Je viens d'être invité par deux importants organismes internationaux en tant que professeur d'université algérien, l'un à Paris, l'autre à Malte, pour débattre des perspectives de l'économie algérienne et des relations géostratégiques Europe-Maghreb. A) La première rencontre, qui sera organisée le 16 novembre 2011 en présence de nombreuses personnalités du Maghreb et de l'Afrique par CM-CIC-Securites dans les salons du prestigieux hôtel Salomon de Rothschild, à Paris, dans le VIIIe arrondissement, une entreprise d'investissement du groupe Crédit Mutuel CIC, deuxième groupe bancaire français, qui verra la présence de bon nombre de responsables du CAC 40, dont France Télécom, BMCE Bank, Meditel, Lafarge... aura pour thème «Africa, the next frontier». J'interviendrai en tant qu'expert international pendant trente minutes sur le thème «Bilan et perspectives de l'économie algérienne» ou comment mettre en œuvre une bonne coopération pour un partenariat gagnant-gagnant. J'envisage de développer les axes suivants, quitte à les approfondir lors du débat. 1) La question stratégique d'une transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales : à quel horizon les réserves pétrolières et gazières en Algérie vont-elles arriver à épuisement, fonction de l'évolution du prix international du gaz pour les vingt années à venir : stable, en baisse (concurrence des énergies renouvelables, du gaz de schiste…), en hausse (raréfaction du pétrole, demande énergétique mondiale tirée par la croissance des pays émergents) ? La croissance démographique algérienne dans vingt-cinq ans en tenant compte de la demande énergétique interne pourra-t-elle être satisfaite par une transition énergétique réussie (solaire, nucléaire), ce qui pose la problématique de la transition énergétique en Algérie (plan solaire, développement des énergies renouvelables, nucléaire…). Le gouvernement algérien a un projet ambitieux dans les énergies renouvelables et, dans ce cas, peut être envisagé l'apport des investissements étrangers mais qui doivent faciliter le transfert technologique par la formation d'Algériens 2) Seront aussi abordées sans passion et en toute lucidité les nouvelles mesures de l'investissement étranger en Algérie suite à la crise de l'économie mondiale depuis la loi de finances complémentaire 2009 concernant les hydrocarbures, le secteur industriel, les services, le secteur bancaire et comment en faire un levier du partenariat quitte à les améliorer. Dans ce cadre, étant utopique de s'enfermer sur soi, et comme le font intelligemment les pays émergents, l'Algérie doit s'insérer et évoluer au sein d'une économie ouverte. Sont donc posées les modalités de l'insertion dans les échanges internationaux (Grand Maghreb, processus d'adhésion à l'OMC, Accord d'association avec l'UE). Qu'est-ce que l'Algérie peut en attendre : spécialisation industrielle, gains de productivité et croissance conformément à la théorie des avantages comparatifs ou regain d'importations et destruction du tissu industriel local si l'ouverture n'est pas opérée de manière suffisamment graduelle 3) Quelle est la situation sur le plan macro-économique : taux de croissance, taux de chômage, taux d'inflation, réserves de change, structuration des échanges, importation et exportation et quels sont les obstacles à l'investissement et comment les lever en améliorant l'environnement dont la bureaucratie, le système financier, le foncier et le système socio-éducatif. Car les déterminants qui priment et qui doivent faire l'objet d'une attention immédiate en vue de parvenir au développement d'un appareil productif compétitif et diversifié sont gouvernance, Etat de droit, rôle de l'Etat et aspects institutionnels formation/enseignement/recherche/innovation ( axe essentiel d'un bon partenariat), développement d'un secteur bancaire privé et des marchés financiers, insertion dans les échanges internationaux devant respecter le «séquençage» particulier entre ces divers éléments. B) Quant à la rencontre de Malte les 24 et 25 novembre 2011 suite à l'invitation du président du forum Europe-Maghreb lors d'un séminaire international sur les transitions politiques en Méditerranée qui verra la présence d'importantes personnalités politiques et économiques de la région, au vu de la récente expérience, notamment de ce que l'on qualifie de printemps démocratique arabe, mon intervention sera axée sur le thème stratégique qui intéresse les Etats-Unis, l'Europe et le Maghreb, dont l'Algérie, à savoir «La place de l'Algérie, du Maghreb dans la mondialisation». En effet, comme le note les concepteurs de cette organisation, «le poids des contraintes de développement au sud de la Méditerranée et la résurgence toute récente d'un certain nombre d'aspirations positives dictent forcément une partie de l'agenda méditerranéen. Cet exercice ne saurait toutefois en être le simple produit immédiat, et ce, pour trois raisons : une transition est par définition un processus qui se construit dans la durée, sa nature renvoie pour partie à l'idée d'universalité et son caractère est enfin suffisamment aléatoire pour qu'il en résulte un besoin de contradiction et de confiance durables». Il est prévu d'aborder les thèmes suivants. 1-) Les enjeux de la transition au sud de la Méditerranée : quelles transitions, pourquoi, par qui et comment, les dimensions régionales et sécuritaires des enjeux de la transition au sud de la Méditerranée, les interrogations en matière de transition : la pertinence, les apports et limites du concept de transition appliqué au sud de la Méditerranée, les incertitudes et les risques des processus de transition au sud de la Méditerranée et l'apport des expériences en matière de transition : les expériences réussies ou semi-réussies (Espagne, Portugal, Pologne, etc), les échecs ou semi-échecs, les leçons à retenir. 2) Les moyens institutionnels et politiques de la transition : quelles institutions pour quelle transition ? Le rôle des forces armées et la question de la réforme des services de sécurité dans les situations de transition démocratique, les ressources et les moyens de la gouvernance dans des contextes fragiles et incertains, les instruments économiques et financiers de la transition : les challenges, conditions et moyens économiques d'une transition effective, la réforme des institutions financières et les facteurs de dynamisation de l'investissement productif, quelles relations Nord-Sud et Sud-Sud pour quelle transition économique et financière et les facteurs de consolidation de l'efficacité des processus de transition : le poids du religieux dans les transitions méditerranéennes en cours et quel renouveau intellectuel arabe pour quelles transitions au sud de la Méditerranée dont quelle prééminence du rôle des femmes dans l'efficacité des processus de transition ? 3) On ne peut, selon mon point de vue, séparer ces deux rencontres internationales qui entrent d'ailleurs dans le cadre de la coordination d'un important ouvrage qui sera réalisé sous ma direction et celle de Camille Sari, professeur à la Sorbonne de Paris et expert international financier, à savoir «Le Maghreb face aux enjeux géostratégiques». Cet ouvrage d'environ 980 pages, à paraître au courant de mars/avril 2012, verra la participation de trente personnalités internationales maghrébines (Algérie, Maroc, Tunisie, Libye et Mauritanie), dix personnalités européennes et, en principe, deux autres américaines. J'aurai l'honneur de solliciter au début de janvier 2012 une très brève préface du président de la République algérienne, du roi du Maroc, du président de la Mauritanie, des présidents intérimaires de la Tunisie et de la Libye et du secrétaire général de l'UMA. Les responsable des pays du Maghreb devront exposer, en fonction des intérêts spécifiques de leur pays, leur vision de cette intégration face aux défis de la mondialisation, une nécessité historique et économique. En résumé , si j'ai accepté ces invitations auprès de ces deux organisateurs, c'est que j'espère que l'Algérie, qui a d'importantes potentialités, deviendra un acteur actif au sein du bassin méditerranéen et du continent Afrique sous réserve de réformes courageuses impliquant tous les segments de la société, loin de toue vision bureaucratique autoritaire conciliant le développement durable, reposant sur la connaissance et la démocratie par une profonde justice sociale en tenant compte de notre anthropologie culturelle.