L'Algérie a fêté le 5 juillet 2011 ses 49 années d'indépendance politique. S'il faut éviter la sinistrose car tout ce qui a été entrepris depuis l'indé-pendance politique n'a pas été totalement négatif, surtout après une décennie sanglante entre 1990-1999 où la demande sociale a été comprimée et l'économie à l'arrêt. Il faut également éviter l'autosatisfaction source de névrose collective. Permettre un débat objectif et productif est l'objet de cette contribution(1). 1- La population algérienne était de 35,6 millions d'habitants au 1er janvier 2010 et l'Office des statistiques (ONS) donne une population de 36,3 millions d'habitants au 1er janvier 2011. La population active devrait dépasser les dix (10) millions et la demande d'emplois additionnelle varierait entre 300.000 à 400.000 personnes par an, nombre d'ailleurs sous-estimé puisque le calcul de l'ONS applique un taux largement inférieur pour les taux d'activité à la population féminine. Pourtant le taux de chômage officiel est estimé à 10,2% en 2009 contre 11,3% en 2008 mais incluant les sureffectifs des administrations, des entreprises publiques, les emplois dans la sphère informelle et les activités temporaires de moins de six (6) mois, en majorité des emplois improductifs comme refaire les trottoirs ou désherber les routes. Redressé, ce taux dépasse largement les 20% car le taux d'emploi réel est fonction du taux de croissance et des structures des taux de productivité. Malgré une injection massive de la dépense publique, l'Etat dépensant 2 fois plus que la moyenne des pays émergents avec des résultats deux fois moindres. Le taux de croissance global de l'économie est relativement faible, sachant qu'un accroissement par rapport à un taux de croissance faible de l'année précédente (ce qui est le cas de l'Algérie) donne toujours en valeur relative un taux de croissance faible même si le taux est supérieur l'année qui suit. Il aurait été de 2% en 2007/2008, 3% en 2009, (contre 5% entre 2005/2006), et selon les estimations internationales à 4 % en 2010, à 3,5% en 2011 et à 3,6% entre 2012 et 2014. Le produit intérieur brut en valeur nominale est de 154,4 milliards de dollars en 2009 et 161,9 milliards de dollars fin 2010, selon le FMI, montant en contradiction avec celui annoncé par le gouverneur de la Banque d'Algérie car il faut raisonner à prix constants et non à prix courants de peu de signification. Hors hydrocarbures, le taux de croissance officiel a été pour 2009/2010 de 9,3% contre 6% en 2008 tiré essentiellement par l'agriculture et le BTPH, la loi de finances 2011 adoptée en Conseil des ministres le 28 septembre 2010 donnant une prévision pour 2011 de 4% de taux de croissance du PIB dont 6% hors hydrocarbures. Face à ces données officielles, notamment du taux de croissance, l'on peut démontrer aisément à partir du renversement de la matrice du tableau d'échange interindustriel que la rente des hydrocarbures participe pour plus de 80% directement et indirectement à travers la dépense publique, ne restant aux créateurs de richesses moins de 20% dans la création de la valeur. 2.- Pour le gouvernement, le taux d'inflation a été de 1,6 % en 2005, 3% en 2006, 3,5 % en 2007, 4,5% en 2008, 5,7% en 2009 et, paradoxe, 4% en glissement annuel pour 2010. Or, un agrégat global comme le revenu national par tête d'habitant peut voiler d'importantes disparités entre les différentes couches sociales. Une analyse pertinente doit lier le processus d'accumulation à la répartition du revenu ( 70% percevant moins de 200 euros par mois net), le modèle de consommation par couches sociales, l'évolution des biens de première nécessité dont la hausse entre 2009/2011 est largement supérieure au taux officiel. Certes, le SNMG a plus que doublé, passant de 6.000 à 15 000 dinars ces dernières années, à prix courants, mais devant déflater par le taux d'inflation réel pour déterminer le véritable pouvoir d'achat. Aussi, une interrogation s'impo-se : comment est-ce qu'un Algérien, qui vit au SNMG (120 euros par mois, soit 4 euros par jour alors que le prix du kilo de viande dépasse 9/10 euros) fait face aux dépenses incontournables : alimentation, transport, santé, éducation. La cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, mêmes charges) et les transferts sociaux qui atteindront plus de 1.200 milliards DA en 2011, soit 18% du budget général de l'Etat et plus de 10% du PIB (taux identique entre 2009/2010) jouent temporairement comme tampon social ? Comme se pose la problématique de la dépendance, la facture alimentaire dépassera 7 milliards de dollars en 2011, selon les premières données des statistiques douanières algériennes. Quel est donc le bilan du PNDA qui a englouti des centaines de milliards de dinars ? 3- Les exportations en hydrocarbures sont en moyenne de 97,6% entre 2009/2010, libellées en dollars. Le pétrole représente 49% des recettes et le gaz 49% des recettes), la fiscalité pétrolière 77 % des recettes fiscales la logique rentière avec pour corollaire la facilité des dépenses monétaires sans se préoccuper de la bonne gestion et la corruption étant en plein syndrome hollandais. Or pour le gaz qui devrait dans la part des exportations aller en croissant, l'étude récente du FMI de juin 2011 prévoit une bulle gazière en raison de la révolution du gaz non conventionnel (moyenne 4/5 dollars le MBTU) pendant au moins la période 2011/2020 alors que du fait des coûts élevés, le prix de cession pour l'Algérie doit être supérieur à 10 dollars le MBTU. Que deviendra l'Algérie avec la fin des contrats à moyen terme 2012/2013, avec la baisse de ses recettes issues du gaz ? Les importations dont la valeur dépasse 40 milliards de dollars entre 2009/2010 et plus pour 2011, montrant que les mesures édictées dans le cadre de la loi de finances complémentaire n'ont qu'un impact plus que limité sur l'évolution da la valeur de nos importations. L'essence de la hausse des importations est l'envolée de la dépense publique, tout en devant être attentif pour les importations, tant à l'inflation mondiale qu'au cours de l'euro dont 60% environ libellées en euros, toute augmentation de la valeur d'euros gonflant la facture d'importation. C'est que l'économie algérienne est fortement dépendante des biens de capital et des biens de consommation intermédiaires et finaux presque tous importés n'ayant pas jeté les bases d'un appareil productif capable d'affronter la concurrence internationale et les tendances relatives des grands agrégats économiques bien que positives, révèlent une macroéconomie sous contrôle relatif : la persistance des déficits publics a produit un système d'éviction sur l'investissement productif et une dette publique intérieure et extérieure épongée artificiellement par la rente des hydrocarbures. Le gouvernement doit être attentif pour toute analyse objective à la balance des paiements et non uniquement à la balance commerciale, le niveau de la dette extérieure à moyen et long terme est estimé à 3,92 milliards de dollars au 1er janvier 2010 (principal et service de la dette) et le montant poste assistance technique étrangère de 4 milliards de dollars en 2004 à 11 milliards de dollars entre 2008/2010 avec paradoxalement l'accélération de l'exode de cerveaux algériens. Le montant des réserves de change signe monétaire dues à des facteurs exogènes et non signe du développement, composée des réserves de change à hauteur de 46% en dollars et à 42% en euros, le reste étant constitué d'autres monnaies étrangères, à l'image de la livre sterling et le yen japonais, dont 80% environ placées à l'étranger, notamment en bons de Trésor américains et européens, ont été estimées à 56 milliards de dollars en 2005, 77,78 milliards en 2006, 110 milliards en 2007 et à 138,35 milliards de dollars en 2008 pour 2009 à 147,2 milliards de dollars US et 157 milliards de dollars fin 2010. Face à cette aisance financière, la dépense publique est passée successivement de 55 milliards de dollars en 2004, à 100 milliards de dollars en 2005 puis à 140 milliards de dollars fin 2006 et qui a été clôturée entre 2004/2009 à 200 milliards de dollars, mais faute de bilan, on ne sait pas si l'intégralité de ce montant a été dépensée. Quant au programme d'investissements publics 2010/2014, le gouvernement a retenu des engagements pour 286 milliards de dollars, et concerne deux volets, à savoir le parachèvement des grands projets déjà entamés entre 2004/2009, l'équivalent à 130 milliards de dollars (46%) et l'engagement de projets nouveaux pour un montant de près de 156 milliards de dollars. Qu'en sera-t-il des restes à réaliser pour les nouveaux projets inscrits au 31/12/2004 à la fois faute de capacités d'absorption et d'une gestion défectueuse ? Peut-on continuer dans une voie suicidaire avec l'assainissement des entreprises publiques qui a couté au Trésor plus de 50 milliards de dollars entre 1971/2010 sans résultats probants , 70% étant revenues à la case départ et le gouvernement vient de débloquer encore 16 milliards de dollars pour l'année 2011 au nom d'une paix sociale fictive et transitoire, qui, combinée à l'injection d'une masse monétaire sans précédent risque de conduire le pays à une hyperinflation que l'on essaie de comprimer transitoirement par des subventions ? (A suivre)