Radovan Karadzic, ce nom associé à l'histoire la plus sombre de la Serbie, est enfin arrêté. Lundi soir dans la nuit, les services de sécurité serbes sont venus chercher chez lui, dans la banlieue de Belgrade, l'ancien chef politique des serbes de Bosnie. Son arrestation met fin à treize ans de cavale d'un des chefs de guerre les plus recherchés dans le monde. Pendant toutes ces années, il vivait sous une fausse identité à Belgrade, où il pratiquait la médecine dans une clinique privée. Depuis 1995, date de son inculpation, le Tribunal international de la Haye chargé de juger les crimes commis pendant la guerre de Bosnie le réclamait. Quinze chefs d'inculpation dont génocide, crimes de guerre, purification ethnique et crimes contre l'humanité pèsent sur l'ancien bras droit de l'ex-président Slobodan Milosevic. Radovan Karadzic est tout simplement l'architecte de la politique lors du conflit en Yougoslavie ; il est aussi l'investigateur du génocide de Srebrenica. En 1995, 8000 hommes et adolescents ont été massacrés dans cette ville où de nombreux musulmans bosniaques s'étaient réfugiés car cette enclave était censée être protégé par l'ONU. C'est le plus grand massacre perpétré en Europe depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il est également responsable des 43 mois du siège de Sarajevo qui a causé la mort de 12 000 victimes. Pendant ces trois mois et demi, Radovan Karadzic affirmait à la presse internationale que la capitale bosniaque « n'était pas en état de siège » et que « les musulmans se bombardaient eux-mêmes et que les civils fuyaient son armée de leur plein gré ». Durant cette période, Karadzic a également organisé des prises d'otages. Cependant, il plaide son innocence et à déjà déposé un recours. Pourtant, peu avant la guerre, en 1992, il était plus explicite et avait prémédité ces crimes en mettant en garde le Parlement régional. Dans son discours, il annonçait : « Un enfer pour la République si elle prend une telle direction. La population musulmane risque de disparaître parce qu'elle ne pourra pas se défendre si une guerre éclate. » Radovan Karadzic était un nationaliste serbe partisan de la grande Serbie. Il lui reste par ailleurs quelques partisans de sa conviction politique qui sont venus le soutenir, hier, pour protester contre son arrestation. Les autres, la plus grande majorité, ont poussé un soupir de soulagement après son arrestation, notamment les communautés musulmanes et les Croates, principales victimes de sa politique. « Karadzic est pour nous le symbole du mal. Je me réjouis que la justice soit rendue, mais rien ne pourra guérir mes blessures », explique Asmi, une des rescapées du massacre de Srebrenica qui a perdu 30 membres de sa famille. Cette victime devra attendre encore quelques mois et tout le processus pour que la justice soit rendue. Pour tous ses crimes, « le sauveur des Serbes bosniaques » risque la prison à vie. Pratiquement tous les responsables des crimes de la guerre en Yougoslavie ont été arrêtés et sont en captivité ; il ne reste plus que le général Ratko Mladic et l'ancien dirigeant serbe en Croatie Garan Hadzic.