Le général des Serbes de Bosnie, responsable du massacre de Srebrenica en 1995, était l'obstacle principal à la réintégration de la Serbie dans la communauté internationale. Il était un des derniers grands dirigeants serbes qui aient joué un rôle actif, et tragique, dans les guerres de Yougoslavie. Après la mort de Slobodan Milosevic, le président de Serbie, dans sa prison de Scheveningen (Pays-Bas) en 2006, l'arrestation de Radovan Karadzic, le président de la Republika Srpska (les Serbes de Bosnie) en 2008, le général Ratko Mladic, recherché par le Tribunal pénal international pour la Yougoslavie (TPIY), était l'obstacle principal à la réintégration de la Serbie dans la communauté internationale. Il ne reste que Goran Hadzic, président d'une éphémère république de Krajina, qui rassemblait les Serbes de Croatie au début des années 1990, qui soit encore recherché par le procureur international et la police serbe. Le président serbe, Boris Tadic, ne s'y est pas trompé en annonçant, jeudi 26 mai au matin, l'arrestation de Mladic : «Aujourd'hui, nous fermons un chapitre de l'histoire de notre région qui nous mènera à une pleine réconciliation». Et en direction de Bruxelles, il a ajouté : «Je suis convaincu que nous avons ouvert la porte vers le statut de candidat, les négociations et finalement l'adhésion à l'Union européenne». Catherine Ashton, la haute représentante de la politique extérieure de l'UE, a en effet salué une «étape importante pour la Serbie et la justice internationale». Accusé de crimes de guerre et génocide Ratko Mladic était en effet un obstacle de taille au rapprochement entre Belgrade et l'UE. Les Européens avaient fait de l'arrestation et du transfert au TPIY de l'ancien général une des conditions préalables à toute ouverture des négociations sur l'entrée de la Serbie. D'autres anciennes républiques de l'ex-Yougoslavie sont plus avancées sur le chemin de l'UE. La Croatie a pratiquement terminé les négociations d'adhésion. S'il n'y avait pas les réticences de certains Etats membres, dont la France hostile à tout nouvel élargissement, Zagreb pourrait être intégré en 2013. La Macédoine, pour sa part, restera candidate aussi longtemps qu'elle n'aura pas réglé sa querelle de nom avec la Grèce. Ratko Mladic aurait été arrêté quelque part en Serbie, mais d'autres sources font état d'une arrestation en Republika Srpska, une des trois entités qui fait officiellement partie de la Bosnie-Herzégovine mais cherche en réalité son autonomie. Né le 12 mars 1942 à Kalinovk, en Bosnie, il est promu général après des études à l'école militaire, dans les derniers mois d'existence de la Fédération yougoslave. Pendant la guerre de Bosnie (1992-1995), il se met au service de la Serbie et des Serbes de Bosnie qui se battent contre l'indépendance de cette république sous la houlette du président Ilya Izetbegovic, représentant de la communauté musulmane. Avec son mentor politique, Radovan Karadzic, dont le procès se poursuit devant le TPIY, Ratko Mladic dirige le siège de Sarajevo, la capitale de la Bosnie, de 1992 à 1995. Il est en outre accusé de crimes de guerre pour avoir pris des casques bleus en otages et s'en être servis comme des boucliers humains contre les bombardements de l'OTAN. Repentance Enfin, il est inculpé de génocide pour son rôle dans le massacre de Srebrenica. A partir du 12 juillet 1995, dans cette petite ville musulmane de Bosnie, les forces serbes qu'il commande avaient séparé des femmes, des enfants et des vieillards, les hommes entre 15 et 70 ans susceptibles de porter les armes, et les avaient emmenés dans des bus et des camions sous les yeux des casques bleus néerlandais censés les protéger. 8.000 musulmans bosniaques ont été ainsi exécutés. Pour le 15e anniversaire de ce massacre, le président serbe Boris Tadic s'est rendu à Srebrenica, en signe de repentance et de réconciliation. Représentant des forces libérales et démocratiques de son pays, Boris Tadic était pris entre sa volonté de rapprochement avec l'Union européenne et l'OTAN d'une part, la pression des milieux nationalistes serbes d'autre part, qui considèrent Mladic – et Karadzic — comme des patriotes voire des héros. La communauté internationale a longtemps reproché aux dirigeants et surtout aux services de sécurité serbes de ne pas manifester un grand zèle dans la recherche des criminels de guerre inculpés par le TPIY, qui se trouvaient sur leur territoire. L'arrestation de Ratko Mladic qui devrait être rapidement livré au TPIY clôt une page sombre de l'histoire des Balkans et de l'Europe.