Si la victoire du «oui» semble acquise, renforcée par une propagande d'Etat massive, l'enjeu majeur du vote pour l'adoption de la nouvelle Constitution marocaine demeure le taux de participation. Un marqueur pour l'après-scrutin… si les dés ne sont pas pipés. Près de treize millions de Marocains (sur 21 millions en âge de voter) étaient appelés aux urnes hier pour se prononcer sur le projet de révision de la Constitution proposé par Mohammed VI. C'est le premier référendum sous le règne du roi, qui a succédé à son père Hassan II en 1999. Environ 40 000 bureaux de vote ont été aménagés sur l'ensemble du territoire marocain tandis que 520 autres sont mis à la disposition des Marocains vivant à l'étranger. Le projet de Constitution prévoit un réaménagement des pouvoirs du Premier ministre, mais garantit au monarque des prérogatives régaliennes considérables. Un projet destiné à répondre à la demande des manifestants, qui réclament depuis le déclenchement des «révolutions arabes» plus de démocratie et une véritable séparation des pouvoirs, et qui jugent le projet très insuffisant: «Un rendez-vous raté avec l'Histoire pour Mohammed VI» pour les «févriéristes», ce mouvement de jeunes qui dénonce une Constitution «imposée» et concoctée dans les arcanes du Palais par des conseillers inféodés à la Couronne. Aussi, le Mouvement du 20 février, à l'origine des manifestations depuis plusieurs mois, avait appelé à boycotter le scrutin, jugeant que cette réforme constitutionnelle «cosmétique» était loin d'être synonyme de processus démocratique. Ses militants réclament l'instauration d'une «réelle monarchie parlementaire», où le roi – qui demeure largement populaire – règnerait mais ne gouvernerait pas, une justice indépendante, la fin de l'affairisme et de la corruption, et la désanctuarisation des appareils sécuritaires. «Mamsawtinch!» («Nous ne voterons pas!») est leur mot d'ordre, relayé en masse sur Internet via les réseaux sociaux. Un site web a en outre été mis en place pour traquer toute irrégularité dans les bureaux de vote.