La victoire des mouvements islamistes aux élections dans trois pays arabes ne laisse pas indifférents leurs «frères» d'Algérie. Une chance historique pour le MSP, première formation islamiste et troisième force politique dans le pays, à quelques mois des législatives. Pour cela, il se dit prêt à quitter l'alliance présidentielle et à durcir sa ligne politique, en jouant l'opposition et en revenant au discours populiste. Le mouvement d'Aboudjerra Soltani n'en finit pas de surprendre l'opinion par ses couardises et sa duplicité, qu'il a, en fait, toujours adoptées comme une mode d'action politique. Le parti est tout à fait dans son style. Sauf que cette fois-ci, la conjoncture régionale lui est tout à fait favorable. A lui et aux autres segments de la mouvance fondamentaliste. Le communiqué sanctionnant la réunion de son bureau exécutif qui s'est réuni hier, donne le ton et lance le parti dans une démarche de rupture tactique avec le pouvoir. Il reproche aux tenants du pouvoir de diluer le projet de réformes voulues par le Président dans des considérations techniques qui «dévient de la volonté populaire » et risquent ainsi «d'aggraver la désaffection citoyenne lors des prochaines échéances électorales» et dénonce, au passage «l'esprit de tutelle» qui prévaut, selon les rédacteurs du communiqué, dans la mise en œuvre des réformes. Il sollicite l'intervention du président de la République pour «sauver son initiative en la soumettant à un référendum.» Une politique faite de prédation. Avant son voyage très suspect au Qatar, centre de contrôle des révolutions dans le monde arabe, Aboudjerra Soltani, a brillé ces derniers mois par des sorties des plus insidieuses contre le pouvoir. Il menaçait à chaque fois de se retirer de l'Alliance présidentielle qu'il accuse d'immobilisme. Il a choisi un moment propice : les turbulences dans le monde arabe, pour appeler lui aussi au changement. Soucieux de préserver sa base qui commence à s'éroder, il craint une sérieuse déroute aux prochaines échéances électorales, en faisant dans le populisme et la démagogie. Dernière sortie en date, celle du secrétariat national du parti, contre le ministre de l'Intérieur. Dans un communiqué au vitriol, rendu public dimanche, le MSP accuse le ministère de l'Intérieur de «vouloir supplanter l'action de la commission des réformes conduite par Bensalah et la volonté du président de la République », en voulant, selon lui, conditionner l'adoption des réformes constitutionnelles prévues aux nouvelles lois. Le MSP, un parti dont le discours s'inspire de l'idéologie des Frères musulmans, mais qui s'est toujours gardé des excès salafistes et de la tentation de la violence. Grâce à son activisme politique et social, le parti de Mahfoud Nahnah a le mérite d'avoir atténué le déferlement intégriste pour avoir pu rassembler une large base de sympathisants de cette mouvance autour du projet dit de «changement la société par le bas.» Ennemi juré à la fois des «démocrates» et des radicaux islamistes, il est accusé par les premiers de partager les tâches avec les islamistes armés, et par les seconds de servir de suppôt au pouvoir en place pour les mêmes attitudes. En effet, le MSP est l'un des premiers partis, et le seul de sa «famille», à avoir condamné le terrorisme et avoir boycotté le Contrat de Rome qui a réuni, en 1995, les principaux partis d'opposition, dont le parti dissous. Il en a même été l'une des premières victimes, puisque plusieurs militants – dont une de ses figures de proue, cheikh Bouslimani- ont été assassinés par des terroristes islamistes. Il est clair que ces attaques ne relèvent plus de simples surenchères passagères, comme celles que le rusé leader habituait si souvent ses ouailles, mais un signe de durcissement qui peut aller plus loin.