Le procès des assassins présumés du chantre de l'amazighité Lounès Matoub, Medjnoun et Chenoui, en détention préventive depuis près de douze années à la maison d'arrêt de Tizi Ouzou, se tiendra le 18 du mois en cours au tribunal criminel de Tizi Ouzou, a-t-on appris de Me B. Aït Habib, l'avocat de Medjnoun, un des deux accusés. «Le magistrat instructeur a remis sa copie après trois longues années», indique l'avocat dans un communiqué dont une copie nous a été remise. Ce procès tant attendu en Kabylie est programmé, pour rappel, après une vingtaine de jours de grève de la faim et une multitude de correspondances de Medjnoun, adressées au premier magistrat, toutes cosignées par son avocat, à l'effet d'«user de sa position afin de demander la programmation de son procès». Dont celles (correspondances, ndlr) où il n'a eu de cesse de clamer son innocence, en vain. «Le résultat de ce complément a-t-il apporté du nouveau ou a-t-il seulement augmenté le calvaire de Malik Medjnoun ? Une perte de temps pourrait-on penser, 13 années après l'assassinat du chanteur Matoub», s'interroge l'avocat. Et de poursuivre : «Pourrait-on un jour déterminer la responsabilité dans cette gabegie de laisser en détention provisoire un jeune qui venait d'avoir 25 ans ? Douze longues années en détention préventive, un record mondial qui ne grandit pas la justice algérienne. Comme de bien entendu chacun trouvera un justificatif à sa démarche.» Imaginons, lit-on encore à travers le document, l'issue des deux procès : celui de Chenoui-Medjnoun et celui de l'assassinat de Lounès Matoub. «Si l'un des deux est condamné alors on se posera à juste titre la question de celui qui a revendiqué haut et fort ce forfait et qui se complaît dans l'aisance de la résidence offerte par la «société». Adieu la vérité sur le meurtre de celui que les jeunes considèrent comme un «espoir», poursuit l'avocat pour qui, «cette affaire fait une tache indélébile dans l'histoire de cette justice aux ordres qui répond allo à tous vents». Pour rappel, le procès de Lounès Matoub s'est tenu le 8 juillet 2008 au tribunal criminel de Tizi Ouzou et a été renvoyé à une date ultérieure pour «complément d'enquête». Une enquête qui suppose, pour reprendre Me Rahem, un des avocats de la partie civile, donc de la famille Matoub, «l'audition des témoins cités dans l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation, l'audition des témoins que la sœur du rebelle, Malika Matoub, a introduite au dossier et, enfin, une expertise balistique». Tout comme, a-t-il poursuivi, il n'est pas exclu qu'une autre reconstitution des faits ait lieu. «Tout est possible», affirme-t-il, souhaitant au passage que «la justice ouvre l'enquête rapidement et que le dossier soit repris immédiatement» pour que, dit-il encore, «le procès ait lieu dans les plus brefs délais». L'avocat de la partie civile fait cas aussi de l'absence des témoins oculaires, citant les sœurs de la veuve Matoub, Ouerda et Farida Brahmi, mais aussi de six autres témoins notamment les deux repentis qui ont «balancé» Chenoui Mahieddine, alias Abdelhak (33 ans en 1998) et Medjnoun Malik (24 ans en 1998) qui sont, pour rappel, en détention depuis 1999. Tout comme celle (l'absence, ndlr) des deux médecins légistes. Même Me Sid-Houm, un des avocats des deux présumés assassins aurait refusé de plaider, refusant, aurait-il confié à des confrères, «la tenue d'un procès expéditif». Ce à quoi le juge a décidé le report du procès à une date ultérieure pour complément d'enquête, considérant que les demandes de la partie civile notamment sont susceptibles d'apporter des éléments nouveaux au dossier.