«Se rendre à Béjaïa, c'est aller à la rencontre d'un espace aux multiples dimensions avec une nature féérique, une histoire multiséculaire et une population chaleureuse et hospitalière.» C'est ainsi que vantait son secteur M. Tazibt face aux élus de la ville à la lecture de son rapport sur la saison estivale 2011. Le débat sur la vocation touristique de Béjaïa ne cesse d'être remis sur table, mais rejeté aux calendes grecques pour n'être rediscuté qu'à l'orée de chaque saison estivale. Une vocation avérée, reconnue, réduite en fait à une simple saison alors qu'elle peut activer toute l'année. Même si un débat académique et de spécialistes n'est pas encore engagé, les avis sont partagés sur le caractère de la ville des Hammadides. Une ville chantée et déchantée qui préfère d'abord épouser un caractère agricole, industriel mais pas touristique. Un caractère dont on ne voudrait pas la gratifier tout de go pour le mettre en veilleuse un peu comme cet hôtel El Khalifa qui domine la ville depuis deux décennies sans qu'il ne soit ni achevé, ni reversé vers un autre secteur !? Béjaïa est envoûtante, sa beauté est sublime ses arômes sont exquis et est considérée comme l'âme de la Kabylie, la perle du Maghreb, une capitale… Mais quand sortira-t-elle de ses rêves des mille et une nuits et rentrer de plain-pied dans cette bataille pour reconquérir son statut. Du tourisme pour tous les goûts Malgré ce caractère digne d'une côte à la niçoise, d'une montagne à la Suisse avec ses forêts féériques, Béjaïa n'arrive à drainer pour l'heure que des estivants. Des baigneurs en somme qui se comptent par millions, encombrent les 35 plages réparties sur 100 km de côtes, mais point de véritables touristes et d'investisseurs pour ce créneau porteur. Cent kilomètres de côtes pour seulement 35 places, c'est très peu. On parle d'en réhabiliter dix autres et même ainsi le nombre restera faible par rapport à l'immensité des sites balnéaires. Des sites dont la côte est restée encore vierge et peu fréquentée. Trois stations balnéaires, Sillal, El Kiria et Sidi Yahia, des sites favorables à un tourisme curatif qui sont dans un état parfois d'abandon et qui appelle à des aménagements. Un tourisme de campagne, de montagne avec des sites naturels, des constructions traditionnelles qui favorise le ressourcement, le repos, les randonnées, les sports extrêmes, de véritables activités récréatives de loisirs, de plongées… pratiquées du reste mais de façon timide et qui pourraient devenir des métiers. Le tourisme populaire domine ! Même si l'on ne peut la désigner sous cette appellation, Béjaïa reste une destination pour des touristes locaux qui viennent découvrir et redécouvrir ses espaces d'évasion. Ceux qui en mettent le cap aiment Béjaïa pour son camping (parfois non autorisée) ou pour d'autres qui aiment retrouver cette ville, cette houma (quartier) qui s'étend de la place Gueydon à la baie des Aiguiades, au Cap Carbon, à Gouraya. D'autres convoitent les camps de toile où le séjour en famille est abordable. Kefrida reste aussi une destination privilégiée mais exige des infrastructures d'accueil. Des campeurs sur la voie publique Le nombre impressionnant de visiteurs qui se rendent en été à Béjaïa ne peut être canalisé. Les plages interdites y sont convoitées avec force et l'on compte de nombreux noyés. Autre fléau, tous les espaces publics sont utilisés comme dortoirs, parcs, jardins, trottoirs… Le nombre de lits proposés à travers 17 hôtels, 59 camps de toiles, les centres de vacances sont à peine de 25.000, alors que les besoins s'évaluent à la puissance cent. Pas de tourisme… et peu d'artisanat ! Même pour les visiteurs venus parfois des villes voisines, la ville n'a que du pain et de l'eau à leur offrir… à des prix pharamineux. Quant aux produits du tourisme et de l'artisanat, ils sont hors de portée de ces «baigneurs», des produits sans label et non réclamés. Notre néo-touriste se contente du peu et n'exige nullement un confort, du reste absent pour l'heure à travers des plages qui restent loin des commodités exigées par l'absence de sanitaires, d'eau… de propreté tout court. A quand une carte touristique ? Le tourisme est encore en veilleuse à Béjaïa et l'absence d'une vision et d'une politique en ce sens confirme cette thèse. La ville a certes des prédispositions pour ce faire et dispose d'atouts, de rêves, mais reste loin de ce projet qui suppose visiteurs étrangers et rentrée de devises. La ville n'a pas de traditions dans le tourisme et d'opérateurs pour prendre en charge cette culture. Même en termes de formation, un centre de formation en tourisme à Aokas n'est pas pour demain. La carte touristique de la ville n'est pas du reste imprimée. B. M.-O.