avoir une position dominante sur le marché. La loi sur la concurrence limite, en effet, la part de marché de chaque opérateur à 40%. Azeddine Bensouiyeh